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13 mars 2017 1 13 /03 /mars /2017 07:15

2017-03-13 (jp-ccl) Le Conseil d’Etat est saisi d’une requête en annulation du décret du 26 janvier 2017 relatif à l’UNAASS

Publié le : 11 mars 2017

Sur ce même sujet : 2017-02-08 (art-dp) (Hospimedia) Le décret du 26 janvier 2017 relatif à l’union nationale des associations agréées des usagers en santé va être attaqué devant le Conseil d’État

Décret du 26 janvier 2017 relatif à l’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé (Legifrance) : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/…

Loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé (Legifrance) : https://www.legifrance.gouv.fr/affi…


 
2017-03-13 Recours en excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat.

R

RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR

CONSEIL D’ETAT
 

POUR :

1. - L’association Cercle de Réflexion et de Proposition d’Action sur la psychiatrie(CRPA),
Association régie par la loi de 1er juillet 1901, dont le siège social est
14 rue des Tapisseries – 75017 PARIS, prise en la personne de son Président, Monsieur André Bitton, domicilié en cette qualité audit siège.

2. - L’association Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de proximité,
Association régie par la loi du 1er juillet 1901, dont le siège est 1 rue Jean Moulin – 70200 LURE, prise en la personne de sa Présidente domiciliée en cette qualité audit siège.

3. - L’Association GRANDIR, dite association des parents d’enfants ayant des problèmes de croissance,
Association régie par la loi du 1er juillet 1901, reconnue d’utilité publique, dont le siège est 24 rue Hector G. Fontaine – 92600 ASNIERES, prise en la personne de sa Présidente domiciliée en cette qualité audit siège.

4. - L’Association ACTIF SANTÉ,
Association régie par la loi du 1er juillet 1901, dont le siège est 47 rue Bisson – 75020 PARIS, prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège.

Ayant pour Avocat :
Maître Raphaël Mayet.
SELARL Mayet et Perrault
Avocat à la Cour – C 393 - 78000 VERSAILLES
 

CONTRE :

Le Décret n°2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé.
 

Requête déposée le 13 mars 2017, rédigée le 9 mars 2017.
 

La loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation du système de santé a inséré dans le Code de la Santé Publique les articles L 1114-6 et L 1114-7 ainsi rédigés :

Article L 1114-6 : « Il peut être créé une Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, composée des associations d’usagers du système de santé agréées au plan national qui apportent à l’union leur adhésion.

Cette union est constituée sous le régime de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. Ses statuts et son règlement sont soumis à l’agrément du ministre chargé de la santé.

L’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé est habilitée à :

1° Donner ses avis aux pouvoirs publics sur les questions relatives au fonctionnement du système de santé et leur proposer les mesures qui paraissent conformes aux intérêts matériels et moraux de ses membres ;

2° Animer un réseau des associations agréées d’usagers aux niveaux national et régional ;

3° Agir en justice pour la défense de ses propres intérêts moraux et matériels comme de ceux des usagers du système de santé ;

4° Représenter les usagers auprès des pouvoirs publics, notamment en vue de la désignation des délégués dans les conseils, assemblées et organismes institués par les pouvoirs publics ;

5° Proposer au ministre chargé de la santé une liste des associations mentionnées à l’article L. 1114-1.

Chaque association d’usagers du système de santé, dans la limite de ses statuts, conserve le droit de représenter auprès des pouvoirs publics les intérêts dont elle a la charge ».

Article L 1114-7 : « L’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé est administrée par un conseil dont les membres sont élus selon les conditions définies dans ses statuts.

Ne peuvent être membre du Conseil d’Administration les personnes frappées par une mesure d’interdiction des droits civiques, civils et de famille.

Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de mise en œuvre des missions et le fonctionnement de l’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, notamment son organisation sous forme de délégation territoriale ».

En application de ces dispositions légales, a été publié le 28 janvier 2017 un décret n° n°2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé.

Les 4 associations requérantes qui sont des associations d’usagers du système de santé sollicitent l’annulation de ce texte pour les raisons qui vont être exposées.
 

I. - SUR LA RECEVABILITÉ DE LA REQUÊTE :

Les recours pour excès de pouvoir contre les actes des autorités administratives présentés devant le Conseil d’État sont exemptés de l’obligation du ministère d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de Cassation en application de l’article R 432-2 du Code de Justice administrative.

Au regard de leur objet, les associations requérantes ont qualité pour demander l’annulation du texte susvisé, puisqu’elles ont toutes pour objet de regrouper les usagers du système de santé.

A cet égard, la Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité a pour objet « garantir l’égal accès pour tous à la santé et aux soins de proximité de qualité en toute sécurité, en défendant, en promouvant, en exigeant le rétablissement des structures hospitalières de proximité nécessaires dans le cadre d’une mission de service public ». (pièce 2).

La Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité dispose d’un agrément national pour la représentation des usagers, par arrêté de la Direction générale de la santé du 11 juin 2013 (pièce n° 4)

L’association GRANDIR, association des parents d’enfants ayant des problèmes de croissance fondée le 5 mars 1979 (pièce 4) a pour but de :

— Contribuer à diffuser l’information sur le traitement par hormone de croissance afin que tous les enfants et adultes qui ont besoin d’être traités le soit et le plus tôt possible,
— Rompre l’isolement des parents, des adultes et des enfants concernés en créant des liens de solidarité,
— De promouvoir l’accompagnement psychologique auprès des enfants et des adultes concernés et les membres de leur famille,
— D’accroître et d’aider financièrement dans la mesure de ses moyens la recherche médicale dans le domaine de la croissance, y compris toutes les incidences éventuelles des traitements par hormone de croissance ou du manque d’hormone de croissance. (pièce 5)

L’association Grandir dispose d’un agrément national pour la représentation des usagers du système de santé par arrêté de la Direction générale de la santé du 28 avril 2016 (pièce n° 7).

L’association ACTIF SANTE a, quant à elle, pour but de constituer un réseau national de personnes vivant avec le VIH ou une ou plusieurs formes de l’hépatite ainsi que les personnes les soutenant.

Elle a pour vocation de collaborer aux travaux de réseaux nationaux, internationaux, en particulier européens et intervenir ou à participer activement dans le débat public sur la santé et le social afin de mieux faire entendre la parole des personnes concernées… ».

Cette association bénéficie d’un agrément national pour la représentation des usagers du système de santé (pièces 6 et 7).

L’association CRPA a, quant à elle, pour objet à titre principal :

— D’informer sur l’abus et l’arbitraire en psychiatrie,
— De promouvoir l’effectivité des droits de l’homme et des droits à la défense dans l’exercice de la psychiatrie, en partie dès lors qu’il s’agit de mesures de contrainte,
— De militer contre l’internement psychiatrique arbitraire contre toute extension de la contrainte aux soins psychiatriques, contre le détournement du soin psychiatrique à des fins répressives, contre les traitements inhumains et dégradants, contre les atteintes à l’intégrité physique et psychique des personnes dans le cadre des prises en charge psychiatriques.

Cette association bénéficie d’un agrément de représentation des usagers au niveau régional délivré par le directeur de l’Agence Régionale de Santé d’Île-de-France le 6 septembre 2016 (pièce 8).

Chacune des associations requérantes dispose d’un intérêt à solliciter l’annulation des dispositions attaquées.
 

II. DISCUSSION SUR L’ILLÉGALITÉ DES DISPOSITIONS DU DÉCRET N° 2017-90 DU 26 JANVIER 2017 :

II.1 Sur la violation du principe de liberté d’association :

Ainsi qu’il a été rappelé, le décret attaqué a été pris en application des articles L 1114-6 et L 1114-7 du Code de la Santé Publique issus de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016.

L’article L 1114-6 prévoyait la possibilité de créer une Union Nationale des Associations Agréées du Système de Santé qui revêtirait la forme d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901.

Or, il résulte de la lecture du décret attaqué, et plus particulièrement des dispositions de l’article R 1114-18 du Code de la Santé Publique résultant de ce texte, que l’union des associations agréées d’usagers du système de santé est composé d’associations d’usagers du système de santé agréées au niveau national qui apportent librement leur adhésion.

Quant à elles, les associations non agréées au niveau national peuvent participer aux activités de l’union mais selon des modalités fixées par ses statuts et son règlement intérieur.

Ce texte constitue manifestement une entrave à la liberté d’association, puisque seules certaines personnes morales peuvent faire partie de l’union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, à savoir les associations agréées au niveau national, les autres associations ou les personnes physiques ne peuvent en faire partie que selon des modalités fixées par les statuts et le règlement intérieur de cette union nationale, statuts approuvés par le ministre de la santé.

Ainsi, ce texte pose une entrave au principe de liberté d’association qui a une valeur constitutionnelle ainsi que le Conseil Constitutionnel a eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises (voir en ce sens décision n°71-44 DC du 16 juillet 1971 ; décision 2010-3 QPC du 28 mai 2010 ; décision 2011-138 QPC du 17 juin 2011).

Cette entrave à la liberté d’association ne saurait être justifiée par des garanties objectives relatives à la transparence de gestion, la représentativité ou l’indépendance de l’association telles que posées à l’article L 1114-1 du Code de la Santé Publique puisqu’à cet égard les associations qui présentent de telles garanties et qui bénéficient d’un agrément au niveau régional ne peuvent librement adhérer de plein droit à l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé.

Ce texte n’a en réalité pour effet, si ce n’est pour objet, que de conférer un monopole de représentation des usagers du système de santé à des associations d’usagers existant au niveau national, regroupées dans l’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, au détriment des autres associations qui ont également pour objet la représentation et la défense des intérêts des usagers du système de santé.

D’ailleurs, l’article R 1114-21 issu du décret du 26 janvier 2017 dispose que seules les associations agréées au niveau national ont au sein de l’assemblée générale une voix délibérative.

Ce décret met par ailleurs en œuvre, entre autres de par son article R 1114-36, une situation de monopole de fait en faveur de l’Union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, dans la centralisation des postulations aux fins de désignation des représentants d’usagers du système de santé dans les instances sanitaires. Cela au détriment de toute structure associative agréée qui ne serait pas adhérente à l’Union nationale ici mise en place, et qui entendrait proposer ses propres postulants aux fonctions de représentants des usagers du système de santé.

Cet état de fait revient à conférer graduellement in fine à l’union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé, une fonction d’interlocuteur unique des pouvoirs publics et des instances sanitaires en matière de représentation des usagers du système de santé. Ce qui revient à conférer à cette union un monopole de fait dans la représentation des usagers du système de santé.
 

II.2 Sur l’illégalité du décret attaqué au regard des dispositions de l’article L 1114-1 du Code de la Santé Publique :

L’article L 1114-1 du Code de la Santé Publique dispose que :

« I. - Les associations, régulièrement déclarées, ayant une activité dans le domaine de la qualité de la santé et de la prise en charge des malades peuvent faire l’objet d’un agrément par l’autorité administrative compétente soit au niveau régional, soit au niveau national. L’agrément est prononcé sur avis conforme d’une commission nationale qui comprend des représentants de l’État, dont un membre du Conseil d’État et un membre de la Cour de cassation en activité ou honoraire, des représentants de l’Assemblée nationale et du Sénat et des personnalités qualifiées en raison de leur compétence ou de leur expérience dans le domaine associatif. L’agrément est notamment subordonné à l’activité effective et publique de l’association en vue de la défense des droits des personnes malades et des usagers du système de santé ainsi qu’aux actions de formation et d’information qu’elle conduit, à la transparence de sa gestion, à sa représentativité et à son indépendance. Les conditions d’agrément et du retrait de l’agrément ainsi que la composition et le fonctionnement de la commission nationale sont déterminés par décret en Conseil d’État.

Seules les associations agréées représentent les usagers du système de santé dans les instances hospitalières ou de santé publique ».

Ainsi, les associations d’usagers agréées au niveau régional disposent par le texte de l’article L 1114-1 du Code de la Santé Publique du pouvoir de représenter des usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique.

Or, aux termes de l’article R 1114-36 du Code de la Santé Publique c’est l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé qui propose les représentants des usagers du système de santé auprès des conseils, assemblées et organismes pour lesquels il est fixé réglementairement en leur sein une représentation des usagers du système de santé. Certes cette faculté est également conférée par le même article aux unions régionales, mais dans des conditions de stricte subordination des unions régionales par rapport à l’Union nationale.

En effet, selon l’article R 1114-21, 2e paragraphe, du décret ici attaqué, lors des assemblées générales de l’union nationale des associations agréées du système de santé, seules les associations d’usagers disposant d’un agrément national ont voix délibérative. Ce qui revient à conférer à celles-ci, et uniquement à celles-ci, un pouvoir de décision dans l’Union nationale.

Certes, les articles R 1114-28 et suivants du Code de la Santé Publique prévoient une organisation au niveau régional de la représentation des usagers, mais dans le cadre de cette organisation régionale les unions régionales sont composées des représentants régionaux d’associations agréées au niveau national, et au surplus les modalités de participation des associations agréées au niveau régional aux instances de gouvernance des unions régionales sont définies dans les statuts de l’union nationale.

Ainsi, alors que la loi, plus particulièrement l’article L 1114-1 du Code de la Santé Publique, prévoit que les associations agréées au niveau régional bénéficient du droit de représenter les usagers dans les instances de santé publique, le décret attaqué ne prévoit une telle possibilité que par l’intermédiaire de l’union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé puisque ce sont les statuts de l’union nationale qui déterminent dans quelle mesure les associations agréées au niveau régional peuvent participer aux instances délibératives.

Le décret ici attaqué viole ainsi le principe d’égalité des citoyens devant la loi, en instaurant une stricte minoration du droit de représenter les usagers du système de santé pour les associations ne disposant que d’un agrément régional. Cela sans parler des associations agréées nationalement ou régionalement qui refuseraient d’adhérer à l’Union nationale des associations agréées d’usagers en santé, et qui seraient ainsi marginalisées quant à la possibilité effective d’exercer leur mandat de représentation des usagers.
 

II-3 Sur l’incompétence de l’auteur du décret n°2017-90 du 26 janvier 2017 :

Le décret ici attaqué est illégal au regard du fait que dans le droit des associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations se forment selon des règles contractuelles librement organisées et consenties par les parties liées au contrat d’association.

Dans le cas d’espèce c’est un décret - c’est-à-dire un texte réglementaire normatif - qui encadre l’organisation elle-même de l’union nationale des associations agréées d’usagers du système de santé. Cela alors même que ce décret relève des prérogatives du pouvoir exécutif et de son administration, lesquels pré-fixent un cadre réglementaire, en vue que des statuts, qui sont eux contractuels, soient ultérieurement votés, qui fondent cette union, selon la loi du 1er juillet 1901.

Les associations requérantes concluent au plus fort à l’illégalité du décret du 26 janvier 2017 du fait de l’incompétence du pouvoir réglementaire, puisqu’en vertu d’un principe jurisprudentiel constant du droit des associations régies par la loi du 1er juillet 1901, ce sont les statuts qui font loi.

Le pouvoir exécutif et son administration ne sauraient régir et réglementer une association dont ils ont eux-mêmes structuré l’organisation pour pouvoir les imposer aux futurs contractants de l’association en jeu.

Pour l’ensemble de ces raisons, les associations requérantes sollicitent l’annulation du décret n° 2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé.
 

III. SUR L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE L 761-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE :

Il serait inéquitable de laisser aux associations requérantes les frais irrépétibles qu’elles ont dû engager en la présente instance.

Il sera alloué à chacune d’entre elles la somme de 1000 euros en application de l’article L 761-1 du Code de Justice Administrative.
 

PAR CES MOTIFS

Et tous autres à déduire, suppléer au besoin même d’office, les requérantes sollicitent qu’il plaise au Conseil d’État de :

— Annuler le décret n° 2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union Nationale des Associations Agréées d’Usagers du Système de Santé,

— Condamner l’État à payer à chacune des requérantes la somme de 1.000 euros en application de l’article L 761-1 du Code de Justice Administrative.

SOUS TOUTES RÉSERVES
 

Signatures :

Maître Raphaël Mayet, avocat.

Monsieur André Bitton. Président du CRPA

Madame Hélène Derrien. Présidente de la Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité

Monsieur Marek Korzec. Président d’ACTIF SANTE

Madame Béatrice Demaret. Présidente de l’Association GRANDIR
 

LISTE DES PIECES JOINTES :

1. - Décret n° 2017-90 du 26 janvier 2017
2. - Statuts de la coordination nationale des comités de défenses des hôpitaux et maternité de proximité
3. - Compte rendu de conseil d’administration du 28 février 2017
4. - Arrêté portant agrément national pour la représentation des usagers du système de santé
5. - Statuts de l’association GRANDIR
6. - PV du conseil d’administration de l’association GRANDIR du 3 mars 2017
7. - Arrêté du 28 avril 2016 portant agrément national pour la représentation des usagers du système de santé
8. - Extrait des statuts publiés de l’association ACTIF SANTE
9. - PV du conseil d’administration de l’association ACTIF SANTE du 28 février 2017
10. - Statuts du CRPA.
11. - Décision du CRPA du 6 mars 2017
12. - Arrêté de l’ARS d’Île-de-France du 6 septembre 2016 portant agrément régional du CRPA pour la représentation des usagers du système de santé.


-autre ineptie  institutionnelle:

par Olivier Petitjean 1er mars 2017

 
Garant de la conformité des lois avec la Constitution, le Conseil constitutionnel est censé rendre des décisions souveraines, imperméables aux tentatives d’influence extérieures comme aux intérêts particuliers. Qu’en est-il dans les faits ? La censure par les Sages, ces dernières années, de nombreuses mesures législatives a priori bénéfiques à l’intérêt général, en matière fiscale ou de transparence des activités des multinationales, commence à attirer l’attention. La proximité de cette instance avec de grands lobbies économiques et l’opacité de son mode de fonctionnement, suscitent la critique. Au point qu’une réforme de ce pilier du système démocratique semble aussi urgente que nécessaire.

