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5 juillet 2016 2 05 /07 /juillet /2016 05:41

PARIS (AFP) -

Les députés votent la pénalisation de la contestation de crimes contre l'humanité ,dont le génocide arménien

www.liberation.fr/01 juillet 2016

Emotion vendredi soir à l'Assemblée où les députés ont voté à l'unanimité un amendement gouvernemental inattendu au projet de loi "Égalité et citoyenneté", qui permettra de sanctionner la contestation des crimes contre l'humanité, dont le génocide arménien, au risque d'une nouvelle brouille avec Ankara.

Cet amendement, voté en première lecture, pénalise cette négation ou cette banalisation d'un an d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende. C'était une promesse de campagne de François Hollande, après la censure par le Conseil constitutionnel en février 2012 d'une précédente loi pénalisant la contestation du génocide arménien.

Ce texte "vaudra pour tous les crimes contre l'humanité, dont le génocide arménien", a assuré la secrétaire d'Etat à l'Egalité réelle Ericka Bareigts aux députés.

Les crimes concernés sont ceux de "génocide", les "autres crimes contre l?humanité", "les crimes de réduction en esclavage ou d'exploitation d?une personne réduite en esclavage" et "les crimes de guerre".

"Alors que seule la négation de la Shoah est aujourd?hui réprimée, ce texte permettra de sanctionner la contestation ou la banalisation de l?ensemble des crimes contre l?humanité ou des crimes de guerre, dès lors qu?ils auront été reconnus par une juridiction", a expliqué Mme Bareigts.

Mais cet amendement étend également cette sanction à la négation de ceux dont l'ancienneté exclut une reconnaissance par une juridiction mais sont reconnus historiquement, comme l'a fait le Parlement français avec une loi votée en 2001 reconnaisant le génocide arménien de 1915.

Pour la négation de ces derniers, une sanction interviendra dès lors que "leur contestation ou leur banalisation sera commise dans des conditions incitant à la haine ou à la violence".

C'est cette dernière partie du texte qui fait penser au gouvernement que la loi pourrait échapper cette fois-ci à la censure du Conseil constitutionnel.

En février 2012, le Conseil constitutionnel avait en effet censuré une loi votée à la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy, qui pénalisait un génocide reconnu par la loi française au motif de l'exercice de la liberté d'expression. Mais le Conseil avait estimé aussi qu'une loi pouvait réprimer les abus de l'exercice de la liberté d'expression, lorsque celle-ci incite à la haine ou à la violence -c'est le principe de la loi Gayssot de 1990 contre l'antisémitisme et la négation de la Shoah-.

A la suite de cette censure, François Hollande avait promis pendant sa campagne une nouvelle loi mais il ne s'était rien passé depuis 2012.

- "Moment historique" -

D'où l'émotion affichée par de nombreux députés militants de la cause arménienne, présents dans l'hémicycle ayant le sentiment de vivre un "moment historique".

"C'est un des plus beaux jours de ma carrière politique", a déclaré le député PS marseillais Henri Jibrayel, issu d'une famille rescapée du génocide.

"Je suis heureuse de voir que le raisonnement que je mène, avec les juristes et parlementaires depuis des années, était le bon", s'est félicitée la LR Valérie Boyer, députée de Marseille, où vit une forte communauté arménienne, qui avait défendu la proposition censurée en 2012.

"Ce texte n'est pas celui d'un peuple contre un autre, un peuple grandit en regardant son histoire", a lancé le PS Jean-Marc Germain à l'adresse de la Turquie.

La Turquie réfute le terme de génocide, même si elle reconnaît des massacres. Quelque 1,5 million d'Arméniens, hommes, femmes et enfants, ont été massacrés, selon les historiens, en Anatolie entre 1915 et 1917.

En 2012, le texte de Mme Boyer avait déclenché la colère des Turcs, leur Premier ministre (devenu depuis président) Recep Tayyip Erdogan y voyant "une montée de l'islamophobie et du racisme en Europe".

L'amendement du gouvernement a réécrit, avec son accord, un article du projet de loi initié en commission par le député guadeloupéen Victorien Lurel pour inclure l'esclavage dans la pénalisation de la contestation des crimes contre l 'humanité.

Le texte, qui doit maintenant être débattu au Sénat, permettra aussi aux associations de lutte contre l'esclavage ou de défense de la mémoire des esclaves de se constituer partie civile dans ces procédures.