Le 21 février, la loi sur le devoir de vigilance des multinationales [1] est définitivement adoptée par les députés français. Elle vise à combler ce qui était jusque-là une lacune béante du droit face à la mondialisation : l’impossibilité de poursuivre une multinationale pour des atteintes graves aux droits humains ou à l’environnement occasionnées par leurs filiales ou leur chaîne de sous-traitance. Cette nouvelle législation suscite déjà un grand intérêt au-delà de nos frontières, et les parlementaires et associations qui l’ont portée en France se préparent à mener la bataille au niveau européen. Proposée dès 2012, elle n’a été définitivement adoptée que quatre ans plus tard, en troisième lecture, l’avant-dernier jour de la législature, au terme d’une laborieuse procédure, et malgré un contre-lobbying acharné des milieux patronaux.
« L’Afep à tous les tournants »

Pour autant, la cause est-elle vraiment entendue ? Un dernier obstacle au moins se profile : le Conseil constitutionnel. Celui-ci a immédiatement été saisi, à la fois par les députés et par les sénateurs de droite, avec une argumentation très similaire. Lors du dernier passage de la proposition de loi devant le Sénat, ces derniers avaient déjà voté une motion d’irrecevabilité au motif que le texte serait contraire à la Constitution : trop large et trop imprécis, trop punitif, trop stigmatisant, ou encore abusant du concept de responsabilité juridique [2]. Un argumentaire qui a été directement élaboré, dès 2013, par le lobby chargé de coordonner l’opposition patronale à la proposition de loi : l’Association française des entreprises privées (Afep), qui regroupe les plus grands groupes français.

« Nous avons trouvé l’Afep à tous les tournants, témoigne un représentant d’ONG. Ils ont mobilisé une armée de juristes pour démonter notre proposition de loi auprès de Bercy. » Ils ont convaincu Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, de refuser une première version de la loi, au motif qu’elle était « aux antipodes des grands principes juridiques qui gouvernent notre pays, y compris constitutionnels » [3]. Puis ils se sont attaqués à la seconde version de la loi, celle qui a été finalement adoptée, toujours sous le même angle. Cette même ligne d’attaque est aujourd’hui portée directement devant le Conseil constitutionnel, présidé depuis février 2016 par Laurent Fabius, qui a succédé à Jean-Louis Debré.
Précédents inquiétants

Les députés et militants associatifs qui ont porté la loi contre vents et marées ne cachent pas leur nervosité. Et on peut les comprendre, à considérer plusieurs décisions récentes du Conseil constitutionnel. Dans les dernières semaines de l’année 2016, les neuf « Sages » – d’éminents juristes mais aussi d’anciens politiques comme Lionel Jospin, Michel Charasse et Valéry Giscard d’Estaing [4] – ont censuré deux dispositions adoptées par les députés pour lutter contre l’évasion fiscale des multinationales. Tout d’abord, l’amendement dit « Google », présenté par le socialiste Yann Galut, qui visait à permettre au fisc de taxer les géants du net pour les profits réalisés en France mais redirigés vers des filiales situées en Irlande ou au Luxembourg. Le Conseil a jugé qu’il portait atteinte au principe d’égalité devant la loi.

Autre mesure censurée : le reporting public pays par pays, qui aurait contraint les multinationales françaises à publier des informations complètes sur leurs filiales, y compris leurs effectifs, leur chiffre d’affaires, leurs bénéfices et les impôts acquittés. La disposition aurait permis de faire toute la lumière sur d’éventuelles manœuvres d’évitement fiscal. Déjà en vigueur pour les banques, elle est actuellement envisagée au niveau européen. Le Conseil constitutionnel a jugé qu’elle était contraire à la « liberté d’entreprendre », au motif qu’elle forçait les firmes françaises à dévoiler des informations stratégiques dont pourraient profiter leurs concurrentes. Un argument que l’on trouvait déjà sous la plume de l’Afep, qui avait déjà mené la fronde des intérêts patronaux.
Au nom de la « liberté d’entreprendre »

C’est en fait l’ensemble du quinquennat qui a été marqué par des censures constitutionnelles ciblant des mesures emblématiques initiées par François Hollande ou par les parlementaires de la majorité. Et tout particulièrement en matière fiscale. Par exemple, la proposition de taxer les très hauts revenus à 75% sur la dernière tranche, retoquée dès décembre 2012. Ou encore la loi Florange de 2014, censée mettre fin aux « licenciements boursiers » en imposant des pénalités aux entreprises qui fermeraient des sites rentables. Le Conseil a censuré cette disposition en l’estimant ici encore contraire « à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété », parce que cela aurait privé « l’entreprise de sa capacité d’anticiper des difficultés et de procéder à des arbitrages économiques ».

Le Conseil constitutionnel aurait-il tendance à se poser en gardien des intérêts des entreprises, notamment contre les tentatives de régulation visant à répondre à la nouvelle réalité caractérisée par la financiarisation et la mondialisation des économies ? Une grande partie du droit qui régit aujourd’hui le monde des affaires et ses relations avec le politique date de plusieurs décennies, parfois de plus d’un siècle. Il a donc été conçu pour des conditions économiques et sociales radicalement différentes. Les grands groupes savent en jouer à merveille. Refuser l’évolution nécessaire du droit au nom d’une interprétation extrêmement conservatrice de grands principes constitutionnels revient à leur laisser le champ libre.
Un haut lieu de lobbying

Loin de son image – et de son statut théorique – de juge imperméable aux pressions extérieures, le Conseil constitutionnel est en fait un haut lieu du lobbying. Selon une enquête de Mathilde Mathieu pour Mediapart, celui-ci a pris de plus en plus d’importance. Il se traduit notamment par la pratique des « portes étroites », des contributions informelles envoyées au Conseil pour tenter d’influencer sa décision, qui restent secrètes et ne sont communiquées ni aux parlementaires, ni même au gouvernement. Ces contributions sont commandées à d’éminents professeurs de droit constitutionnel ou à des cabinets d’avocats spécialisés, moyennant rémunération de plusieurs dizaines de milliers d’euros [5], pour défendre le point de vue des entreprises ou d’autres lobbys auprès du Conseil. Selon nos informations, dès le lendemain de la saisine du Conseil sur le devoir de vigilance, le Medef a déjà déposé une porte étroite sur le sujet.

Selon des chiffres fournis par Jean-Louis Debré lui-même lorsqu’il était encore président du Conseil, un total de 47 portes étroites auraient été déposées au cours de l’année 2014. Puis en 2015, on en dénombre 21 sur la seule loi sur le renseignement, et 24 sur la loi Macron. L’Afep est une grande habituée de cette pratique. D’après les maigres informations disponibles, elle y a déjà recouru au début des années 2000 pour faire censurer un projet d’écotaxe, grâce à la plume de Guy Carcassonne, un prestigieux constitutionnaliste rocardien. En 2013, elle lui a à nouveau commandé une « porte étroite » visant à dénoncer le caractère « confiscatoire » de la fiscalité pesant sur les entreprises [6].
En toute opacité

Au-delà de ces notes discrètes, les rencontres informelles entre certains membres du Conseil constitutionnel et des représentants des entreprises semblent également devenues monnaie courante. Dans un livre publié suite à son départ de la rue de Montpensier [7], Jean-Louis Debré évoque ouvertement des rendez-vous réguliers avec le patron du Medef ou des groupes de grands patrons, où sont notamment évoquées les questions de fiscalité. « Nous attendons beaucoup du Conseil, aurait déclaré Pierre Gattaz à l’une de ces occasions. Nous n’avons pas été déçus par vos décisions précédentes. »

Le lobbying auprès du Conseil constitutionnel est moins médiatisé que celui exercé sur les parlementaires, mais il s’avère tout aussi redoutable. Le rapport de forces y est même beaucoup plus inégal qu’à l’Assemblée ou au Sénat : associations ou simples citoyens n’ont tout simplement pas les moyens de se payer l’expertise de constitutionnalistes, et ne bénéficient pas des mêmes voies d’accès privilégiées. Le processus est en outre très peu encadré, d’une opacité quasi-totale [8]. Société civile et parlementaires en sont exclus. Ni les délibérations ni les portes étroites ne sont rendues publiques. Enfin, la pratique des portes étroites est contraire à tous les principes d’un débat contradictoire, puisque le gouvernement n’en a pas connaissance et ne peut donc y répondre.

Le rôle croissant des saisines du Conseil constitutionnel permet aussi toutes les hypocrisies. Le député socialiste Dominique Potier, l’un des fers de lance de la loi sur le devoir de vigilance des multinationales, a vu quelques jours auparavant une autre de ses propositions de loi, sur l’accaparement des terres, référée au Conseil constitutionnel par soixante parlementaires de l’opposition. Le texte a pourtant été adopté à l’unanimité en séance. Plus dérangeant encore : parlementaires et société civile étant tenus à l’écart du processus, il revient aux seuls représentants de l’exécutif de défendre les lois devant les Sages. Mais certains services ministériels, particulièrement du côté de Bercy, ne sont pas toujours très enthousiastes à défendre des législations initiées par les politiques. De quoi couler une loi, en toute discrétion.
Une nécessaire réformes des procédures

En février 2016, Laurent Fabius remplace Jean-Louis Debré à la présidence du Conseil. Depuis cette date, et pour la première fois depuis longtemps, cinq juges sur neuf ont été choisis par la gauche [9]. Cela ne semble pas avoir changé le rapport de force. Certaines voix s’élèvent cependant pour demander davantage de transparence sur les portes étroites, voire une mise à plat complète de la procédure et des moyens mis à disposition du Conseil, pour évoluer vers un modèle proche de la procédure publique et contradictoire de la Cour suprême américaine. D’autres voudraient un contrôle plus strict des éventuels conflits d’intérêts des membres de la juridiction. En vain.

Récemment, le Conseil constitutionnel a une nouvelle fois montré son conservatisme en matière d’encadrement du lobbying et des conflits d’intérêts. Plusieurs dispositions de la loi Sapin 2 sur la transparence et la lutte contre la corruption n ont ainsi fait les frais : les Sages ont estimé que les hauts fonctionnaires souhaitant passer dans le secteur privé ne devaient pas être obligés de solliciter l’avis de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique ; ils se sont également opposé aux sanctions contre les lobbyistes qui ne respecteraient pas les obligations liées aux registres imposant un minimum de transparence de leurs activités à l’Assemblée ou au Sénat ; et ont censuré la disposition prévoyant une aide financière aux lanceurs d’alerte.
Pour les ONG, deux poids deux mesures ?

Certes, les associations et la société civile ont elles aussi la possibilité de faire passer aux membres du Conseil leurs propres « portes étroites » – ce qu’elles font généralement de manière publique. Les associations de défense des migrants l’ont fait pendant la présidence Sarkozy. La Quadrature du Net, French Data Network et la Fédération des fournisseurs d’accès à Internet associatifs y ont procédé pour la loi Renseignement. Plus récemment, plusieurs dizaines de parlementaires ont saisi le Conseil, encouragés par collectif d’associations, pour qu’il se penche sur la constitutionnalité du Ceta, l’accord de libre-échange conclu entre l’Union européenne et le Canada. Ils accusent celui-ci de porter atteinte aux « conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale », notamment en raison des mécanismes d’arbitrage international investisseurs-États qu’il inclut.

Pour cette saisine inédite, ils ont sollicité trois professeurs de droit constitutionnel. Les associations qui défendent la loi sur le devoir de vigilance réfléchissent à une démarche similaire. Mais rien, dans la procédure actuelle, ne leur garantit que ces contributions seront effectivement lues et prises en compte, et qu’elles ne partiront pas directement à la poubelle. C’est bien pour cela que la signature d’un éminent constitutionnaliste, plus à même d’attirer l’attention des Sages, est si utile, et qu’elle se monnaie si cher.
La justice sociale et fiscale plutôt que les privilèges des multinationales

Principe de légalité, de proportionnalité et de nécessité des peines, principe de clarté de la loi, principe de responsabilité… Les opposants au devoir de vigilance des multinationales ont multiplié les arguments juridiques pour convaincre les parlementaires, et désormais les Sages, de l’inconstitutionnalité de la loi. Mais l’expérience passée montre que c’est sans doute aux arguments économiques que le Conseil constitutionnel est le plus sensible. S’il a censuré le reporting pays par pays et la loi Florange, c’est au nom du droit de propriété, de la liberté d’entreprendre et du secret des affaires.

Officiellement, le rôle du Conseil constitutionnel est de prévenir les atteintes excessives à ces grands principes économiques par le législateur. Mais les Sages disposent d’une grande latitude pour décider du bon équilibre entre intérêts économiques et intérêt général. Ils décident seuls, sans rendre de comptes à personne. Ces dernières années, ils semblent avoir souvent fait primer la défense de l’ordre économique établi, et donc des privilèges des multinationales, sur les objectifs de justice sociale et fiscale. Pourtant, la possibilité de réduire à néant, en quelques semaines, des années d’effort pour faire adopter une loi finit par vider le travail parlementaire de son sens et, en dernière instance, va à l’encontre des principes démocratiques les plus élémentaires.

En ciblant efficacement le Conseil constitutionnel, les lobbys patronaux auraient ainsi réussi à initier en France, à l’abri des regards, la même tendance à la « constitutionnalisation » de l’ordre économique néolibéral que l’on observe dans d’autres pays, comme l’Allemagne, mais cela sans avoir à modifier le texte de la Constitution. Dans l’hexagone, c’est davantage à une réinterprétation libérale du texte de 1958 par le juge constitutionnel, que nous semblons assister. Ceux qui cherchent à défendre une vision alternative devraient commencer à y prêter attention.

Olivier Petitjean

En photo : bureau du Président du Conseil constitutionnel
Notes

[1] Précisément, « Loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre ».

[2] Voir parmi les exemples récents ces tribunes de juristes dans Le Monde et dans Les Échos.

[3] Formulation d’une lettre de Pierre Pringuet, président de l’Afep, à Emmanuel Macron, publiée par Contexte.

[4] Ce dernier siège de droit en tant qu’ancien Président de la République, ce qui porte le nombre de membres du Conseil constitutionnel à dix. Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ont tous deux renoncé à leur siège.

[5] Entre 20 000 et 100 000, selon l’enquête citée de Mediapart.

[6] Guy Carcassonne est décédé le 27 mai 2013.

[7] Ce que je ne pouvais pas dire, Robert Laffont, 2016.

[8] Le contraste est frappant avec la procédure qui gouverne l’examen des Questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), introduite en 2008, qui est beaucoup plus transparente et contradictoire.

[9] Nommés pour neuf ans, les membres du Conseil sont désignés de la manière suivante : trois, dont le président, par l’Élysée, trois par le président de l’Assemblée nationale, et trois par celui du Sénat.

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8 février 2017 3 08 /02 /février /2017 07:43

Communiqué de presse


 

La section LDH de St-Pons-de-Thomières/Hauts-Cantons se félicite de la relaxe obtenue mardi 7 février 2017 par Saadia et Husein .

Avec un parquet ne soutenant plus la plainte,la cour d'appel du TGI de Montpellier a donc fort sagement pris hier la décision d'abandonner les poursuites dont ont fait l'objet deux militants du mouvement Boycott désinvestissement sanctions de l'Hérault.

L'absurdité de la plainte relayée par la LDH,le BNVCA,le MRAP,la LICRA ,France Israël,et avocats sans frontière prend fin ,mettant ainsi un terme à l'acharnement judiciaire de plusieurs années de ces parties civiles.

Notre section souhaite aux deux personnes innocentées par la justice un prompt retour à la vie normale,et enjoint notre instance nationale à leur présenter des excuses.

Fait à St-Pons-de-Thomières le mercredi 8 février 2017

COMMUNIQUÉ

 

SAADIA ET HUSEIN RELAXÉS EN APPEL ! 

Mardi 7 février 2017, la cour d’Appel de Montpellier a délibéré sur l’affaire Saadia et Husein et a prononcé la relaxe de nos deux camarades injustement condamnés par le jugement du TGI du 6 avril 2016.

Saadia et Husein avaient partagé le 6 août 2014  sur FB une image qui était accompagnée d’un texte non visible. Ils ont partagé sans le lire et donc involontairement un texte (caché) odieux, complotiste, négationniste et antisémite sur leur page FB.

 

La LDH34, constat d’huissier en poche, a informé un membre du comité de la teneur de ce texte. Prévenus Saadia et Husein ont immédiatement détruit tous les éléments de ce partage. Mais sans même les avoir rencontrés ni entendus, la LDH a porté plainte contre eux pour incitation à la haine raciale ou à la violence en raison de l’ethnie, la nation, la race ou la religion(…), négation de crimes contre l’humanité ( …). le MRAP s’est rapidement porté partie civile aux côtés de la LDH, suivi par la LICRA, Avocats sans frontière, le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme et France Israël.

 

Cette relaxe vient mettre fin aux accusations monstrueuses qui pesaient à l’encontre de nos camarades et du comité BDS France 34 dont ils sont les porte paroles.

Nous remercions toutes celles et ceux, ainsi que les partis, syndicats et associations , qui nous ont soutenus dans cette attaque qui a duré  plus de deux ans et un grand bravo aux militantes et militants du comité BDSFrance qui ont maintenu le cap de leurs activités dans un contexte de criminalisation du BDS au plus haut niveau.

 

Comité BDS France 34

7 février 2017

Autre :

La Via Campesina condamne le meurtre de Suleiman Hammad

Déclaration de solidarité de la Via Campesina

(Harare, le 10 février 2017) La Via Campesina condamne avec la plus grande fermeté l'assassinat brutal et intentionnel de notre camarade Suleiman Hammad, un paysan palestinien de 85 ans qui a été tué le 8 février 2017 après avoir été percuté par un véhicule d'un colon israélien alors qu'il se rendait sur ses terres pour y travailler près du village d'Al-Khader, au sud de Bethléem.

Nous présentons toutes nos condoléances et faisons part de notre solidarité envers sa famille et envers notre organisation sœur en Palestine, l'Union des Comités de Travail Agricole (UAWC).

Nous exhortons tous les individus, les mouvements sociaux, et les gouvernements à faire pression sur les institutions internationales afin que cesse la violation systématique du Droit à la Vie des paysans palestiniens et afin de mettre un terme à l'Occupation Israélienne de la Palestine.

Ce que vous pouvez faire?

- Écrivez une déclaration contre la violation constante du droit à la vie des agriculteurs palestiniens.

- Rompez le silence de la communauté internationale et agissez immédiatement pour protéger les agriculteurs palestiniens. Faites pression pour mettre fin à l'occupation israélienne.

- Organisez des manifestations devant les ambassades d'Israël pour mettre fin à la violation israélienne des droits des agriculteurs.

- D'autres idées? Tenez-nous au courant!

 
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4 janvier 2017 3 04 /01 /janvier /2017 09:06

Près de dix bénévoles ont été ou seront poursuivis devant les tribunaux pour avoir secouru, protégé ou aidé des réfugiés y compris des mineurs, venant de la frontière italienne.

APPEL A SOUTIEN CEDRIC 4 JANVIER 13H30 TGI NICE

Ces bénévoles se sont pourtant substitués au gouvernement et au Département des Alpes-Maritimes, aveugles ou défaillants face à leur devoir de solidarité et à leurs responsabilités vis à vis de réfugiés qui ont des droits et ont de surcroît affronté de dur,es épreuves avant d’arriver à la frontière italienne.

L’Unicef, dans un communiqué du 13 décembre 2016, vient de dénoncer vigoureusement cette situation et rappelle les pouvoirs publics au respect de la loi et des conventions internationales.

Le préfet, qui se contente de refouler les réfugiés, parfois au mépris de nos lois, s’en prend aux bénévoles qu’il interpelle, garde à vue, voire traduit en justice; bénévoles qui ne font, devant l’inaction coupable des pouvoirs publics, qu’obéir à la loi, sauf à refuser de porter assistance à personne en danger.

-La note"savoir discerner" ,de l'administration du blog ,est :


une incitation à  juger par soi meme en la déconstruisant ,de l’opinion des adhérents et autres sympathisants du racisme et de la xénophobie populaire " ( c'est 50% de la vallée de la Roya qui vote FN) ,institutionnelle et politique en lisant  Le mythe de la dédiabolisation du FN ,en mettant à mal avec l'aide du Dictionnaire pratique du droit humanitaire , Les principes à l'épreuve :ceux obsolètes d'une institution judiciaire qui apporte sa honteuse contribution à la répression dégueulassed'état ,en regardant   à l'adresse suivante :https://blogs.mediapart.fr/539070/blog/030117/assister-des-migrants-en-danger-de-mort-est-il-condamnable ,un compte-rendu  militant dessiné par Ben et Mo,de l'audience de Nice du 23 novembre, réalisé depuis le parvis du tribunal où ces deux là  de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers de la Cimade-Marseille  étaient refoulés.

 
en appuyant le « Comité de soutien aux citoyens solidaires des Alpes-Maritimes »  *,et en réfléchissant aussi à
 
 

Qu’est-ce que l’Europe ? Qu’est-ce que l’UE ? Quelle union des peuples d’Europe ?

par Raoul Marc Jennar

Sur ces trois questions, à la demande du site "la sociale" (http://la-sociale.viabloga.com), j'ai rédigé un texte destiné à susciter un débat sur la question de l'Europe. Ce texte reflète l’état présent d’une réflexion personnelle qui a connu un grand tournant en mai 2015 lorsque, dans un article marquant le dixième anniversaire du « non » de gauche au TCE, j’ai exprimé ma conviction que l’ n’est pas réformable.

 

on analyse des grands mouvements qui sont à l’oeuvre sur la planète depuis les années 80 m’a conduit à insérer cette réflexion sur l’UE dans le cadre plus global d’une offensive généralisée contre l’Etat dont le seul bénéficiaire est le secteur privé. « Réduire le périmètre de l’Etat » est devenu l’objectif de tous les libéraux, ceux de droite, bien entendu, et ceux qui se cachent derrière un vocabulaire de gauche. Pour réaliser cet objectif, l’UE est, pour ce qui concerne les peuples d’Europe, l’instrument privilégié.

***

L’Europe, c’est d’abord et avant tout un ensemble de peuples qui vivent depuis des siècles sur de vastes étendues à l’ouest de la Russie, de la Mer Noire et de la Mer Egée jusqu’aux rives de l’Atlantique. Née de l’empire romain, sa matrice commune plus vaste qu’elle-même, l’Europe est un héritage commun qui a généré des valeurs diversement partagées et respectées à travers un ensemble de nations, fières de leur passé, de leurs traditions, de leur culture, de leur langue, de leurs différences. Ces valeurs ont rayonné au point d’imprégner profondément d’autres peuples hors du périmètre européen. Constituées en Etats qui se sont affrontés pour des ambitions territoriales ou des rivalités religieuses, ces nations ont survécu à travers les siècles aux pires vicissitudes et même aux terribles déflagrations du XXe siècle.

Elles sont aujourd’hui menacées comme jamais elles ne l’ont été. Non par la guerre, mais par une monstruosité technocratique au service d’une idéologie libre-échangiste qui a nom « Union européenne ». L’UE n’est pas l’Europe. C’est même la négation de ce que le meilleur de l’Europe a pu proposer au monde.

L’UE n’est pas la paix, contrairement à ce que certains veulent faire croire. La paix, ce fut l’œuvre de deux nations, l’Allemagne et la France décidées à tourner la page d’un siècle de conflits. Ce ne fut pas le résultat d’une UE incapable de faire la paix en Yougoslavie où même lors d’un minime conflit entre l’Espagne et le Maroc.

L’UE n’est pas la démocratie, c’est même tout le contraire. La « méthode Monnet » est un processus de contournement des Etats, où s’applique un certain degré de contrôle démocratique, par transfert d’attributions de ces Etats vers des institutions supranationales qui échappent à ce contrôle. Le Conseil des Ministres de l’UE – l’institution qui est en charge de la décision – n’est soumis à aucun contrôle démocratique et n’est comptable de ses choix devant aucune institution représentative des peuples affectés par ces choix.

L’UE n’est pas la justice sociale. Au nom de ce qui est présenté dans la littérature européenne comme « les quatre libertés fondamentales de l’UE » (liberté de circulation des personnes, des capitaux, des biens et des services), au nom du primat de la concurrence érigée en valeur suprême, l’objectif de l’UE est de « réduire le périmètre de l’Etat », c’est-à-dire confier au secteur privé l’essentiel des activités humaines.

La Cour de Justice de l’UE, s’appuyant sur une interprétation extensive des traités, a construit un ordre juridique imposé aux Etats et à leurs ressortissants qui comporte des choix de société sur lesquels jamais personne ne s’est prononcé et qui bafoue les droits humains fondamentaux tels qu’ils sont énumérés dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme, en particulier ces droits déclinés aux articles 22 à 27 : droit à la sécurité et à la protection sociales, au travail, à un niveau de vie suffisant, au logement, à la santé, à l’éducation, à la vie culturelle…

Le libre-échange érigé en dogme est devenu l’instrument non pas de la prospérité des peuples, mais de leur asservissement. Ceux-ci sont livrés à la concurrence débridée à laquelle se livrent les firmes à la recherche du moins disant social, fiscal et écologique, dressant les salariés d’Europe les uns contre les autres et faisant renaître, de ce fait, les formes les plus dangereuses de nationalisme.

La pauvreté, la précarité et le chômage ont atteint des sommets inconnus depuis un siècle. Les politiques de l’UE ont ressuscité une catégorie que les luttes sociales avaient fait disparaître : le travailleur pauvre.  Elles ont amplifié un phénomène autrefois marginal : le travailleur détaché.

L’UE a remplacé l’objectif d’égalité par celui de la compétitivité, mettant, au nom de leur prétendue unité, les peuples européens en concurrence les uns contre les autres.

L’UE ne porte en elle aucune des valeurs que l’Europe véhicule depuis le Siècle des Lumières. Elle est au service de la globalisation, c’est-à-dire de la volonté de soumettre la planète aux exigences du monde des affaires et de la finance. Elle est à l’avant garde de ces traités internationaux qui démantèlent la puissance publique des Etats au profit des firmes transnationales et de la finance mondiale.

L’UE n’existe pas sur la scène internationale. Elle étale son impuissance sur tous les dossiers, agissant exclusivement en supplétive des USA. En adhérant à l’OTAN, elle a complété son aliénation générale aux Etats-Unis d’Amérique.

Le rêve d’une Europe européenne a été tué dans l’oeuf. Et celui d’une Europe fédérale relève du mythe.

Le fédéralisme européen est une fausse bonne idée. Parce qu’elle repose sur une illusion et un déni. L’illusion, c’est de croire qu’on peut soumettre à des institutions communes des peuples différents qui se pensent chacun comme nation. Le fédéralisme est un mode d’organisation institutionnelle qui réunit avec succès seulement les membres d’un même peuple. Le peuple américain se pense américain avant d’appartenir à la Californie ou à la Floride. Le peuple allemand se pense allemand avant d’appartenir à la Bavière ou à la Saxe. Il en va de même du peuple autrichien qui lui aussi s’est doté d’un système fédéral. Et le jeune fédéralisme belge n’a de l’avenir que si les Flamands se sentent Belges avant d’être Flamands. Il n’y a pas de peuple européen. Il n’y a pas de nation européenne.

Unir les peuples d’Europe dans un cadre fédéral est une illusion qui n’a pu prendre corps qu’à la faveur d’un déni : celui de la nation, assimilée au nationalisme. Evoquer le peuple rassemblé autour de ce qui fait sa communauté de destin est systématiquement stigmatisé. Ce déni, véritable méthodologie de l’intégration européenne, explique, à bien des égards, les réactions souverainistes.  Car la nation est l’unique siège d’une remise en question par l’UE (« Il n’y a pas de vote démocratique contre les traités européens » a déclaré le président de la Commission européenne). La réaction souverainiste véhicule à la fois un sursaut démocratique contre une oligarchie européenne qui entend imposer ses choix de société et un sursaut identitaire qui rejette une uniformité négatrice des spécificités historiques, culturelles et linguistiques de chaque peuple et son mode de vie. L’UE, c’est : même bouffe, mêmes fringues, même sabir, mêmes paysages urbains.

Est-il possible, comme beaucoup le pensent, de réformer l’UE ? Lorsque les peuples de deux Etats fondateurs – la France et les Pays-Bas – ont rejeté le traité constitutionnel en 2005, toutes les initiatives européennes qui ont suivi sont allées dans le sens rejeté par ces deux peuples c’est-à-dire dans le déni de la souveraineté populaire. D’abord le traité de Lisbonne imposant ce qui avait été refusé. Ensuite, en prenant prétexte de la crise financière, on a observé de nouvelles avancées du pouvoir totalitaire d’institutions échappant à tout réel contrôle démocratique : la Commission européenne, la Banque centrale européenne, l’Euro-groupe et la Cour de Justice de l’UE. Les traités ratifiés en 2012 (MES et TSCG) ont consacré de nouveaux et insupportables abandons de souveraineté au profit de ces institutions. Ces traités furent soutenus avec la même force par la droite et par la social-démocratie européennes, toutes deux résolument au service de la dictature des marchés. On ne réformait pas l’UE, on accentuait la négation de la souveraineté des peuples. La primauté de la bureaucratie sur la démocratie est devenue un principe central auquel il est manifeste que les institutions de l’UE ne renonceront jamais. L’UE n’est pas réformable.

Faut-il pour autant prôner le retour à une mosaïque européenne d’Etats sans liens entre eux ? Assurément pas. Ce serait accomplir autrement ce que l’UE mène à bien de manière organisée : la soumission à l’impérialisme des firmes transnationales. Dans le monde multipolaire qui émerge progressivement, protéger et promouvoir un certain nombre de valeurs et rendre possible leur application nécessite aujourd’hui des moyens que seule peut procurer une taille géographique et démographique suffisantes, hors de laquelle aucun des Etats européens pris isolément ne pourra éviter la servitude économique, financière et culturelle.

Aucun Etat européen, même pas l’Allemagne, n’est en capacité d’imposer, seul, des règles à la finance mondiale et aux firmes transnationales. Une union des peuples d’Europe se donnant, à l’inverse de l’Union européenne, la mission de veiller au bien-être des peuples serait, elle, en capacité de le faire.

Aucun Etat européen, même pas la France, n’offre le cadre pertinent pour s’opposer, à lui seul, au démantèlement des politiques sociales voulu par un patronat puissamment organisé non seulement au niveau européen, mais surtout au niveau atlantique. Il en va de même pour imposer à ce patronat les indispensables mesures qu’impose le réchauffement climatique et la destruction de la biodiversité.

Refuser d’unir les peuples d’Europe qui le veulent, c’est décider la servitude, aux multinationales d’abord, aux grandes puissances de la planète ensuite. Il nous faut chasser de nos esprits la fausse espérance du réflexe Maginot.

Pour ces raisons, il faut élaborer et faire avancer le projet d’une Europe européenne fondée sur des peuples souverains forts de leurs valeurs propres et d’une aspiration commune à un même modèle de société. Une Europe européenne maîtresse de ses choix et solidaire des peuples du monde. Ce qui implique que le respect de la souveraineté populaire devienne le principe cardinal d’une telle union populaire. Ce qui suppose qu’on ne peut unir que les peuples qui le demandent au terme d’une consultation directe.

Comment organiser une telle union pour qu’elle ne soit plus jamais la confiscation de la souveraineté populaire ? Le chemin nous est tracé par ce qui fait le succès des Européens dans le monde : c’est-à-dire ce qui résulte de la coopération intergouvernementale et non du supranationalisme européen : Airbus, Ariane,….

Nous n’avons pas besoin de la Commission européenne, ce monstre administratif avec ses dizaines de milliers de fonctionnaires vendus à l’idéologie néolibérale et aux lobbies du monde des affaires et de la finance. Nous n’avons pas besoin d’un parlement européen avec ses centaines de députés grassement rémunérés qui sont surtout en capacité d’imposer à une nation ce qu’elle refuse. Nous n’avons pas besoin d’institutions européennes qui violent les principes fondamentaux de la démocratie : séparation des pouvoirs, indépendance de la Justice, contrôle du pouvoir exécutif par des élus du peuple. Une union entre des peuples d’Europe qui la souhaitent, basée sur la souveraineté absolue de chaque peuple, n’a besoin que d’un organe transparent de coordination intergouvernementale.

L’UE, c’est la nouvelle Bastille à prendre et à démanteler. Comment y parvenir ? D’abord, en imposant la question dans le débat électoral qui va occuper 2017 et en exigeant la plus grande clarté de la part des candidats, à l’élection présidentielle comme aux législatives. Les candidats doivent mériter la confiance qu’ils sollicitent. Il faut les interpeller, les harceler si besoin est. Il faut les forcer à indiquer quelle Europe ils veulent et comment ils comptent y parvenir. Ne prenons plus pour argent comptant leurs promesses qui n’engagent que les naïfs qui les gobent. En 1997, Jospin avait promis de renégocier le traité d’Amsterdam. Il ne l’a pas fait. En 2008, le PS et l’UMP avec la complicité des Verts ont rendu possible le traité de Lisbonne dont le texte avait été rejeté par le peuple français en 2005. En 2012, Hollande avait promis de renégocier le pacte budgétaire (TSCG). Il ne l’a pas fait.  N’oublions pas leur mépris du peuple.

Ensuite, en faisant avancer le débat d’idées sur la nécessité du démantèlement de l’UE comme moyen d’unir les peuples qui le veulent sur des bases vraiment démocratiques, sociales et écologiques et sur le primat de la souveraineté populaire.

Enfin, en lançant un mouvement mobilisateur pour promouvoir cet objectif ; un mouvement qui fera descendre dans la rue celles et ceux qui veulent décoloniser les peuples soumis à l’UE-OTAN.

Raoul Marc Jennar

 

 Le « Comité de soutien aux citoyens solidaires des Alpes-Maritimes » a été créé en accord avec les associations Roya-Citoyenne et Habitat et Citoyenneté.

Vous le retrouvez sur le web http://citoyenssolidaires06.com ainsi que sur facebook: https://www.facebook.com/profile.php?id=100014925120462

Ce site a pour objet de recenser et documenter les cas d'interpellations et de poursuites judiciaires pour des actes de solidarité, nommés "délit de solidarité"et d'afficher le soutien d'organisations, de personnalités et de simples citoyens aux personnes concernées. Le comité a pour vocation de défendre les personnes inquiétées et de faire des propositions pour que la solidarité ne soit plus considérée comme un délit.

Nous pensons que unis nous serons plus fort et vous proposons de rejoindre ce comité en tant que personne ou au nom de l'organisation que vous représentez. Pour vous inscrire https://citoyenssolidaires06.com/soutien-de-citoyens/

Le Comité de Soutien aux Citoyens Solidaires

 
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2 janvier 2017 1 02 /01 /janvier /2017 17:16
Parmi les Rêveries d'un chercheur solidaire  ,(Jacques Testart ), celle  de la "paillasse citoyenne" qui  pourrait peut-être être généralisée ....Shiv Visvanathan est un intellectuel public et un anthropologue indien bien connu pour ses contributions au domaine des STS (étude des sciences et technologies), ainsi que pour le concept de justice cognitive qu’il a inventé. Il est actuellement professeur à l’O P Jindal Global University (Delhi) et directeur du Centre for the Study of Knowledge Systems (Centre pour l’étude des systèmes de savoir). Il a été professeur à l’Institut Dhirubhai Ambani des technologies de l’information et de la communication (DA-IICT) à Gandhinagar et a occupé le poste de Senior Fellow (Chercheur senior)  au Center for the Study of Developing Societies (Centre pour l’étude des sociétés en développement) à Delhi. Il a également enseigné à la Delhi School of Economics. Il a occupé des postes de professeur invité au Smith College, Stanford, au Goldsmiths College, à l’Arizona State University, à l’Université de Maastricht et en Afrique du Sud. Il est l’auteur de Organizing for Science (OUP, Delhi, 1985), A Carnival for Science (OUP, Delhi, 1997) and Theatres of Democracy (Harper Collins, 2016). Il a  co-dirigé Foulplay : Chronicles of Corruption (Banyan Books, Delhi, 1999). Il a été consultant auprès du National Council of Churches and Business India. À titre d’intellectuel public, il est chroniqueur régulier dans des journaux comme The Hindu, The Deccan Chronicle, DailyO, Scroll.in et The Asian Age. Il contribue également à des magazines populaires comme Open, India Today et Gouvernance Now. Ses écrits grand public traitent de sujets aussi vastes que la science, le cricket, l’anthropologie, le développement, l’histoire intellectuelle et la randonnée.