Par Fabrice RANDOUX

© 2016 AFP

Le point de vue du gouvernement

Le projet de loi "Égalité et Citoyenneté" | Gouvernement.fr
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4 juillet 2016 1 04 /07 /juillet /2016 10:15

modèle de vœu pour Conseil municipal pour la reconnaissance des massacres du 8 mai 1945

Considérant que le 8 mai 1945, alors que le peuple français fêtait l’armistice, la paix retrouvée et la victoire sur le nazisme, commençaient en Algérie, à Sétif mais aussi à Guelma et Kherrata, des répressions sanglantes de manifestations nationalistes, indépendantistes et anti-colonialistes,

Considérant que ce 8 mai 1945, dans la rue principale de Sétif en Algérie, de nombreux Algériens s’étaient tout d’abord rassemblés pacifiquement pour fêter l’armistice mais aussi exiger la libération du dirigeant nationaliste Messali Hadj, et défendre « l’Algérie libre » pour laquelle ils avaient conçu un nouveau drapeau, symbole de leur lutte pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et pour l’indépendance,

Considérant que pendant plusieurs semaines, l’armée française et de nombreuses milices coloniales, composées de civils d’origine européenne, ont alors fait régner la terreur pour rétablir l’ordre colonial et défendre l’Algérie française,

Considérant que si le nombre des victimes algériennes, officiellement toutes françaises à l’époque mais qui ne l’étaient pas en fait et en droit, est difficile à établir, car encore sujet à débat soixante-dix ans plus tard, le gouvernement algérien avance le nombre de 45 000 morts et les travaux de la très grande majorité des historiens français attestent d’un bilan de dizaines de milliers de victimes arrêtées, torturées et exécutées sommairement,

Considérant que depuis soixante-dix ans, ces crimes de guerre commis par l’État et ceux qui le servaient, ne sont toujours pas reconnus officiellement, et font partie intégrante de l’histoire de France,

Considérant qu’une telle situation est inacceptable, car elle ajoute à ces massacres l’outrage aux victimes, à leurs descendants et à leurs proches,

Considérant que cette page de l’histoire est à fois française et algérienne et que la reconnaître contribuerait à consolider la fraternité entre le peuple Algérien et Français,

Considérant que reconnaître ce massacre commis par l’Etat français permettra à tous nos concitoyens, et notamment ceux issus de l’immigration algérienne, de se construire toujours plus fraternellement dans un avenir commun, celui de la communauté légale républicaine, où toutes les mémoires sont respectées,

Considérant qu’il ne serait être question d’oublier une partie des victimes de ces journées sanglantes et qu’il est important de rendre aussi hommage aux 102 victimes (selon les historiens) issues de la population dite « européennes », ayant perdus la vie au cours des émeutes provoquées par les massacres,

Considérant que le 27 février 2005 pour que, lors d’une visite à Sétif, M. Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France à Alger, a qualifié les « massacres du 8 mai 1945 » de « tragédie inexcusable » et que son successeur M. Bernard Bajolet a déclaré à Guelma en avril 2008 devant des étudiants algériens que « le temps de la dénégation des massacres perpétrés par la colonisation en Algérie est terminé »,

Considérant que M. François Hollande, lors de sa campagne électorale avait promis que l’Etat Français procéderait à la reconnaissance des crimes coloniaux,

Considérant que cette reconnaissance relève du devoir de mémoire, tout comme celle des massacres du 17 octobre 1961, qu’elle justifie la création d’un lieu du souvenir à la mémoire de celles et ceux qui furent assassinés, l’ouverture de toutes les archives relatives à ces terribles événements, et la reconnaissance par la République des crimes commis alors,

Le Conseil municipal émet le voeu que le Maire (comme ceux de Chalette sur Loing Nanterre, Ivry, Vitry, Givors qui ont repri le texte pour la reconnaissance des massacres du 8 mai 1945 en Algérie.voté à l’unanimité par le conseil municipal de Paris )

  • Interpelle le Président de la République M. François Hollande afin que l’Etat Français reconnaisse officiellement les massacres du 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata, et sur l’ouverture de toutes les archives relatives à ces terribles événements,

  • Soutien l'instauration d'un lieu du souvenir à Paris à la mémoire de celles et ceux qui furent assassinés, comme se fut le cas en 2001 pour le lieu de mémoire des victimes du 17 octobre 1961,

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7 juin 2016 2 07 /06 /juin /2016 13:29

La bataille de l’ADN

http://abonnes.lemonde.fr/medecine/article/2016/06/06/la-bataille-de-l-adn_4939348_1650718.html

Le Monde | 06.06.2016 à 18h34 | Par Laurent Alexandre (chirurgien urologue, président de DNAVision)

Le génome à lui seul n’explique ni ne justifie tout. La génétique a récemment révélé l’extrême complexité de notre biologie, qui se bâtit grâce à un mélange de déterminisme génétique, de réponse à l’environnement et de hasard. Loin des visions simplificatrices des années 2000 que le programme international de séquençage avait fait émerger, nous savons désormais que la plupart des maladies sont le fruit de multiples mutations génétiques associées aux spécificités individuelles de nos modes de vie.