Le texte ci-dessous est une traduction réalisée par Florence Piron de l’essai « The Search for Cognitive Justice » (2009), proposé par Shiv Visvanathan au symposium « Knowledge in Question on Interrogating Knowledge and Questioning Science », accessible en ligne à http://www.india-seminar.com/2009/597/597_shiv_visvanathan.htm. Nous remercions Shiv de nous avoir permis de traduire et de publier son texte.

Il y a une dizaine d’années, alors que j’en étais membre, le Centre for the Study of Developing Societies était une institution très excentrique. De nombreuses règles tacites sous-tendaient nos discussions, notamment un tabou sur certains mots qu’on ne pouvait plus utiliser. Dans ce glossaire des mots inutilisables figuraient « crise », « progrès », « construction de la nation » et « révolution ». Tout le monde les considérait comme des termes « fatigués » et apportant peu aux discussions. Par conséquent, tous ceux qui les utilisaient devaient malheureusement quitter la salle, provoquant beaucoup de rires mais aussi de réflexions sur ces mots, les boîtes noires de notre propre pensée.

Ce n’était pas qu’on s’opposait aux clichés. Après tout, un cliché est seulement une forme d’impression. Mais nous réalisions que certains mots étaient fatigués et surmenés, des mots stakhanovistes qui faisaient des heures supplémentaires dans les goulags de nos esprits. Ce qu’il nous fallait était un vocabulaire de termes clés qui évoqueraient une nouvelle palette de sensibilités et de liens entre le langage et le pouvoir. Mais inventer de nouveaux mots n’est pas facile. Cela me rappelle une histoire que Jung racontait à propos de sa rencontre avec l’écrivain irlandais James Joyce et son fils. Joyce, enthousiasmé par la prolixité verbale de son fils, la vantait à Jung. Après réflexion, Jung lui répondit que si, pour Joyce, les mots s’alignaient avec génie, dans le cas de son fils, ils étaient des symptômes de schizophrénie. La relation entre soi et les mots et entre le monde et les mots est toujours problématique.

La tâche est rendue plus complexe par la dette que nous entretenons envers certains mots. Prenez le mot « droits ». C’est un mot qui tellement vivant. Un « droit » peut être une revendication du droit d’exister au sein d’une écologie de droits; il peut être une affirmation de citoyenneté ou un mot émancipateur ouvrant de nouveaux champs d’action aux marginalisés et aux minorités. Ce mot est doté d’une poésie puissante, même lorsque « les droits » sont décrits dans une prose juridique. Un droit à la vie est un toast à la vie, jusqu’à ce que le mot « vie » change le texte et le contexte. Aujourd’hui, lorsque nous parlons de la vie ou du vivant, nous semblons faire référence à une technique à la mode dans un laboratoire de génétique. Le mot perd sa vie en affirmant son alchimie.

Malheureusement, le mot « droits » est critiqué de toutes parts. Beaucoup prétendent qu’il fait partie d’un cosmos judéo-chrétien étranger à d’autres cosmologies. D’autres suggèrent que c’est un mot monadique dont l’harmonie est perdue si on ne lui ajoute pas un complément. En tant que concept, « droits » évoque une citoyenneté incomplète si on ne lui impose pas un équilibre harmonieux avec les devoirs. Pour certains, « droits » est un mot-atlas contenant bien trop d’autres mondes : droit à la vie, à la culture, à la propriété, au travail, au bien-être, à la santé, à la participation, au développement, à la vie privée, à l’éducation, à l’information, le droit de ne pas être torturé, et ainsi de suite. La pléthore des mondes que ce terme constitue, garantit et protège amène à se demander si ce mot a réussi, au sens managérial, à étendre ses compétences de base. Il soulève de nombreuses questions. Les « droits » devraient-ils s’étendre aux collectifs ou se limiter aux individus? À l’image des constitutions indienne et irlandaises, le terme « droit » devrait-il être réservé aux revendications proprement judiciaires, les autres étant traitées comme des promesses d’avenir, des assurances pour le futur?

Le danger aujourd’hui est de remplacer le mot « droits », large et riche de significations variées, par des mots étroits, conformistes, suggérant un système panoptique de garanties individuelles plutôt qu’une ouverture vers des possibles. Le mot « sécurité » est un de ces mots paresseux. Il représenta longtemps une garantie de stabilité et de protection dans un espace territorial dirigé par un souverain. Vieux mot démodé, il a fait son travail de manière adéquate et tout aussi démodée. Mais aujourd’hui, la sécurité vise plus large : elle interpelle les domaines de l’énergie, de la santé, du logement et ainsi de suite. Cette volonté de « sécurisation » est une responsabilité de l’État qui s’intéresse moins à la question de l’accès qu’à sa garantie. Le mot « sécurisation » génère un champ sémantique différent de « droits ». Il perd notamment une certaine nuance joyeuse et évoque plutôt un champ de recherche lugubre. Toute l’idée de « droits » est transformée par l’économie, passant des mondes vécus au système, d’une réalité polysémique vécue à un domaine officiel organisé. Le terme « sécurité » est alors souvent confondu avec la durabilité. Lancée comme un « droit », la sécurisation réduit ironiquement les droits au fil du processus de recherche de protection, de sécurité et de souveraineté.

 

On souhaite souvent pouvoir revenir à l’idée ancienne des « Communs ». Un commun était une partie du village offrant aux agriculteurs un accès commun à des pâturages, à du bois de construction et de chauffe, ainsi qu’à des herbes médicinales. C’était plus qu’un espace collectif de ressources partagées. Ce lieu renforçait les savoir-faire traditionnels et improvisés indispensables dans toute société de subsistance. Un commun va au-delà de l’idée des droits individuels et de la propriété privée, et nous emmène vers l’idée d’accès collectif.

En Occident, le concept du commun a disparu avec le mouvement des enclosures, de la création d’enclos individuels ; en Inde, avec le déploiement du « développement ». La tragédie des communs en Inde ne réside pas dans leur érosion, mais dans leur destruction. Tant que la forêt était un cosmos et un commun, un domaine de connaissance, la nature restait intacte. Un travail commun d’improvisation créatrice évitait la muséification des savoirs.

La vieille idée du commun comme espace et comme métaphore est en train de renaître dans le cadre du cyberespace, mais la nature des droits de propriété intellectuelle peut rendre difficile la création d’un tel collectif. Un commun protégeait le monde de la survie; ce n’était pas une annexe de l’opulence. Nous sommes devant une question cruciale. L’imagination démocratique peut-elle créer des concepts à propos du savoir qui lui permettront à la fois d’être créatif et de soutenir la vie? L’idée des droits est-elle adéquate? Est-ce que l’un communs de la connaissance est réaliste?

Ce problème a été formulé de manière saisissante lors d’une conversation que j’ai eue il y a plus de 10 ans avec un groupe de militants représentant les peuples autochtones « libérés de l’obligation de notification » (denotified tribals) de l’Inde.

Ces militants sont venus me voir un jour avec une seule demande. Ils voulaient que je les aide à concevoir un séminaire, non pas d’une manière universitaire, mais plutôt comme une audience publique, un sunwai. Ils voulaient une rencontre entre des savoirs qui ne soient pas seulement des affirmations méthodologiques, mais qui présentent des modes de vie. Ils ont proposé une rencontre entre des guérisseurs, des ethno-botanistes autochtones, des patients autochtones, des policiers, des psychiatres, des médecins, des ethno-psychiatres, des bureaucrates et des responsables de politiques scientifiques. Pour eux, des mots comme « participation », « voix » ou « droit à l’information » étaient cruciaux, mais pas suffisants. Ces groupes autochtones voulaient sensibiliser les autres acteurs sociaux à leur situation, mais à partir d’une variété de points de vue. En tant que peuples autochtones « libérés de l’obligation de notification », ils portaient les stigmates de la criminalité. Même maintenant, les postes de police en hébergent quelques-uns, dont certains qui sont battus ou tués chaque fois que la classe moyenne réclame plus de loi et d’ordre. Compte tenu de leurs contacts fréquents avec la violence, ils se méfiaient de la police de manière paranoïaque. Ils m’ont également raconté qu’ils souffraient d’une grande variété de maladies, allant de l’alcoolisme à des problèmes gastro-intestinaux.

De manière plus spécifique, ces groupes étaient la proie particulière de l’anémie falciforme, aussi appelée drépanocytose, une maladie du sang qui affecte l’hémoglobine contenue dans les globules rouges, si bien que de nombreux membres du groupe mourraient avant l’âge de 35 ans. Mais ils ne voulaient pas simplement être soumis au regard clinique. Ils m’ont raconté qu’un chercheur de l’Université Harvard leur avait rendu visite, les avait interrogés et avait disparu avec les données, ce qui avait été une expérience profondément troublante pour eux. La recherche, pensaient-ils, devait aller au-delà de l’article scientifique professionnel. Ils voulaient un dialogue des savoirs entre les différents systèmes médicaux et juridiques. Dans ce dialogue, les médecins et les patients ne discuteraient pas seulement de symptômes et de médicaments, mais aussi d’épistémologies et de cosmologies. Ils voulaient davantage que de se faire entendre. Ils voulaient un déplacement de la prise de parole vers la théorie et insistaient pour ancrer leurs théories dans la science et dans la politique scientifique.

Il ne s’est pas passé grand-chose, sauf une nouveauté très constructive : l’introduction des généalogies dans leurs cartes d’identité pour créer des règles d’évitement par précaution et leur montrer comment réduire le risque de drépanocytose. Il ne s’agissait pas d’ostraciser ou de stigmatiser des personnes, mais de minimiser l’incidence de la maladie.

Ma conversation avec ces militants autochtones décrit bien le défi et les contours de notre problème. On peut mieux le comprendre en le situant dans le cadre du débat citoyen actuel sur le monde technologique, le transfert de technologie ou le modèle d’innovation. Le transfert de technologie est une théorie du développement qui considère la science comme voyageant du centre à la périphérie, de la métropole vers la province. La science est la principale source de connaissance et a ses origines dans la métropole. Contrairement à la science, les autres sources de connaissance sont considérées comme de l’ethno-science, de la superstition ou plus brutalement, du non-savoir. « Pré-scientifique » est un mot qui est souvent utilisé en parallèle avec « sauvage » ou « primitif ». L’invention, dans la mesure du possible, prend place au centre, tandis que le drame de l’innovation et de la diffusion se produit à la périphérie.

Ce jeu change ses règles à chaque étape. La dimension inventive de la science est dans une boîte noire. La technologie peut être adaptée localement dans des rituels impliquant des ressources locales, des compétences locales ou certaines formes de savoirs locaux. La diffusion est consommation. On consomme la science, mais jamais on ne l’interroge. La diffusion réalise l’équivalent de la démocratisation. Diffuser une technologie, c’est la démocratiser.

La logique de cette forme de démocratisation est en fait ouvertement et tacitement hégémonique. Considérons, pour commencer, la relation de la science à d’autres formes de savoir : ces dernières sont considérées comme hiérarchiquement inférieures. Même si un élément de valeur y est constaté, tel un fragment botanique, le remède est récupéré par la science sans aucune reconnaissance des épistémologies autochtones, locales, indigènes qui l’ont généré. Le produit est approprié, alors que le processus qui y a conduit est souvent ignoré. Les savoirs traditionnels font alors face à un ensemble limité d’options.

Parmi ces options, il y a tout d’abord, l’écocide, à savoir l’élimination ou la muséification de la nature et des gens, ainsi que de leur système de savoirs. Deuxièmement, les savoirs locaux peuvent être ghettoïsés et considérés comme non officiels ou illégaux selon une certaine forme d’apartheid intellectuel. La troisième option consiste à hiérarchiser les savoirs en associant tous les savoirs locaux à un niveau primaire, au statut de connaissances marginales pratiquées au sein de l’économie informelle. Le savoir expert, en revanche, est toujours considéré comme de la connaissance scientifique. Parfois, la hiérarchie devient un cercle temporaire et les savoirs locaux sont considérés comme une « ethno-science », un acte de « faire faire », ou ce que Lévi-Strauss appelait « bricolage ». Les possibilités pragmatiques de ces savoirs sont reconnues, mais les possibilités théoriques sont évacuées. Le bricoleur appartient toujours à un monde cognitif moindre.

Dans un tel monde, la science reste intouchable, alors que la technologie peut être influencée par le niveau local. Prenons un exemple. Le mouvement de la technologie intermédiaire, centré autour de E.F. Schumacher, attira beaucoup de gandhistes et de scientifiques comme Amulya Reddy qui, parmi ses nombreuses expériences, développa l’idée de la technologie du biogaz ou P.K. Sethi qui inventa le pied de Jaipur, une prothèse de pied ou de jambe en caoutchouc. Les mots-clés étaient « adaptation » et « participation » ; ils ont permis à tout un régime démocratique d’être imaginé, en particulier dans le livre de Robert Chambers Farmer First. Alors que le courant de la diffusion valorisait la science et la technologie et recherchait simplement un amplificateur, comme le mouvement social Kerala Shastra Sahitya Parishad (KSSP) qui apportait la science dans les villages, Chambers insistait pour que le local ait une voix et le droit de participer.

Sa vision incluait les notions de référendum et de rappel des technologies, ainsi que l’idée du droit à l’information. On ne cherchait pas un haut-parleur pour la science, mais une aide auditive pour la technologie. Il fallait que la science aille au-delà du regard clinique et pose un geste d’écoute. Le sens de la communauté et du savoir local est devenu crucial. Mais l’accent était toujours sur la prise de parole plutôt que sur la théorie, sur une démocratisation des processus d’innovation, mais pas encore de celui de la connaissance. L’axiomatique de la connaissance scientifique est restée complètement intacte.

La rhétorique des manuels scolaires ne reconnaissait elle aussi que les formes dominantes de la science. Ce n’est que lorsque la boîte noire de la science s’ouvrit à l’existence d’autres conceptions de la connaissance que la science s’ouvrit à la démocratie. Cette ouverture exigeait que soit possible une certaine excentricité ou dissidence au sein d’un paradigme. Elle exigeait la reconnaissance des savoirs autres que scientifiques et qu’ils soient vus non pas à travers les lunettes de la science ou de la mise à l’épreuve scientifique, mais comme des modes de vie qui avaient leur propre validité cognitive. Elle exigeait, pour ainsi dire, un espace d’indifférence cognitive à la science.

La démocratie en tant que théorie de la différence doit reconnaître non pas la validité universelle de la science, mais la disponibilité plurielle de savoirs et le fait qu’aucune forme de savoir ne peut être muséifiée par force et que la mémoire et l’innovation vont intrinsèquement ensemble. Il devient possible d’imaginer des sciences alternatives, des universalismes différents. Tant la critique alternative que la critique luddite de la technologie sont désormais considérées non pas comme des fondamentalismes, mais comme d’autres modes de construction des connaissances.

Nous devons reconnaître ce changement radical dans les rapports entre savoir et pouvoir. La prise de parole, la protestation, la résistance, la participation et les droits n’épuisent pas le cadre de la démocratie. Car que ce qu’il nous faut est une démocratie des savoirs.

J’ai proposé par hasard le concept de « justice cognitive » comme thématique pour un tel exercice. La justice cognitive reconnaît le droit des différentes formes de savoirs à coexister, mais ajoute que cette pluralité doit aller au-delà de la tolérance ou du libéralisme et prôner une reconnaissance active de la nécessité de la diversité. Elle exige la reconnaissance des savoirs non seulement comme méthodes, mais aussi comme modes de vie. La connaissance est considérée comme ancrée dans une écologie des savoirs où chaque savoir a sa place, sa prétention à une cosmologie, son sens comme forme de vie. En ce sens, un savoir ne peut être détaché de la culture comme forme de vie; il est relié à des moyens de subsistance, à un cycle de vie, à un mode de vie; il détermine les chances de vie.

Comme le dit Heidegger, la connaissance est une habitation, un mode de vie qu’on vit et pas seulement comme un système ou comme un ensemble formel de propriétés désincarnées. Chaque forme de citoyenneté revendique une culture de compétence, un ensemble de compétences. Le grand géologue et historien de l’art Ananda Coomaraswamy l’a déclaré avec brio en définissant un prolétaire non pas comme un homme aliéné de ses moyens de production, mais comme une personne coupée de sa culture et des formes de savoir qu’elle offre.

La justice cognitive n’est pas une manière paresseuse d’insister pour que chaque savoir survive tel qu’il est, là où il est. Cette notion est en fait plus ludique, au sens suggéré par l’historien néerlandais Johann Huizinga pour qui le jeu transcende l’opposition du sérieux et du non-sérieux. Le jeu cherche des rencontres, les possibilités d’un dialogue ou d’expériences de pensée, une conversation de cosmologies et d’épistémologies. Un exemple qui me vient à l’esprit est un type de dialogue entre les systèmes médicaux dans lequel les médecins échangent non seulement leurs théologies, mais aussi leurs thérapies. Comme le dit A. L. Basham, le dialogue entre les systèmes médicaux, chacun étant basé sur une cosmologie différente, n’a jamais été communautaire ou fondamentaliste. Il a reconnu l’incommensurabilité des systèmes, mais a autorisé la traduction.

La traduction, comme un de mes amis littéraires me l’a dit, est un processus qui exige qu’une vérité, pour être vérité, soit articulée en deux langues. Brecht ne serait pas Brecht à moins d’être disponible en malayalam. Traduire est souvent un geste de protection, comme lorsque les savants musulmans ont préservé les textes grecs anciens au bénéfice ultérieur de l’Occident. Sans cette archive, la civilisation occidentale aurait pu ne pas être la possibilité intellectuelle qu’elle est aujourd’hui.

Il faut reconnaître les dangers d’une fausse traduction des savoirs, par exemple un rétrécissement des possibilités de l’authenticité d’un mode de vie. Une culture, comme un métier artisanal, n’est pas qu’un ensemble de produits inscrits dans un catalogue d’objets. Ce que l’on perd dans l’approche par catalogue est la compréhension du processus de création des objets catalogués. Or c’est ce sens de l’être incarné dans des corps en action qui permet à un métier artisanal d’être évalué en termes non seulement de productivité, mais aussi d’une écologie de l’être.

Un pot d’argile est un sensorium, un condensé d’expériences sensorielles : la cuisson du pot fait advenir la couleur, l’odeur, le toucher et la qualité de l’argile. L’expression « savoir tacite » ne saisit pas tout ceci. Il lui manque le sens de la variété, du jugement et de la diversité inhérent à un métier artisanal. Dans son plaidoyer contre la propagation de la chimie de synthèse, Ananda Coomaraswamy a estimé que la teinture rouge biologique utilisée dans les villages de teinturiers était spécifique à chaque village, qu’elle exprimait le dialecte de rouge de chaque village, et que la chimie synthétique pourrait détruire cette diversité. Les nuances entre les coloris de rouge sont aussi précieuse que la diversité des traditions. Ici, le métier artisanal est un processus qui maintient vivante cette diversité en préservant les traditions du rouge.

La diversité est cruciale pour la justice cognitive. Dans un premier sens, cette notion est surtout proche de scientifiques comme Alfred Wallace et J.B.S. Haldane qui ont souligné que l’évolution ne visait pas la survie capitaliste du plus fort, mais la diversité. Francis Zimmerman, dans un excellent article sur Haldane, observe que le scientifique a été intrigué par les plumes de paon et les cornes sculptées des chèvres. Il a réalisé qu’il n’y avait aucune raison fonctionnelle pour expliquer une telle variété de beauté. La diversité est un mode d’être en soi et pour soi.

Puis, dans un sens plus culturel, on peut dire que la diversité est plus importante non seulement comme mode de survie, mais comme une axiomatique de différences qui rend la démocratie possible. Une diversité de savoirs non muséifiés et dialogiques devient un point d’ancrage pour une imagination démocratique inventive.

Si la diversité est une reconnaissance de la différence, la pluralité est un engagement à l’endroit des différences. Ziauddin Sardar, un chercheur sud-asiatique, fait valoir qu’en tant que citoyen britannique, il avait un droit d’accès au Système national de santé, mais qu’en tant que musulman, il exigeait aussi l’accès à sa propre conception de la guérison. L’un sans l’autre était incomplet du point de vue de ses droits. Le droit à une forme de savoir fait partie des droits. Mais il y a un troisième argument en faveur de la pluralité.

De nombreux systèmes experts ont tendance à être iatrogènes. Une maladie iatrogène est une maladie provoquée par les soignants, la forme même du diagnostic ou de la thérapie ajoutant à la complexité de la maladie. Une situation iatrogène exige donc que les patients comprennent les limites de tout système médical. Une pluralité de systèmes médicaux peut faire disparaitre la forme dominante d’une pathologie. La pluralité est la garantie que des solutions alternatives à un problème sont toujours disponibles au sein d’une culture.

La pluralité impliquée par la justice cognitive exige une diversité des conceptions de la temporalité. La mondialisation et la citoyenneté d’aujourd’hui sont construites sur le temps instantané du capital financier, sur la vitesse, sur le rythme de l’usine. Le temps tribal, le temps du corps, le temps de la fête ou les divers temps écologiques n’ont pas de place dans les calendriers officiels de la citoyenneté. La modernité sous-jacente est le temps du progrès qui entraîne la quotidienneté de l’obsolescence et le triage des groupes vaincus et marginaux.

Le progrès et sa sœur, la logique du développement, font violence en imposant un conception limitative du temps qui rend les sociétés datées, anachroniques, muséifiées, primitives et, par conséquent, susceptibles de développement. Ce que la justice cognitive peut exiger, c’est que la multiplicité des temporalités soit reconnue comme légitime. Cette question ne concerne pas seulement la société civile. Il faut l’imposer comme préambule de la Constitution ou comme élément de ses principes directeurs. Une fois que qu’un commun des temporalités a pu être créé, on peut aborder la question de la propriété.

La loi indienne différencie entre le stock et le flux. Chhatrapati Singh, un philosophe du droit, a fait remarquer que dans la jurisprudence indienne, la terre en tant que stock pourrait être considérée comme une propriété, alors que l’eau est un flux. Une personne peut utiliser l’eau qui coule sur sa terre, mais ne peut pas la posséder. J’aimerais suggérer que la connaissance et l’information sont des flux. Les traiter comme des stocks viole le sens local de la justice. De plus, même si la connaissance devenait un stock, le patrimoine, la mémoire et l’héritage restent des outils de protection. Ils ne peuvent devenir que des parties d’un patrimoine intellectuel. Enfin, le brevetage de la vie viole la sacralité de la vie, son caractère connecté. Breveter la vie est anti-écologique.

Pour les raisons ci-dessus, l’idée même de propriété intellectuelle viole le concept de justice cognitive. Il nous faut au contraire rejeter l’institution des droits de propriété intellectuelle. Je ne suggère pas simplement un état d’exception, par exemple lors d’une épidémie du sida, pour que les médicaments soient considérés en dehors du cadre de la propriété intellectuelle. Ce que je préconise est une sécession complète, un rejet du régime des droits de propriété intellectuelle. Si l’Inde, la Chine, le Brésil et l’Afrique du Sud rejettent ce régime, les chances qu’une telle institution réactionnaire survive sont minimes.

Encore une fois, je reviens à la définition que donne Ananda Coomaraswamy de l’artiste. Selon lui, un artiste n’est pas un type particulier d’homme doté d’une vocation; il dit plutôt que tout homme est un artiste à la recherche de sa vocation. L’argument de Coomaraswamy repose sur le rejet de la distinction entre l’art et l’artisanat. De la même façon, nous devons remettre en question l’idée que le scientifique est un type particulier de citoyen : l’expert. Les théories économiques modernes semblent suggérer que ce sont les scientifiques dans les laboratoires qui innovent. Ce que nous aimerions suggérer, presque d’une manière maoïste ou gandhienne, c’est que chaque citoyen est un inventeur. Pour survivre, on improvise tout le temps. Traiter l’invention comme une sorte d’improvisation supérieure n’est pas juste. En fait, il serait même injuste de considérer comme remarquables les petites modifications apportées par les scientifiques au commun des inventions faites par les artisans, les tribus et les paysans. L’idée de la justice cognitive exige une réouverture de nos conceptions du droit, de la propriété intellectuelle, de la démocratie et de l’inventivité.

Derrière la logique de l’innovation et des brevets se trouve la logique de l’exclusion et de l’obsolescence. Elle tronque une communauté et émascule ceux qui ne possèdent pas ou ne peuvent pas utiliser une forme particulière de savoir. Ainsi, au lieu de démocratiser la « résolution de problèmes » comme une responsabilité partagée, aussi bien dans la quotidienneté qu’en temps de crise, cette logique la considère comme le domaine réservé des experts professionnels certifiés. Ces oppositions binaires dévaluent les formes de savoir telles que le folklore et les recettes de maman et ignorent la puissance créatrice de la « débrouillardise », pourtant plus utile pour préserver la vie que des plans.

Un droit à l’information sans un accès à la diversité des savoirs disponibles ne peut que limiter l’imagination démocratique. Les tendances actuelles de la science, en particulier des notions telles que la résilience, révèlent pourtant l’importance de la diversité, même dans les échelles d’observation. Faire changer d’échelle un problème aujourd’hui crée des situations de pan-archie plutôt que de hiérarchie, car la solution à un problème peut impliquer une variété de réponses. La diversité propre à la résolution de problèmes se démocratise elle-même.

L’idée de justice cognitive nous sensibilise donc non seulement à la pluralité des formes de savoir, mais aussi aux diverses communautés qui cherchent à résoudre les problèmes. Ce qu’elle propose est une imagination démocratique dans une vision du monde sans marché, sans compétition, où la conversation, la réciprocité et la traduction créent des savoirs.  Ces savoirs ne sont pas des savoirs experts, mais des amalgames de souvenirs, d’héritages, de patrimoines, une heuristique plurielle de résolution de problèmes dans laquelle les citoyens prennent à la fois le pouvoir et le savoir entre leurs mains.

Ces formes de savoir, en particulier les idées de complexité, représentent de nouvelles formes de partage du pouvoir et de résolution des problèmes. Elles dépassent la prise de parole et la résistance et développent le pouvoir d’agir des citoyens parce qu’elles transcendent les cartographies standard et hégémoniques du pouvoir et de l’innovation. En intégrant la dynamique des savoirs dans la démocratie, la justice cognitive fait valoir les savoirs de l’hospitalité, de la vie en-commun, de la non-violence et de l’humilité et introduit une conception multiple de la temporalité dans laquelle les citoyens, en tant que fiduciaires et inventeurs, visualisent et créent une nouvelle idée réflexive de démocratie autour de communautés de pratique bien réelles.

Le dialogue des sciences doit désormais se distinguer des vieilles dichotomies tradition – modernité ou développement – sous-développement. Nous devons aussi en finir avec les catégories que l’Occident nous propose : démocratie, propriété privée et droits. Nous devons inventer des mots en anglais pour dire ce que l’Occident ne peut pas dire. La quête de la justice cognitive est un pas dans cette direction, une tentative de se rendre compte que même si l’Occident est une partie de nous, les mots que nous lui empruntons peuvent avoir différentes trajectoires. Nous avons besoin d’« expériences de pensée » qui perturbent les deux mondes et permettent à la fois au soi et à l’autre de s’affronter dans un kaléidoscope de nouvelles expériences.

Pour citer ce texte :

Visvanathan, Shiv. 2016. « La quête de justice cognitive » (Traduction de The Search for Cognitive Justice, 2009). In Justice cognitive, libre accès et savoirs locaux, au service de la science ouverte juste, sous la direction de Florence Piron, Samuel Regulus et Marie Sophie Dibounje Madiba. Québec, Éditions science et bien commun. En ligne à https://scienceetbiencommun.pressbooks.pub/justicecognitive1.

-Pour penser autrement la circulation technique des savoirs.
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29 décembre 2016 4 29 /12 /décembre /2016 11:44
Omar Raddad, Alfred Dreyfus, José Bové: Comme Jacqueline Sauvage, ils ont été graciés
 

Jacque­line Sauvage est enfin libre, graciée par François Hollande. Comme elle, ils sont plusieurs à avoir retrouvé la liberté avant l'heure suite au consen­te­ment d'un président de la Répu­blique.

Initia­le­ment condam­née en décembre 2014 à dix années de prison pour avoir abattu son mari violent, Jacque­line Sauvage est aujourd'hui une femme libre. La mère de famille a béné­fi­cié d'une grâce totale du président de la Répu­blique François Hollande. « J'ai décidé d'accor­der à Jacque­line Sauvage une remise gracieuse du reliquat de sa peine. Cette grâce met fin immé­dia­te­ment à sa déten­tion », a indiqué le chef de l'Etat sur Twit­ter. Avant lui, plusieurs de ses prédé­ces­seurs ont eux aussi eu recours à ce pouvoir prési­den­tiel.

Ce fut par exemple le cas dans l'une des plus célèbres affaires judi­ciaires de l'histoire de France: l'affaire Drey­fus. Dans les années 1890, le capi­taine de l'armée française Alfred Drey­fus est accusé d'avoir livré des docu­ments secrets à l'Empire alle­mand. Innocent des faits qui lui sont repro­chés, il se retrouve malgré tout condamné pour « intel­li­gence avec une puis­sance étran­gère » à la dépor­ta­tion au bagne de Guyane pour le restant de ses jours, ainsi qu'à la desti­tu­tion de son grade et à la dégra­da­tion mili­taire. Soutenu par Emile Zola, le capi­taine Alfred Drey­fus doit attendre cinq ans avant de se voir partiel­le­ment gracié par le président Emile Loubet, le 19 septembre 1899. Toujours coupable aux yeux de la loi, il sera fina­le­ment réha­bi­lité en 1906.

Certaines des affaires liées aux grâces prési­den­tielles sont allées jusqu'à inspi­rer les cinéastes français. C'est le cas de l'affaire Omar Raddad. En février 1994, le jardi­nier maro­cain Omar Raddad est condamné à dix-huit ans de prison pour homi­cide volon­taire. La justice consi­dère qu'il est l'auteur du meurtre de son employeur, Ghis­laine Marshall, retrou­vée assas­si­née trois ans plus tôt dans sa villa de Mougins (Alpes-Mari­times). À côté du corps de la riche proprié­taire, les enquê­teurs ont retrouvé une phrase tracée sur un mur avec le sang de la victime: « Omar m'a tuer ». Omar Raddad passera alors sept années derrière les barreaux avant que le président Jacques Chirac n'accepte de lui accor­der une grâce partielle. Omar Raddad est aujourd'hui un homme libre.

Dans une affaire moins grave mais tout aussi média­ti­sée, le mili­tant de la Confé­dé­ra­tion paysanne José Bové est condamné au début des années 2000 pour avoir saccagé un restau­rant McDo­nald's de la ville de Millau. En prison durant un mois et dix jours, le mili­tant écolo­giste béné­fi­cie fina­le­ment d'une double grâce prési­den­tielle. La première au même titre que 3000 autres déte­nus dans le cadre de la grâce collec­tive tradi­tion­nel­le­ment accor­dée par le chef de l'Etat à l'occa­sion du 14 juillet. La seconde à titre indi­vi­duel, de la main du président Jacques Chirac qui réduit la peine de deux mois supplé­men­taires. Sans l'inter­ven­tion du chef de l'Etat, porte-parole de la Confé­dé­ra­tion paysanne aurait encore passé de longs mois derrière les barreaux.

Après plusieurs années de prisons et de luttes contre l’enfermement Christines R, dont vous avez put régulièrement lire des nouvelles sur rebellyon, est enfin libre depuis le 22 décembre.

Le 16 décembre c’était la réponse de la dernière demande de libération conditionnelle faite à Nantes. Surprise ! Le JAP est d’accord. Encore plus grosse surprise, le proc’ ne s’y oppose pas dans les 24 h. Bref, le mardi 20 à 9h30, j’ai la confirmation que je sors le jeudi 22 !
Alors, voilà aujourd’hui c’est fini. Ouf !
Merci à ceux qui m’ont aidée à rester debout, qui ne m’ont pas lâchée, qui m’ont écrit, qui sont venus me voir aux parlus, qui ont aidé à diffuser les infos….
Bon vent à tous et VIVE LA LIBERTÉ !
Christine

Pour en savoir plus sur l’histoire de Christine Ribailly voiçi le site
Pisser dans l’herbe qui rappel un historique de cette affaire :

https://enfinpisserdanslherbe.noblogs.org/

Nous sommes des proches de Christine, ou des personnes solidaires de sa lutte au quotidien contre la taule… parce que nous aussi nous détestons la prison, et le monde qui en a besoin.

Nous avons décidé de rassembler les lettres qu’elle écrit pour faire connaître au dehors la réalité de la prison, et les nouvelles à son sujet, par le biais de ce blog. (Une grande partie du contenu de ce blog a été repris sur des sites d’informations militants qui relayent depuis longtemps les nouvelles au sujet de Christine).

C’est possible de nous contacter par mail à l’adresse suivante : christinecontact riseup.net

 

La suite à lire sur : https://enfinpisserdanslherbe.noblogs.org

 

-Réflexion publié par Parolesdejuges le

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28 décembre 2016 3 28 /12 /décembre /2016 13:47
Faut-il supprimer la Cour de Justice de la République ?
Le défenseur des droits  a par ailleurs critiqué « le manque de clarté des instructions données aux militaires déployés sur la zone, par l’autorité civile et par leur plus haute hiérarchie, ainsi que l’absence de toute autorité civile au moment du drame, malgré le caractère à la fois sensible, dangereux et prévisible de la situation »dans le cas de la 

 

Est-il fautif ou pas le proche d'un ex-premier ministre de faire  des "extra" pendant la pré-campagne  présidentielle?

Le porte-parole de Manuel Valls dans le collimateur de la justice

Selon les informations du Parisien, le juge Serge Tournaire s'intéresse à Philippe Doucet, ancien maire d'Argenteuil, dans une affaire d'emplois fictifs et d'attribution de marchés publics. 

Manuel Valls, candidat à la primaire de la gauche, se serait probablement bien passé de ces révélations. Selon les informations du Parisien, Philippe Doucet, porte-parole et proche de l'ancien Premier ministre, se trouve dans le viseur d'un juge d'instruction du pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, Serge Tournaire, dans une affaire d'emplois fictifs présumés et d'attribution de marchés publics. 

Soupçons d'emplois fictifs. D'après les informations du quotidien, les soupçons de la justice portent sur la période où Philippe Doucet était maire d'Argenteuil, dans le Val-d'Oise, entre 2008 et 2014. Il aurait notamment confié la publication du journal hebdomadaire de la ville, "l'Argenteuillais", à une société fondée par un autre élu socialiste du département, la rémunérant à hauteur de 256.000 euros, "hors marché et sans mise en concurrence préalable". Selon Le Parisien, trois employés de la mairie d'Argenteuil auraient, en outre, pu effectuer des missions d'assistants parlementaires pour Philippe Doucet, qui était également député. 

Interrogée par Le Parisien, l'équipe de campagne de Manuel Valls n'a pas souhaité réagir. 