L’environnement, qui modifie l’expression de nos gènes, explique que deux jumeaux vont ainsi diverger, même sur des caractéristiques pour lesquelles ils sont génétiquement identiques. On qualifie d’épigénétiques ces différences induites par l’environnement ; elles se traduisent par des modifications de protéines qui entourent la molécule d’ADN et/ou l’ajout de radicaux chimiques sur certaines portions de l’ADN.

Craig Venter, dont le rôle a été déterminant dans le premier séquençage complet de l’ADN humain, a créé en 2013 Human Longevity Inc (HLI), qui vise à séquencer des millions d’êtres humains. L’objectif de cette société est de corréler le génotype (ADN et épigénétique) avec le phénotype (notre état physique, médical et cognitif). Compte tenu de la complexité des interactions entre mutations, Craig Venter estime qu’il faudrait séquencer 10 millions d’individus pour identifier la quasi-totalité de la composante génétique des maladies et de nos caractéristiques phénotypiques. Son programme de séquençage devrait dépasser un million d’individus par an, pour lesquels il dispose d’un dossier médical électronique de grande qualité, grâce à un accord avec des assureurs santé. Le but avoué est de créer un logiciel permettant d’optimiser la prise en charge des patients et d’augmenter leur espérance de vie.

Redéfinition de l’humanité

A côté du programme de HLI, les programmes publics semblent dérisoires : Genomics England vise 100 000 séquençages d’ici à fin 2017, et le programme français de séquençage est perdu dans des dédales bureaucratiques. Les systèmes experts issus de ces programmes seront des monstres de puissance et d’intelligence. Chacun coûtera des milliards de dollars et s’auto­améliorera par l’analyse en temps réel de millions de dossiers de patients, ce qui fait craindre que les leaders californiens de l’économie numérique obtiennent le monopole de cette médecine du futur. Derrière ces programmes, la pression sera forte pour modifier les chromosomes en utilisant les technologies d’édition du génome (méganucléases, TALEN, nucléases à doigt de zinc et Crispr­-Cas9) qui permettent de changer la séquence ADN.

Mais les généticiens sont sur le point de franchir une étape encore plus troublante qui ouvre la perspective d’une redéfinition radicale de l’humanité. George Church est un généticien brillant et iconoclaste d’Harvard, imprégné de culture transhumaniste. Il a publié, avec vingt-quatre chercheurs et industriels, un article dans la grande revue Science, détaillant le projet Human Genome Project-Write. Ces leaders de la biologie de synthèse veulent créer « tabula rasa » en dix ans un génome humain entièrement nouveau permettant de générer des cellules humaines totalement inédites.

Cette technique pourrait aussi permettre la création de bébés sans aucun parent, ce qui a ému de nombreux scientifiques et théologiens, même si cette perspective est plus lointaine et n’est pas un objectif du groupe de Church. Il ne s’agirait même plus de concevoir des « bébés à la carte », mais de créer une nouvelle humanité : un débat sur l’encadrement des projets transhumanistes devient urgent.

Laurent Alexandre (chirurgien urologue, président de DNAVision)

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30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 07:46

https://www.academia.edu/25695276/Le_17_octobre_1961._Un_crime_dEtat_%C3%A0_Paris_extraits_Paris_La_Dispute_2001_sous_la_dir.de_O._Le_Cour_Grandmaison

A toutes et à tous,

ce lien permettant d’accéder à quelques textes de cet ouvrage collectif consacré aux massacres des Algériens lors des manifestations pacifiques du 17 octobre 1961. L’introduction, quelques contributions, une chronologie, une bibliographie et la table des matières.

Cordialement.

Les risques de guerre

Selon Raoul Marc Jennar

Pour ceux que la géopolitique intéresse et qui lisent l’anglais, je recommande ce livre majeur :

THE IMPROBABLE WAR, China, the United States & the Logic of Great Power Conflict

L’auteur, Christopher Coker, enseigne les relations internationales à la London School of Economics. Le livre est publié chez HURST, à Londres.