-De toute façon la Cour de justice de la République,  est compétente pour juger les ministres, mais pas le président de la République,si l'on en crois Secret-défense, la fausse menace qui pèse sur Hollande 

La justice a été saisie par Eric Ciotti. Mais le président de la République bénéficie d’une immunité totale.
 

Le parquet de Paris a été saisi lundi 7 novembre par un courrier du député Les Républicains (LR) Eric Ciotti dans lequel il dénonce des faits « de nature à porter atteinte à la défense et à la sécurité nationale ». Le député des Alpes-Maritimes se réfère à un article publié dans Le Monde du 25 août, titré « Le jour où Obama a laissé tomber Hollande », relatant les heures pendant lesquelles la France s’apprêtait à frapper la Syrie fin août 2013. En illustration de l’article signé Gérard Davet et Fabrice Lhomme, dont les soixante entretiens avec le chef de l’Etat donneront lieu à la publication en octobre du livre « Un président ne devrait pas dire ça… », Le Monde a reproduit un document « confidentiel défense » présentant le déroulé théorique de l’intervention.

M. Ciotti dénonce la « divulgation volontaire de documents et d’informations classés confidentiel défense », par le président de la République ou son entourage. Un délit passible de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. Il estime que la divulgation de ces informations par Le Monde constitue également une infraction.

Procédure de destitution

Mais contrairement à ce que Le Monde a écrit par erreur dans son édition du mercredi 9 novembre, le chef de l’Etat n’a, d’un point de vue judiciaire en tout cas, pas grand-chose à craindre d’une telle procédure. Le président de la République jouit d’une immunité totale, pénale et politique, sur les actes qu’il commet dans l’exercice de ses fonctions. La Constitution ne prévoit que deux exceptions. D’une part, au cas où des actes seraient susceptibles de relever de la Cour pénale internationale et donc d’être qualifiés de crimes contre l’humanité. D’autre part, dans le cadre d’une procédure de destitution. L’article 68 de la Constitution prévoit que « le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ». Dans ce cas, le Parlement (Assemblée nationale et Sénat) réuni en Haute cour peut prononcer, à la majorité des deux tiers, la destitution. Son effet est immédiat.

La Cour de justice de la République, composée de quinze juges (douze parlementaires et trois juges du siège de la Cour de cassation dont son président) est compétente pour juger les ministres, mais pas le président de la République. Le statut pénal du chef de l’Etat, clarifiée par la réforme constitutionnelle de janvier 2007, prévoit par ailleurs une inviolabilité de la fonction présidentielle. Le président ne peut pas faire l’objet d’une procédure judiciaire ou administrative pendant la durée de son mandat. Pour des faits antérieurs à son élection, ou qui ne relèveraient pas de l’exercice de ses fonctions, les poursuites et les droits des tiers suspendus le temps du mandat retrouvent leur plénitude un mois après son départ de l’Elysée.

Cette procédure a été utilisée dans le volet financier de l’affaire Karachi (soupçon de financement de la campagne d’Edouard Balladur en 1955) qui visait notamment Nicolas Sarkozy. La plainte déposée auprès du procureur de la République alors qu’il était à l’Elysée n’a prospéré qu’à l’issue de son quinquennat. Mais les faits incriminés étaient antérieurs à son mandat présidentiel.

La saisine du parquet par M. Ciotti pourrait en revanche donner lieu, en fonction de l’analyse des faits par le procureur, à l’ouverture d’une enquête préliminaire. Le Monde et ses deux journalistes ne sont, eux, pas protégés par une quelconque immunité.

Par ailleurs, Pierre Lellouche, député LR, a lancé lundi à l’Assemblée une proposition de résolution pour une procédure de destitution du président de la République. Cette initiative aussi politique que symbolique a néanmoins peu de chance d’aboutir. La haute trahison ne semble pas pouvoir s’appliquer à la situation. Et la majorité des deux tiers serait par ailleurs inatteignable au Parlement.

 
 Jean-Baptiste Jacquin
 
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21 décembre 2016 3 21 /12 /décembre /2016 10:22
 
 
Par , publié le .

Les cinq personnes interpellées vendredi à Louhossoa lors d’une saisie d’armes d’ETA ont été libérées et placées sous contrôle judiciaire. L’un d’eux, Txetx Etcheverry, s’exprime.

 

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Un des penseurs français de la non-violence, Jean-Marie Muller, revient sur la théorie de la non-violence, dans un dialogue amical avec Juliette Rousseau.
 


Philosophe et écrivain, Jean-Marie Mullerr est membre-fondateur du Mouvement pour une alternative non-violente (MAN). Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur la non-violence dont Stratégie de l’action non-violente (Le Seuil, Livre de Poche) et le Dictionnaire de la non-violence (Le Relié Poche).

Cette tribune est une réponse au texte de l’activiste Juliette Rousseau, « La non-violence doit accepter la pluralité des formes de lutte », publiée le 18 novembre 2016 sur Reporterre.


« La pluralité des formes de lutte » dans une même campagne d’action pose de vrais problèmes mais ce ne sont pas ceux qui sont envisagés dans la tribune de Juliette Rousseau. Sur le plan pratique de l’efficacité, l’expérience montre que la lutte violente et la résistance non-violente procèdent de logiques stratégiques sensiblement différentes et, pour une part, contradictoires. La difficulté est donc bien réelle de les articuler et de les concilier.

A travers ses quatre-vingt dix livres en langue anglaise, le leader indien Gandhi nous présente la non-violence dans toute sa richesse et dans toute sa complexité. A le lire, il devient clair que si le mot « non-violence » est formellement négatif, il ne signifie pas que la non-violence est la négation de la violence, mais qu’elle se trouve dans un rapport d’opposition réelle à la violence, c’est-à-dire que sa visée est d’en détruire les causes et les conséquences. Le non que la non-violence oppose à la violence est un non de résistance. En définitive, la non-violence n’est pas tant le refus de la violence que la lutte contre la violence.

Plus que quiconque, Gandhi a conscience qu’il serait insensé de prétendre vivre une non-violence ab-solue (c’est-à-dire, selon l’étymologie de ce mot, dé-liée de la réalité) ; la non-violence de l’homme ne peut être que re-lative (c’est-à-dire re-liée à la réalité). « Tant que nous sommes des êtres incarnés, affirme-t-il, la non-violence parfaite n’est qu’une théorie comme celle du point ou de la ligne droite d’Euclide, mais nous devons nous efforcer de nous en rapprocher à chaque instant de notre vie [1]. » Mais si la non-violence ne peut être absolue, elle doit être radicale (du latin radix qui signifie racine), c’est-à-dire qu’elle doit s’efforcer de déraciner la violence, de la faire dépérir en détruisant ses racines culturelles, idéologiques, sociales et politiques.

« Là où il n’y a que le choix entre la lâcheté et la violence, je conseillerais la violence »

Gandhi écrit encore : « Je crois vraiment que là où il n’y a que le choix entre la lâcheté et la violence, je conseillerais la violence. (...) C’est pourquoi je préconise à ceux qui croient à la méthode de la violence d’apprendre le maniement des armes. Je préférerais que l’Inde eût recours aux armes pour défendre son honneur plutôt que de la voir, par lâcheté, devenir ou rester l’impuissant témoin de son propre déshonneur. Mais je crois que la non-violence est infiniment supérieure à la violence. (...) Je ne suis pas un visionnaire. Je prétends être un idéaliste pratique [2]. »

En janvier 1942, devant le Comité du Congrès de toute l’Inde réuni à Wardha, Gandhi justifie le choix de la non-violence qu’il propose à l’Inde en affirmant : « La non-violence (ahimsa) m’est un credo, le souffle de ma vie. Mais je ne l’ai jamais proposée à l’Inde comme un credo ou d’ailleurs à quiconque sauf, à l’occasion, lors de conversations informelles. Je l’ai proposée au Congrès comme une méthode politique destinée à résoudre des problèmes politiques. Il est possible que ce soit une méthode nouvelle, mais elle n’en perd pas pour cela son caractère politique. » C’est cette méthode politique que les militants de la non-violence s’efforcent de mettre en œuvre dans les luttes d’aujourd’hui. Sans arrogance, mais avec conviction et détermination.

[1] Gandhi, All Men are Brothers, Ahmedabad, Navajivan Publishing House, 1960, p. 119.
[2] Gandhi, The Collected Works of Mahatma Gandhi, Ahmedabad, The Publications Division, Ministry of Information and Broadcasting, Government of India, Vol. 18, 1965, p. 131.

 
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Lire aussi : Nuit debout : comment être offensif ensemble, sans idéaliser la violence ni la non-violence ?

Source : Courriel à Reporterre

Desssin : © Le Poisson/Reporterre

 
20 décembre 2016
 

Txetx (Jean-Noël) Etcherverry, Michel Berhocoirigoin, Michel Bergougnian, Béatrice Molle-Haran, et Stéphane Etchegaray, viennent d’être libérés mardi 20 décembre en fin d’après-midi. Ils devront se soumettre à un contrôle judiciaire.

Les cinq personnes avaient été interpellées dans la nuit de vendredi 16 décembre à samedi, à Louhossoa (Pays basque), alors que, dans une démarche de paix, ils tentaient de rendre inutilisable le stock d’armes de l’organisation séparatiste basque, ETA, avant de le remettre ultérieurement aux autorités françaises.

Un fort mouvement de mobilisation pour les soutenir et les faire libérer s’est engagé dès samedi.

  • Source : Reporterre

 

le contrôle extrapolé à tout un chacun    :L’état d’urgence, laboratoire du contrôle de la population

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15 décembre 2016 4 15 /12 /décembre /2016 16:59

le mot d'Isabelle :

 Bonjour à tous et toutes

En cette période de fêtes, voici la newsletter trimestrielle du CRIIGEN .
En bas de la newsletter, il y a un appel à dons ,le CRIIGEN a besoin de tout le monde pour poursuivre sa mission de Recherche et d'Information Indépendante sur les pesticides , les OGM, les perturbateurs endocriniens, les nanos , pour préserver les générations futures

Bonnes fêtes à tous et toutes !!

Isabelle CHIVILO

Membre du conseil d'administration du :CRIIGEN: http://www.criigen.org/

facebook : https://www.facebook.com/isabelle.svplanete / facebook 2 : https://www.facebook.com/isabelle.chivilo Bonjour à tous et toutes

En cette période de fêtes, voici la newsletter trimestrielle du CRIIGEN .
En bas de la newsletter, il y a un appel à dons ,le CRIIGEN a besoin de tout le monde pour poursuivre sa mission de Recherche et d'Information Indépendante sur les pesticides , les OGM, les perturbateurs endocriniens, les nanos , pour préserver les générations futures

Bonnes fêtes à tous et toutes !!

Isabelle CHIVILO

Membre du conseil d'administration du :CRIIGEN: http://www.criigen.org/

facebook : https://www.facebook.com/isabelle.svplanete / facebook 2 : https://www.facebook.com/isabelle.chivilo

 

-lettre

Chers adhérents et sympathisants,

 

A la lecture de cette lettre d’information, vous pourrez constater l’importance du travail effectué cette année, publications scientifiques, organisation de colloque ou de séminaires de formation, très nombreuses conférences, victoires devant les tribunaux contre des sympathisants des lobbies qui nous assaillent. Nous avons aussi apporté aide et soutien devant les tribunaux aux associations environnementales qui défendent l’environnement et donc notre santé… (Voir site du CRIIGEN).

 

 J’aimerais simplement souligner deux points importants :

 

- L’engagement du CRIIGEN dans l’organisation du « procès contre Monsanto » et de l’intervention à La Haye  de plusieurs de nos membres.

- L’annulation de l’autorisation de la mise sur le marché (AMM) par l’ANSES (Agence Nationale de la Sécurité Sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail) de 132 herbicides à base de glyphosate, dont des Roundup contenant  des formulants à base de POE-Tallowamine. Nous avons publié une étude en 2013 montrant que les formulants, dont ceux composés de POE-Tallowamine, considérés comme inertes par les fabricants et par les agences sanitaires, sont en fait de 100 à 1000 fois plus toxiques que le glyphosate, seule molécule testée pendant deux ans avant la mise sur le marché (Mesnage et al.2013).  Début 2016, nous avons montré que ces formulants sont aussi des perturbateurs endocriniens (Defarge et al. 2016).

 

Malgré cela et le fait que le CIRC ait déclaré le glyphosate « cancérigène probable » l’autorisation de nombreux autres herbicides à base de glyphosate a été  prorogée pour deux ans. La bataille n’est pas gagnée ! Même si dans deux ans les herbicides à base de glyphosate étaient retirés du marché, il est vraisemblable, voire à craindre que l’industrie agrochimique a déjà dans ses cartons des pesticides de remplacement potentiellement plus toxiques du fait des tolérances des OGM aux pesticides qui ne font que croitre. Le retrait itératif de quelques pesticides n’est donc pas la bonne solution. L’objectif primordial doit être de faire évoluer la réglementation qui, force est de constater, n’a pas été apte, depuis 60 ans à protéger les écosystèmes et la santé de la population mondiale. Il nous faut donc continuer à réaliser, encore et encore des études scientifiques et poursuivre notre travail d'information afin de démontrer la mauvaise évaluation sanitaire de ces produits et l’incurie de la toxicologie réglementaire.

 

Pour être apte à gagner ce challenge important, nous avons besoin de votre soutien moral ainsi que financier.

 

Je vous souhaite de très belles et sereines fêtes de fin d’année !

 

 

 
 

Joël Spiroux de Vendômois

Président

 
 

  
                                 Actualités

Accueil de nouveaux membres et changement de présidence du Conseil Scientifique

 

En cette année 2016, nous avons eu l’honneur et le plaisir d’accueillir trois personnalités :

 

Le Pr Alain Grimfeld, Pédiatre Pneumologue Honoraire et Président d’honneur du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE), au sein du conseil d’administration du CRIIGEN. Le Pr Grimfeld est aussi le Président du Comité de la Prévention et de la Précaution qui fut créé le 30 juillet 1996 par arrêté ministériel (Mme Lepage alors Ministre de l'environnement). Lire le texte du 20ème anniversaire du CPP.

 

Le Pr Jacques Testart, Docteur ès Sciences, Directeur de Recherche honoraire à l'I.N.S.E.R.M. Auteur des premières "mères porteuses" chez les bovins (1972) puis, avec son équipe biomédicale, des premiers succès en France de fécondation in vitro humaine (1982), congélation de l'embryon humain (1986), FIV avec injection du spermatozoïde : ICSI (1994) qui fut auteur des premiers succès en France de Fécondation In Vitro humaine.

 

Le Dr Dominique Béroule, Docteur en Electronique et chercheur au CNRS, travaille sur la modélisation des réseaux neuronaux et s'intéresse en particulier à l'autisme et aux facteurs environnementaux ayant un impact sur cette pathologie, à travers notamment une modulation de l'expression de certains gènes humains (épigénétique).

 

Du changement au sein du Conseil Scientifique du CRIIGEN

Après avoir été Président du Conseil Scientifique depuis la fondation du CRIIGEN, notre ami le Pr Gilles-Eric Séralinia souhaité quitter cette fonction bien lourde qu’il a su si bien animer. Je tiens à le remercier chaleureusement au nom de tous les membres du CRIIGEN pour l’importance et la qualité du travail effectué (plus de 35 publications scientifiques internationales et autres livres de vulgarisation).

 

Le nouveau Président pour le Conseil Scientifique du CRIIGEN

 Le  Dr Christian Vélot, Maître de conférences en génétique moléculaire à l'Université Paris-Sud, habilité à diriger des recherches, responsable d'une équipe située sur le Centre Scientifique d'Orsay et rattachées au "Pôle Risques" de l'Université de Caen.

Le sens de son engagement au sein du CRIIGEN est sa volonté d'oeuvrer contre la carence et l'opacité de l'évaluation des biotechnologies et leurs produits, et de contribuer à la mise en place de passerelles entre la recherche institutionnelle et le tiers secteur scientifique sous la forme notamment de conférences d'information, indépendante des firmes, en direction du grand public. 

Le Président

 

PROCES

 

Des victoires judiciaires uniques du CRIIGEN contre les diffamateurs et falsificateurs !

 

Belle année judiciaire pour le CRIIGEN qui, jusqu'à présent, a gagné tous ses procès (5 au total) en diffamation et autres plaintes qui mettaient en cause la probité et le sérieux des études et de leurs auteurs. Ces victoires viennent soutenir et conforter le travail des scientifiques du CRIIGEN...

 

1 et 2) Par arrêt en date du 7 septembre 2016, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du 6 novembre 2015 rendu par la chambre de presse du tribunal de grande instance de Paris qui a déclaré coupable en première instance (1) puis en appel (2) le journal Marianne (Maurice Szafran) et son journaliste Jean-Claude Jaillette de diffamation envers le Pr Gilles-Eric Séralini d'une part, et son équipe d'autre part (Robin Mesnage, Steeve Gress, Nicolas Defarge, Joël Spiroux de Vendômois, Manuela Malatesta), mais aussi  envers le Comité de Recherche et d'Informations sur le Génie Génétique (CRIIGEN), dans un article du 29 septembre 2012 intitulé "l'étude choc sur les OGM provoque un tollé mondial". Malgré la motivation très solide de l'arrêt, les perdants ont saisi la Cour de cassation ce qui n'empêchera pas les publications ordonnées par l'arrêt d'intervenir dans les semaines qui viennent dans plusieurs journaux.

 

3 et 4) En 2016, après avoir perdu dans un procès en diffamation contre le Pr Gilles-Eric Séralini le 18 janvier 2011 (3), Monsieur Marc Fellous, ex-président de la commission du génie biomoléculaire validant les OGM en France pour les ministères de l'agriculture et l'environnement de 1998 à 2007, a été renvoyé par un juge d'instruction devant le tribunal correctionnel de Paris pour faux et usage de faux au préjudice tant du Pr Séralini à titre personnel que du CRIIGEN (4). Ce renvoi sera jugé en audience publique en 2017.

 

Enfin, dernièrement, le tribunal de grande instance de Paris a reconnu la culpabilité pour diffamation de Daniel Dubost, un ancien universitaire, qui s'était permis des propos mensongers et insultant, voire menaçants à l'encontre du Pr Séralini sur son blog diffusé à l'Université de Caen.

 

Ces condamnations répétées mettent en lumière l'action concertée de tous ceux qui ont un intérêt à déconsidérer des études scientifiques qui établissent des risques liés aux OGM et aux pesticides en s'attaquant de manière personnelle à leurs auteurs. Elles sont autant de condamnations de ces méthodes inacceptables et autant d'encouragements pour les scientifiques qui oeuvrent pour la santé publique. N'oublions pas que ces batailles juridiques sont aussi de la part de nos diffamateurs des stratégies d'asphyxies financières. Toutes ces procédures sont très onéreuses, les dédommagements auxquels ont été condamnés nos diffamateurs sont loin de couvrir les frais engagés. Ces actions en justice ne sont pas terminées mais nous tenons à remercier vivement tous les citoyens qui nous ont déjà soutenu ainsi que les fondations, les entreprises et particulièrement Vélier SA, les fondations Biocoop et Léa Nature, Malongo, Ekibio et l'Institut de l'Alimentation Bio.

 

 

TRIBUNAL MONSANTO

 

 

 

 
 

Arnaud Apoteker

 
 

Quelques membres du CRIIGEN étaient fortement impliqués : Arnaud Apoteker, un des coordinateurs du Tribunal et ancien développeur de la campagne anti-OGM chez Greenpeace France, il a également été en charge de la campagne OGM pour le groupe Verts/ALE au Parlement Européen. Emilie Gaillard, docteur en droit et spécialiste du droit des générations futures, a participé activement à l'organisation des audiences du Tribunal Monsanto et de l'Assemblée des Peuples tenues en parallèle et qui ont rencontré un grand succès. Les victimes étaient heureuses d'avoir été entendues, les médias (surtout français, allemands et latino-américains) étaient au rendez-vous, plus de 10 000 personnes ont regardé tout ou partie en direct sur tous les continents et bien plus encore se sont mobilisées sur les réseaux sociaux. Près de 750 personnes de plus de 30 nationalités étaient présentes à La Haye pour participer à ces évènements historiques.

 

Pour les participant-e-s de l'Assemblée des Peuples (les "procureurs" du Tribunal), il est clair que Monsanto est coupable de violation des droits humains fondamentaux. Cependant, il est à présent du ressort des cinq juges indépendants de rendre un avis juridique sur ce sujet. Ces derniers ont indiqué avoir besoin de temps pour rendre un avis solide et bien fondé, qui pourra être utile dans d'autres cas et contribuer aux discussions sur le développement du droit international. L'opinion juridique est attendue au printemps.

 

Corinne Lepage, avocate spécialiste des questions environnementales et ancienne ministre de l'environnement, entre autres, a ouvert cet évènement. Ecoutez le discours d'ouverture de Corinne Lepage. 

 

Nicolas Defarge était présent pour témoigner des pressions que subissent les scientifiques dès que leurs résultats déplaisent aux industriels et aux agences qui ont autorisé leurs produits. Il en a profité pour apporter des éléments clairs pour que chacun des juges et de l'assemblée puisse juger de qui des deux camps fait de la bonne science !Ecoutez son témoignage.

 

 

Pour en savoir plus !

 
 

Nicolas Defarge

 
 

 

Audience au Conseil d'Etat autour des OGM cachés

 

En mars 2015, neuf organisations de la société civile réunies au sein du Collectif de l'Appel de Poitiers ont déposé un recours devant le Conseil d'Etat (CE) pour demander l'annulation de l'arrêté excluant les plantes génétiquement modifiées issues de la mutagenèse de la règlementation OGM ("OGM cachés").

Le CE a alors lancé une procédure d'enquête avec une audience (très exceptionnelle) qui a eu lieu en juin dernier et à laquelle le CRIIGEN a pris toute sa part : son Vice-président, le Dr Christian Vélot (généticien moléculaire à l'Université Paris-Sud), était l'un des deux experts auditionnés par le CE pour le compte du collectif à l'origine du recours, et son Président, le Dr Joël Spiroux de Vendômois (médecin, membre du conseil scientifique, spécialiste des questions de santé environnementale) a  apporté un témoignage écrit sur les aspects sanitaires, toujours à la demande du collectif.

Lors de l'audience du CE du 19 septembre dernier, le risque a été reconnu par le rapporteur public qui demande une saisine de la Cour européenne de justice afin qu'elle se prononce sur la conformité de la directive européenne relative aux OGM agricoles avec le principe de précaution, au regard des techniques de modification génétique par mutagenèse qui conduisent à des plantes échappant à toute règlementation. Une belle victoire d’étape !

 

 

Les différents représentants du Collectif de l’Appel de Poitiers, le 9 juin 2016 au Conseil d’Etat, accompagnés de leur avocat, Maître Guillaume Tumerelle ((3ème rang, 2ème en partant de la gauche) et de leurs deux experts auditionnés, Dr Yves Bertheau (à sa droite) et Dr Christian Vélot (à sa gauche).

Pour en savoir plus lire le compte rendu

 

 

PUBLICATION SCIENTIFIQUE* - "Le Roundup : Perturbateur endocrinien et nerveux"

 

Le fait que certains xénobiotiques (produits chimiques) soient des perturbateurs endocriniens (PE), c'est-à-dire qu’ils soient aptes à perturber le fonctionnement de toutes nos glandes endocrines ainsi que  l’action de nos hormones est  scientifiquement désormais établi. Un nouveau concept fait jour, celui de « Perturbateur  Endocrinien et Nerveux ». En effet, certains de ces xénobiotiques sont aptes de surcroit à perturber le système nerveux central  et donc les fonctions cognitives et comportementales. Ainsi, la diminution sensible du quotient intellectuel (QI), l’augmentation très inquiétante de l’autisme, de l’hyperactivité, des troubles de l’attention, du syndrome Asperger sans oublier l’augmentation des pathologies neuro-dégénératives, sont autant de très importants et inquiétants problèmes de santé publique...

Lire la suite...

 
 
 

*Dig1 protects against locomotor and biochemical dysfunctions provoked by Roundup. Gress S, Laurant C, Defarge N, Travert C, Séralini GÉ. BMC Complement Altern Med. 2016 Jul 22;16:234. doi: 10.1186/s12906-016-1226-6.

http://bmccomplementalternmed.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12906-016-1226-6

 

                              

 
                                   Bibliothèque
 
 
 
 
 
"Santé et environnement, les dangers, les preuves, le droit" : Numéro spécial de la"Revue EXPERTS", revue de l'expertise judiciaire publique et privés, publiée fin juin 2016. La partie juridique a été supervisée par Me Corinne Lepage (présidente d'Honneur du CRIIGEN) et le dossier santé effectuée sous la direction du Dr Joël Spiroux de Vendômois (Président du CRIIGEN). De nombreux membres du CRIIGEN ont aussi apporté leur concours à cette belle réalisation.
 
 
 
 
 
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"Le sacrifice des Paysans", le tout dernier ouvrage du Pr. Yves Dupont, sociologue au CRIIGEN, sortie en librairie le14 octobre 2016 !
 

 

 

Pourquoi les sociétés modernes ont-elles décidé de sacrifier les paysans ? Qui est responsable de ce processus qui semble irréversible ? Pour tenter de répondre à ces questions fondamentales, ce livre montre comment des décennies, en France comme ailleurs, le productivisme s'est étendu à l'ensemble des activités humaines...

Pour en savoir plus !

 

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Et plus récemment encore, "Et nous vivrons des jours heureux" paru le 6 novembre dernier, avec la contribution de plusieurs membres du CRIIGEN...

 

LE POINT DE VUE DES EDITEURS 

 

"Nous appelons à définir ensemble un nouveau programme de résistance : pour nous, résister c'est créer."

Reprenant cet appel lancé en 2004 par treize anciens résistants, 100 citoyens, tous reconnus dans leur domaine, ont conjugué leurs réflexions et leurs expériences pour élaborer un nouveau projet, #LesJoursHeureux. Sur la démocratie, le vivre-ensemble, l'économie, l'écologie, ils proposent un cap à suivre et 120 actions immédiates. Pour qu'au brouillard de notre époque succèdent des jours heureux !

Pour en savoir plus !

 
 
 

 

Appel à soutien

Depuis bientôt 20 ans maintenant, le CRIIGEN s'interroge sur les effets à court, moyen ou long terme sur la santé de l'homme et tout l'écosystème vivant. Nous avons fait des découvertes exceptionnelles qui ont permis de mieux évaluer la toxicité des OGM et des pesticides.
En soutenant dès aujourd'hui le CRIIGEN, vous nous permettez de continuer notre action de recherche, d'expertise et d'information. Vous contribuez ainsi autant que nous à AGIR !

Sachez que votre don vous ouvre droit à une réduction d'impôt égale à 66% du montant de votre don, par exemple :

Un don de 15 € ne vous coûte que 5,10 €,  30 € ne vous coûte que 10,20 €... et 100 € ne vous coûte que 33 € !

Profitez de notre plateforme leetchi 100% sécurisée pour faire un don en ligne avec votre carte de crédit. Ponctuelles ou mensuelles, toutes les contributions, même les plus simples, sont les bienvenues.

Vous pouvez aussi nous faire des dons par chèque en envoyant le tout à CRIIGEN, BP n° 15101, 14079 Caen Cedex 5 France 

        

Un justificatif vous sera adressé pour votre déclaration fiscale. Pour toute question contactez criigen@criigen.info

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13 décembre 2016 2 13 /12 /décembre /2016 15:11
paru dans lundimatin#85, le 13 décembre 2016

C’est un dossier qui n’en finit plus. Le parquet antiterroriste ne veut pas en démordre, les mis en examen dans l’affaire de Tarnac doivent être jugés pour terrorisme. Comme le relate Le Monde, la Cour de cassation doit se pencher aujourd’hui sur le 3e appel du ministère public. Le livre L’insurrection qui vient suffit-il a qualifier une entreprise politique de terroriste ?
Le choix du rapporteur interroge, il s’agit du juge Ricard, ancien bras droit de Jean-Louis Bruguières, conseiller de Michèle Alliot-Marie en terrorisme.
Si les inculpés ont choisi de ne pas se présenter ni d’être représentés lors de cette audience, ils ont par contre adressé une lettre à la cour que nous reproduisons ici.

Paris, le 7 décembre 2016

Monsieur le Président,

Le Parquet antiterroriste qui, dans cette affaire, a fait montre d’une remarquable constance dans l’aveuglement, s’est donc pourvu en cassation contre l’arrêt de la Chambre, après avoir perdu son appel contre l’ordonnance des juges d’instruction. On peut y voir une marque de cohérence ou d’entêtement ; les observateurs les plus détachés y ont vu une folie furieuse. Nul n’ignore en France, du moins parmi ceux qui se sont un peu renseignés, que l’affaire de Tarnac est un montage politique. Des livres entiers, des centaines d’articles, des enquêtes-fleuves en ont mis à nu une bonne partie des dessous ; et ils sont tous scandaleux. Alain Bauer, l’un des initiateurs de l’affaire, en est réduit depuis des années maintenant à ironiser sur le sujet, et à railler sa qualification terroriste. La 17e chambre du TGI de Paris a relaxé notre conseil, Jérémie Assous, sur le fondement de l’offre de preuve, conformément aux réquisitions de la chef même de la section concernée du Parquet. Jérémie Assous était donc bel et bien fondé à qualifier l’OPJ Bruno Mancheron, l’auteur du faux PV D104 et de tant d’autres faux dans cette procédure, de « faussaire ». Il n’y a que du côté de la section C1 du Parquet que l’on refuse de se rendre à l’évidence : tout cela n’est qu’un immense et flagrant fiasco. À peine a-t-on réussi à sauver les meubles en faisant obstacle, au cours de l’instruction de Paris et de Nanterre, à toutes nos demandes d’actes comme, au reste, à tout ce qui aurait pu contribuer à la manifestation de la vérité. Et pour cause, cela aurait amené, tôt ou tard, à la mise en cause de parties entières des services de renseignement, de l’appareil antiterroriste et bientôt de l’appareil d’Etat. C’était en un sens eux ou nous. On a fait en sorte que ce soit nous, même si cela n’est pas allé sans quelques victimes collatérales. Un juge d’instruction, pris en flagrant délit de partialité et de manipulation, a dû déguerpir. Un agent de la SDAT, censé avoir suivi Yildune et Julien, a prétendu être à la même heure en deux points distants d’une centaine de kilomètres tandis qu’il apparaissait finalement que les présumés saboteurs étaient en fait déjà rentrés à Paris à l’heure supposée du sabotage. Et ainsi de suite. Chaque nouveau rebondissement de l’affaire a marqué aux yeux de tous un nouvelle chute de la Justice dans le ridicule. Et pour nous, nous avons quand même pu accumuler les preuves des faux successifs – ceux qu’il a fallu faire pour couvrir les faux initiaux. Mais de toute évidence, dans ce genre de procédures et sur ce terrain-là, il n’y a pas de lutte à armes égales.

Le non-lieu agrémenté d’excuses publiques de la part de l’État nous a toujours semblé être le minimum qui nous était dû. Cette affaire a suffisamment dévasté nos vies – d’une sorte de dévastation pour laquelle il n’est pas de contrepartie. Il est donc inconcevable que nous venions quémander devant vous le respect d’un arrêt de la chambre de l’instruction qui, tout en revenant sur la qualification terroriste, valide les mille autres aberrations de ce dossier. C’est un non-lieu total que nous revendiquons ; et chacun sait que nous l’aurions obtenu de longue date s’il n’avait pas fallu ici protéger des services et des intérêts auxquels on ne peut rien refuser, à commencer par la dispense d’une humiliation publique. Nous laissons donc la Cour démêler la façon dont la Justice va pouvoir se sortir du pétrin où elle s’est mise par sa propre faute.

Avec le temps, et parce que les mécanismes judiciaires sont manifestement faits pour vous exproprier de votre propre destin, nous sommes en quelque sorte devenus les observateurs de notre sort dans une affaire qui, au bout de dix ans, ne nous concerne plus vraiment. Et comme tout observateur, nous avons pris l’habitude de faire des observations. Nous vous les livrons ici.

Il n’a pas manqué, dans ce dossier, de juges d’instruction farouchement partisans, d’experts mandatés pour dire ce que l’on attend, d’auditions arrangées, de contradictions qui crèvent les yeux et sur lesquelles on se garde bien d’enquêter, de subterfuges procéduraux et autres « reconstitutions » scandaleuses. Mais, avouons-le, nous ne nous attendions pas à ce que le rapporteur, supposément « neutre », « objectif », pour l’examen de ce pourvoi devant la cour de Cassation soit le juge Jean-François Ricard en personne. On a donc confié la synthèse « impartiale » du dossier de Tarnac à un homme qui fut le bras droit du cowboy Bruguière dont la postérité retiendra autant le soin à ensabler les procédures gênantes que le rôle dans le procès Chalabi. À un homme qui, aux dires de Marc Trévidic lui-même, dans son livre Au coeur de l’antiterrorisme, voit son rôle de juge d’instruction comme un « combat » contre un « adversaire » contre lequel il faut déployer des « stratégies », avec tout ce que cela suppose d’accommodements avec le droit - « Juger un terroriste, assume-t-il, c’est certes juger un acte terroriste, mais c’est aussi juger une conviction ». Un homme qui fut le conseiller informel à l’antiterrorisme de Michèle Alliot-Marie quand elle était ministre de la Défense avant que celle-ci ne tente de se propulser au poste de Premier Ministre grâce à nos arrestations. Le juge Ricard dont les câbles américains, révélés par WikiLeaks et jamais démentis par personne, ont exposé les singulières conceptions en matière de lutte antiterroriste. Pour rappel : « Le 9 mai 2005, l’ambassade [américaine] narre une rencontre avec le juge Jean-François Ricard. Celui-ci explique que les magistrats tel que lui, spécialisés dans l’antiterrorisme, bénéficient du "bénéfice du doute". Il prend comme exemple le dossier Djamel Beghal, arrêté en 2001 et soupçonné d’un projet d’attentat contre l’ambassade américaine à Paris. "Ricard dit que les preuves [contre lui et ses complices] ne seraient pas suffisantes normalement pour les condamner, mais il estime que ses services ont réussi grâce à leur réputation."  » (Le Monde, 29 novembre 2010) Le juge Ricard, donc, qui non content de goûter le flou opportun de l’incrimination d’« association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » (AMT), se vantait à l’ambassade américaine d’avoir acquis une si rare intimité avec les RG, la DST et la DGSE que ces services lui laissaient consulter toutes sortes d’informations non judiciarisables du fait des moyens peu scrupuleux employés pour les obtenir. Un homme, enfin, qui a livré aux autorités américaines quantités d’informations sur des dossiers en cours. On a donc confié la synthèse, pour la cour de Cassation, du dossier de Tarnac, une affaire d’État, à un homme de la raison d’État. C’est à cet apôtre de l’antiterrorisme que l’on a délégué la tâche d’établir les bases du débat quant à la qualification des faits. Quelqu’un a dû juger qu’il devait manquer une pointe de scandale au scandale que n’a cessé d’être, depuis son premier jour, le traitement judiciaire de ce dossier.