La thèse est la suivante : à force de considérer la guerre comme très improbable, les grandes puissances se comportent de manière telle qu’elles y conduisent de manière irréversible. S’appuyant sur les préludes de la Première Guerre Mondiale et rappelant, sources historiques à l’appui, combien la guerre paraissait alors improbable avant l’attentat de Sarajevo, il fournit de multiples informations et analyses sur les relations, aujourd’hui, entre la Chine et les USA et les risques de guerre qu’elles recèlent.

Même si l’auteur avoue un parti-pris favorable à l’égard des USA, qui seraient, selon lui, protégés contre eux-mêmes et le complexe militaro-industriel par leur démocratie interne, il reconnaît le danger de guerre que contient la volonté de la première grande puissance du monde à refuser l’évolution vers un monde multipolaire.

Je pourrais répliquer que, manifestement, comme le redoutait Dwight D. Eisenhower, la démocratie américaine a rarement freiné le complexe militaro-industriel. Mais c’est un autre débat.

rmj

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10 mai 2016 2 10 /05 /mai /2016 04:47

....Le président "à vie "rwandais Paul Kagame* avait mis fin au génocide.Crédité actuellement d'un bilan économique très élogieux ,mais contesté dans sa réforme constitutionnelle ,il accuse cependant Paris d'avoir soutenu les génocidaires,et appelle toujours la France à "clarifier sa position".

(*Note lecture de l'administration du Blog.Françafrique 2/3 : histoire secrète du téléphone rouge en plein génocide rwandais ...

)

Du 10 mai au 1er juillet 2016 se tiendra à la Cour d’assises de Paris, le procès de Tito Barahira et Octavien Ngenzi.

Chaque samedi matin vous trouverez la synthèse hebdomadaire de l’équipe de l’Association Française pour la promotion de la compétence universelle (AFPCU) qui suivra chaque jour sur place le procès, à la Cour d’assises de Paris. Cette synthèse abordera les thèmes abordés durant la semaine, mettra en avant un point de droit, partagera les impressions des membres de l’équipe sur les journées du procès. L’ AFPCU proposera par ailleurs une revue de presse et une rubrique interview des acteurs de la compétence universelle, pour enfin annoncer le programme de la semaine suivante.

Dans le souci de sa neutralité et de son indépendance d’action, l’AFPCU aura l’exigence de relater le procès dans le respect de chacune des parties au procès.

Suivez et partagez activement notre page sur Facebook et sur Twitter pour suivre au plus près ce procès, qui verra la participation de victimes « parties civiles » et non plus seulement par représentations d’associations.

J-1 : Électricité autour de la « clause de conscience » du Procureur Aurélia Devos à quelques jours du début du procès

Les accusés

Octavien Ngenzi : Le 2 juin 2010, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda a déposé une plainte au parquet de Mamoudzou (Mayotte) à l’encontre d’Octavien Ngenzi. Le 3 juin 2010, O. Ngenzi a été arrêté et mis en détention à Mayotte. Il a ensuite été transféré à la prison de Fleury-Mérogis, en région parisienne. C’est le Tribunal de grande instance de Paris qui a alors pris en charge l’instruction du dossier.

Le 27 avril 2011, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande d’extradition du Rwanda. Puis, trois ans plus tard, en mai 2014, le juge de la Cour de Première instance de Paris a ordonné un procès conjoint des inculpés Octavien Ngenzi et Tito Barahira.

Le 13 mai 2014, le procureur de la République à Paris a demandé que l’affaire des deux suspects concernant leur engagement présumé dans le génocide rwandais de 1994 soit renvoyée à la Cour d’assises. Le 30 mai 2014, les juges ont mis O. Ngenzi et T. Barahira en accusation. Ils sont accusés de génocide et de crimes contre l’humanité, suite aux observations du Procureur. Un rejet partiel a été demandé par O.Ngenzi pour l’incitation à commettre un génocide. Au début du mois de juin 2014, O. Ngenzi a fait appel contre l’accusation. Le 28 janvier 2015, la Cour de cassation de Paris a définitivement confirmé l’accusation contre Ngenzi et Barahira pour génocide et crimes contre l’humanité.

Il sera représenté par Me François Mathé.

Tito Barahira : Suite à une plainte du CPCR, Tito Barahira a été arrêté le 3 avril 2013 dans le Sud-Ouest de la France, à Toulouse, en vertu d’un mandat d’arrêt émis au Rwanda. Le 16 avril 2013, Tito Barahira a comparu devant la Chambre de l’Instruction du TGI de Paris aux fins de demande de remise en liberté. Il a alors été décidé que Barahira serait maintenu en détention. Tito Barahira a déclaré que toutes les accusations contre lui étaient fabriquées et qu’il n’avait jamais participé aux actes qui lui étaient reprochés.