Sans surprise, le parti pris du rapport du juge Ricard crève les yeux. Ce qui importe dans ce rapport de part en part hostile, est l’argumentation portant sur l’AMT. Il n’y a en effet, en droit français, besoin d’aucune infraction caractérisée pour être condamné pour terrorisme ; le fait de « participer à un groupement » ayant vocation à « troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur » est en soi déjà un « acte terroriste ». Et il suffit à cela d’un « élément matériel » qui peut-être un tract, un simple propos voire un silence. Et d’année en année, on voit ainsi s’étendre la liste des « actes terroristes » - consultation de site, fréquentation, train de vie « injustifié », « soutien », « apologie du terrorisme », etc. L’incrimination de terrorisme ne cesse de s’étendre, en amont, dans le potentiel, le « préventif », et en aval, dans l’infime, le quotidien. Il ne manque pas d’éléments de doctrine pour dénoncer comme une dérive voire comme un naufrage cette évolution du droit pénal, qui ne cesse de se rapprocher de ce que Günther Jakobs a théorisé comme « droit pénal de l’ennemi ». On se reportera ainsi avec profit au numéro 1 de la Revue de Science Criminelle et de droit comparé paru en 2009. On lira avec un égal intérêt le dernier numéro de la Revue de politique criminelle, et notamment l’article d’Olivier Cahn, « Cet ennemi intérieur, nous devons le combattre », ou celui de Virginie Sansico, qui rappelle que la première occurrence, dans le code pénal français, de la notion de « terrorisme » est bien évidemment le fait de Vichy. Curieusement, ce ne sont pas de tels éléments de doctrine, ni même les observations critiques de Julie Alix sur les évolutions de l’antiterrorisme, qui sont cités dans le rapport du juge Ricard. Ce dernier mentionne bien certains passages de sa thèse, mais omet, par exemple, celui-ci : « L’analyse de la criminalité terroriste met en lumière qu’en la matière, seule préside à la décision d’incrimination l’existence d’un besoin répressif. Le constat est donc celui d’une totale instrumentalisation de l’incrimination pénale au service de la politique criminelle antiterroriste ». On ne s’étonnera pas non plus que le juge Ricard ait préféré citer, pour seul philosophe, Raymond Aron plutôt que Michel Foucault, Gilles Deleuze ou Giorgio Agamben. Mais le juge Ricard ne répugne pas non plus aux falsifications mesquines, comme de mentir sur la distance entre deux villes afin de mettre en cause un non-lieu deux fois prononcé en notre faveur – non, monsieur Ricard, la distance entre Baccarat et Vigny est de 90 km par la route la plus courte et de 104 km par la route la plus rapide, et non de 70 km ! Décidément, ce monsieur a de beaux restes de ce talent inquisitorial qui fit sa fuyante gloire.

Nul doute que nous n’oeuvrions, dans la mesure de nos maigres moyens et parmi tant d’autres, à l’advenue d’une insurrection, ou du moins à la mise à l’arrêt d’une société qui va si manifestement dans le mur. Nul doute que cela puisse représenter, aux yeux de certains, un « grave trouble à l’ordre public ». Nul doute que la législation antiterroriste française soit au fond assez brumeuse pour permettre de couronner d’une cassation le monument de forfaitures qu’est ce dossier. Mais si vous deviez arguer de l’Insurrection qui vient pour nous renvoyer devant un tribunal antiterroriste, alors faites-le devant une cour d’assise, et non en catimini devant un tribunal correctionnel. Il vous est loisible de casser tous les jugements précédents, mais n’ayez pas la mesquinerie de priver notre défense d’un authentique procès où l’on peut enfin entendre juges d’instruction, policiers et politiques, que soit mis sur la place publique ce que tout le monde sait ou devine : les mensonges et les faux d’agents assermentés, les manipulations de l’instruction et toutes les intrigues politiciennes qui ont fait cette affaire. Or cela, seule la cour d’assise nous le garantit. Il est crucial que, si un écrit tel que l’Insurrection qui vient devait désormais constituer un « élément matériel » suffisant à caractériser une « entreprise terroriste », ses centaines de milliers de lecteurs à travers le monde en soient avisés. Il faut toute la publicité à une décision à ce point politique. Vous n’oublierez pas, alors, d’incriminer conjointement les lecteurs de Rimbaud :

Industriels, princes, sénats,
Périssez ! puissance, justice, histoire, à bas !
Ça nous est dû. Le sang ! le sang ! la flamme d’or !

Tout à la guerre, à la vengeance, à la terreur,
Mon Esprit ! Tournons dans la Morsure : Ah ! passez,
Républiques de ce monde ! »

En vous priant d’agréer…,

Christophe Becker
Mathieu Burnel
Julien Coupat
Bertrand Deveaud
Manon Glibert
Elsa Hauck
Benjamin Rosoux
Aria Thomas

Lettre a La Cour de Cassation TARNAC by lundimatin on Scribd

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7 décembre 2016 3 07 /12 /décembre /2016 14:43
 
Par Sylvain Mouillard et Laure Bretton
 
C’est un boulet qui va atterrir sur le bureau du prochain président de la République. Tenant en quatre lettres - «NDDL» pour Notre-Dame-des-Landes -, ce projet d’aéroport date d’une cinquantaine d’années. Mais à six mois de l’élection, la cause est quasiment entendue : la gauche n’évacuera pas la «zone à défendre» (ZAD) peuplée d’opposants, et ne lancera pas le début des travaux avant la présidentielle. Pour des raisons politiques, pratiques et juridiques.

Première d’entre elles : la démission, mardi, de Manuel Valls, qui signe le départ du plus fervent partisan du projet au sein du gouvernement. Ces derniers mois, l’ancien Premier ministre et nouveau candidat à la primaire de la gauche martelait sa détermination, assurant le 11 octobre que «l’évacuation, c’est pour cet automne». Le 18 octobre, que l’aéroport «se fera». Le 15 novembre, que les travaux devront débuter «dès que possible».

En face, des centaines d’opposants, installés sur le site de la (future ?) infrastructure, se préparent et mobilisent leurs réseaux. Agriculteurs du grand Ouest, militants écologistes, citoyens nantais, tous sont prêts à venir défendre physiquement la ZAD, devenue un emblème national de la lutte contre les grands projets d’aménagement. Et ont trouvé un relais au sein du gouvernement, en la personne de Ségolène Royal. La ministre de l’Ecologie veut «arrêter les frais» dans ce dossier marqué par un «déni de démocratie». Quant à François Hollande, il ne dit mot, préférant ne pas fracturer une nouvelle fois sa majorité à quelques mois de son départ de l’Elysée.
Face-à-face à hauts risques

Mais si les zadistes ont gagné au moins six mois de répit, c’est surtout grâce à la nomination de Bernard Cazeneuve au poste de Premier ministre. L’ancien ministre de l’Intérieur considère qu’une intervention des policiers et gendarmes dans la ZAD risquerait de provoquer un «Sivens puissance 27», autrement dit une bataille rangée pouvant causer des morts. Un message qu’il a déjà fait passer au chef de l’Etat, notamment lors de leur rencontre, le 21 novembre, où le projet d’aéroport figurait noir sur blanc à l’ordre du jour de ce rendez-vous hebdomadaire entre les deux hommes.

Depuis la rentrée, Bernard Cazeneuve a transmis à l’Elysée plusieurs notes des renseignements territoriaux et de la gendarmerie sur la situation dans le bocage nantais. Elles dressent un tableau guère engageant. Sur place, un certain nombre de militants radicaux sont prêts à en découdre avec les forces de l’ordre. Ils pourraient être rejoints par plusieurs centaines d’opposants pacifistes, mais non moins déterminés à empêcher l’évacuation de la ZAD. Tous les ingrédients sont donc réunis pour un face-à-face à hauts risques. «A côté, Sivens [où Rémi Fraisse a été tué par un gendarme mobile à l’automne 2014], c’est rien», confie une source proche du dossier, qui redoute une confrontation «atroce».

Pour les forces de l’ordre, le niveau d’incertitude est en effet trop élevé pour garantir une évacuation dans le calme. Elles ne peuvent pas non plus écarter un scénario au coût politique très lourd : l’obligation pour l’Etat de donner l’ordre de faire demi-tour, comme ce fut le cas lors de l’opération César en octobre 2012. Tous ces calculs interviennent dans un contexte de menace terroriste élevée, avec l’obligation de sécuriser les festivités de fin d’année (grands magasins, marchés de Noël). «Est-ce le bon moment pour mobiliser durablement 2 500 gendarmes autour de Notre-Dame-des-Landes ?» interroge notre source.
Un dossier «saucissonné»

L’exécutif doit aussi tenir compte d’une guérilla juridique entamée il y a plusieurs années et qui n’a toujours pas connu son épilogue. Du Conseil d’Etat à la Commission européenne, les échéances sont encore nombreuses et pourraient entacher d’illégalité toute intervention précipitée.

Le principal obstacle juridique remonte à avril 2014. Dans une lettre de mise en demeure envoyée aux autorités françaises, la Commission européenne leur reproche de ne pas avoir mené d’évaluation environnementale satisfaisante du projet d’aéroport. Deux ans et demi plus tard, la procédure d’infraction est toujours ouverte et les réponses de la France apparaissent encore bien légères. Pour se conformer aux demandes de Bruxelles, l’Etat devait notamment mettre à jour le schéma d’aménagement du territoire (Scot) Nantes-Saint-Nazaire. Ce projet de révision a reçu le 21 novembre un avis favorable des commissaires enquêteurs, assorti toutefois d’une réserve de taille, consistant à «procéder à l’évaluation de l’impact de l’ensemble» du nouvel aéroport. Soit, très exactement, ce qui manquait déjà en 2014.

«Le dossier a été saucissonné et manque d’une vision d’ensemble sur le droit environnemental, remarque Françoise Verchère, coprésidente du Cédpa, un collectif d’élus anti-aéroport. L’impact des projets d’aménagement connexes, comme la ligne tram-train ou l’éventuelle ligne à grande vitesse, n’ont pas non plus été étudiés.» D’où cette interrogation : «La Commission va-t-elle accepter d’être prise pour une demeurée ou va-t-elle demander à la France d’enfin répondre à ses questions ?» Si cette première procédure d’infraction venait à s’arrêter, les opposants pourraient en enclencher une nouvelle, sur la base des arrêtés «loi sur l’eau» et «espèces protégées», à leurs yeux insuffisants.
Sparadrap

Au plan national, la bataille juridique est tout aussi intensive. De nombreuses procédures doivent encore être tranchées par les tribunaux. Thomas Dubreuil, avocat de plusieurs associations d’anti, annonce qu’un pourvoi devant le conseil d’Etat contre de récents arrêts de la cour administrative d’appel de Nantes devrait bientôt être formé. En septembre, la plus haute juridiction administrative française avait aussi été saisie d’une demande d’abrogation de la déclaration d’utilité publique datant de 2008. Valable dix ans, celle-ci deviendra d’ailleurs caduque en 2018 si aucun coup de pelle n’est donné d’ici là. Le tribunal administratif de Nantes devra également se prononcer sur la validité des arrêtés autorisant l’élimination du campagnol amphibie, une espèce protégée de rongeur, présente sur le site du futur aéroport. Enfin, un certain nombre d’opposants vivant sur le site sont en théorie protégés de toute décision d’expulsion par la trêve hivernale.

Sparadrap indécollable du quinquennat Hollande, le dossier de Notre-Dame-des-Landes mobilisera donc le prochain chef de l’Etat. Au sein de l’équipe de François Fillon, un homme ne cesse d’appeler à l’évacuation des zadistes. Il s’agit de Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat et du conseil régional des Pays-de-la-Loire. Dans six mois, lui et Fillon pourraient être confrontés aux mêmes problèmes que la majorité actuelle.
Sylvain Mouillard , Laure Bretton
 
note " ,,et après un crime d' état à Sivensç,qu'est-ce que je vous serre comme premier ministre ?" ajout par l'administration du blog  de cet article :

Violences policières, violences d’Etat
Christian de Montlibert | Fondation Copernic | 29 novembre 2016

Nos sociétés sont violentes, mais pour avoir une mesure un peu plus fidèle de cette violence  il faudrait additionner  le  nombre de crimes et agressions,  le nombre de suicides, le nombre de morts et blessés graves de circulation routière, aérienne et maritime, le nombre d’accidentés  du travail, le nombre de viols et agressions sexuelles, le nombre de violences conjugales… Pire nos sociétés connaissent sans doute une augmentation de la violence. A plus court terme les assassinats commis à Toulouse, à Montauban, à Paris à  Charlie Hebdo,  à  l’Hyper casher, au Bataclan et dans les rues avoisinantes, a Nice sur la promenade des Anglais, mais aussi les meurtres des policiers, et encore  la permanence d’un chômage de masse qui entraine une surmortalité des chômeurs (accidents routiers, suicides, agressions…), l’importance des noyades en Méditerranée que les traités européens et surtout la morale obligent la France à prendre en compte et enfin, bien qu’on n’en parle peu, l’existence  des victimes des bombardements de l’aviation française au Moyen Orient dont la France est directement responsable, ont amplifié cette violence. Cette mesure répétée année après année montrerait qu’une fois un taux atteint il ne diminue pas tant que dure l’état de la société qui l’a engendré.

Le seuil de tolérance à une violence considérée, à un moment donné,  comme normale ou inévitable a sans doute d’autant plus augmenté que la violence est vite devenue l’objet d’une guerre des médias.  Apprécier ou déprécier un mouvement social et les agents qui sont fait par lui et qui le font vivre est essentiel à qui veut légitimer ou délégitimer la violence. L’utilisation du terme  « casseur » constitue un exemple parfait de cette pratique : le terme était déjà utilisé en 1979, lors des manifestations contre la fermeture des installations sidérurgiques,  pour stigmatiser les pratiques non conventionnelles, non routinières, que des ouvriers utilisaient pour se faire entendre dans une situation où l’Etat refusait la négociation. Il est vrai que  l’Etat, les classes dominantes, les détenteurs du pouvoir économique sur les médias expriment souvent leur connivence dans la dépréciation symbolique de ceux qui remettent en cause leurs décisions.

L’origine de la violence est structurelle. La violence des institutions, des décisions politiques, des stratégies économiques en engendrant des inégalités précède et entraine la violence des comportements.  On peut affirmer sans risque d’erreurs que cette violence structurelle dépend de l’écart entre les revenus , de l’absence ou du délitement du droit du travail ici et du droit de la personne ailleurs, de l’absence de travail qui défait les liens d’interdépendance fonctionnelle et enfin de l’assignation des individus dans des positions sociales stigmatisées. Lorsqu’un économisme dominant impose comme finalités de l’existence la consommation et le profit et comme moyen la lutte de chacun contre tous, comment la marchandisation des relations humaines ne serait elle pas à l’œuvre ? Le déchainement des intérêts économiques souvent liés aux intérêts politiques dans les rapports entre les pays dominants et les pays dominés s’accompagne toujours d’une détérioration de la morale politique. Plus la mondialisation concurrentielle est libérée de tout contrôle social plus les rééquilibrages organisées par les politiques sociales disparaissent et plus les régulations des relations humaines s’effacent.

A cette violence structurelle crée par les inégalités s’ajoute la violence d’Etat. De la royauté à l’époque moderne, l’Etat, sous ses différentes formes,  a toujours engagé des forces armées pour protéger ce qu’il juge être ses intérêts ou les intérêts des groupes sociaux qu’il défend. Il suffit de s’appuyer sur les travaux des historiens pour le savoir (les insurrections paysannes se succédèrent sans interruption en Aquitaine par exemple comme, au XIX e siècle, à Lyon, les révoltes ouvrières); plus prés de nous il suffit de rappeler les rapports de forces lors des manifestations de protestation contre la fermeture des installations sidérurgiques  en 1978 ; le nombre de blessés lors de manifestations dont les décès de Malik Oussekine ou celui de Carlo Guliani, lors du G8  de Gênes, ou, plus récemment encore,  le décès de Rémi Fraisse lors des manifestations pour empêcher le construction du barrage de Sivens,  sont en quelque sorte les points d’acmé qui  objectivent  douloureusement cette violence d’État.

Reste que, les conditionnements une fois créés, il n’est plus nécessaire de manifester sa force :   la menace d’engager la police ou l’armée  suffit  à décourager l’expression des oppositions. Le maintien de l’ordre  qu’assure  l’État contribue au développement des sentiments de crainte et de respect à son égard.  Plus encore la sortie des crises se fait souvent en édictant un règlement bureaucratique qui  contribue à rendre moins visible  la pérennité des  inégalités structurelles   au profit d’une normalisation qui embrigade la contestation dans une opposition « responsable ». Déplacements, sublimations,  euphémisations… opérées par  « les professionnels du discours » transforme aussi  cette violence en violence symbolique d’autant moins perçue comme telle qu’elle structure les catégories de pensée et de sentir de ceux qui devraient la contester. Les manières de pensée et les représentations habituelles des dominés qui, parce qu’elles résultent en grande partie de l’intériorisation de mécanismes de défense inventés pour se protéger des contraintes de la nécessité, sont finalement assez bien adaptées aux exigences de l’ordre social et ainsi, d’une certaine façon, tant que dure la routine bureaucratique,  contribuent à la permanence d’une pensée conservatrice.

En somme la bureaucratie d’une part et la violence  symbolique d’autre part devraient finir par faire oublier la violence réelle. Mais  tout se passe comme si dans  « la guerre des classes » comme le disait Durkheim, dans cette suite de coups et de contrecoups – dont la loi El Khomri qui répond aux exigences du FMI, de l’OCDE, de la Commission européenne et des multinationales   qui veulent plus de flexibilité  et moins de services publics,  n’est qu’ un épisode –  les classes dominantes cherchaient à  reprendre leurs avantages un moment menacé par les améliorations des conditions d’existence obtenues, après des luttes, par les groupes dominés. Tout se passe comme si, ce faisant, elles suscitaient, à leur corps défendant, des résistances à même de délégitimer la violence symbolique et  de  remettre en cause aussi bien l’adhésion à l’ordre établi que la soumission résignée.  Lorsque ces actions déterminées des classes dominées pour empêcher les régressions  prennent trop d’ampleur il  ne reste plus alors qu’à  réinstaller, par la force s’il le faut- ce dont témoigne bien l’histoire – un pouvoir menacé. Les démonstrations des forces policières y contribuent.

-Renoncement POLITIQUE pour un affrontement d'Etat à  Notre-Dame-des-Landes : un "manque de courage total" pour Bruno Retailleau
http://www.europe1.fr/politique/pas-devacuation-de-notre-dame-des-landes-un-manque-de-courage-total-pour-retailleau-2923511  

 

 

 

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