Le 30 mai 2014, les juges ont rendu une ordonnance de mise en accusation concernant Barahira et Ngenzi. Ils sont accusés de génocide et de crimes contre l’humanité à la suite des observations du Procureur. Un non-lieu partiel a alors été demandé concernant l’entente en vue de commettre le génocide. Au début du mois de juin 2014, Barahira a fait appel contre l’accusation. Le 28 janvier 2015, la Cour de cassation de Paris a définitivement confirmé l’accusation contre Barahira et Ngenzi pour génocide et crimes contre l’humanité.

Il sera représenté par Me Phillippe Meilhac;

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15 avril 2016 5 15 /04 /avril /2016 07:05
Ex-Yougoslavie : Florence Hartmann l'ancienne porte-parole du Tribunal a été incarcérée...

Autre article :après la guerre

À propos de : Isabelle Delpla, La Justice des gens. Enquêtes dans la Bosnie des nouvelles après-guerres, Presses universitaires de Rennes

par Emmanuel Pasquier , le 16 avril 2015

Télécharger l'article

Comment rendre justice aux victimes des conflits qui ont déchiré l’ex-Yougoslavie ? Comment panser les innombrables traumatismes engendrés par le nettoyage ethnique ? I. Delpla mêle philosophie, anthropologie et sociologie pour répondre à ces questions.

Recensé : Isabelle Delpla, La Justice des gens. Enquêtes dans la Bosnie des nouvelles après-guerres, Presses universitaires de Rennes, collection « Res publica », Rennes, 2014. 530 p., 28 €.

Le livre d’Isabelle Delpla a quelque chose de Moby Dick. Livre-bibliothèque, livre-monstre, incorporant en lui plusieurs livres et plusieurs langages : anthropologie, sociologie, philosophie, témoignages, minutes de procès, récits, photographies. Comme si l’on n’en finissait pas de faire varier les approches pour saisir l’objet-monstre qui se dérobe à ses poursuivants : la Bosnie après la guerre.

La « justice des gens », puisque c’est d’elle qu’il s’agit, c’est d’abord là qu’elle se joue : dans une écriture qui ne veut transiger ni sur la nuance ni sur l’exactitude, pour rendre justice aux « gens », aux vrais gens et aux vrais drames. À tous les informateurs qui ont permis que le livre soit écrit, et que le livre va laisser sur ce qui n’est pas pour eux un « terrain », mais leurs vies. Écrire sans trahir, c’est louvoyer entre deux écueils possibles : celui du pathos de l’identification et celui de la froide analyse surplombante. Le souci de scientificité fait ici corps avec celui du respect de ceux dont on parle.

Le livre est divisé en quatre grandes parties, qui travaillent chacune une face différente de ce que l’on peut appeler « justice internationale », qui ne se réduit pas à la justice pénale :
1. La réception de l’aide humanitaire.
2. Le retour des réfugiés et des personnes déplacées.
3. Les associations de victimes.
4. Le Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (TPIY).

La réception de l’aide humanitaire

Vue du terrain, l’aide humanitaire ne ressemble pas à ses idéaux. Amertume et théories du complot semblent dominer la perception de ceux qui seraient censés en être les bénéficiaires reconnaissants. L’aide humanitaire n’est-elle pas pourtant l’expression même d’une éthique internationale ? « Pour les personnes rencontrées en Bosnie, la morale n’est pas le cadre de référence premier de la description de cette aide. Que cette dernière relève d’intérêts politiques et économiques y apparaît comme une évidence. » (p. 75). D’abord parce que la référence morale peut apparaître comme inappropriée pour parler d’institutions et non d’individus. Ensuite parce qu’elle est humiliante à recevoir et qu’elle représente « une chute dans l’échelle de l’humanité » : « Les humanitaires ont fait leur première mission en Afrique, qui est moins civilisée. Ils approchaient les gens comme des Bushmen ; il fallait faire ses preuves pour être proches des expats. Ils en savaient peu sur la Bosnie, ne sachant pas qu’elle est civilisée, que les gens sont éduqués et en savaient parfois plus que les expats. » (p. 61, témoignage d’un ancien employé local de MSF à Sarajevo).

La question philosophique qui domine cette première partie est celle de la pertinence de toute référence morale pour parler de l’aide humanitaire. « Faut-il abandonner toute perspective éthique sur l’humanitaire ? » (p. 71). Le propos d’Isabelle Delpla est de faire apparaître que, au contraire, même si c’est en creux et par la négative, la référence morale – dans le langage de la Justice, mais aussi dans celui d’une moralité ordinaire – est bel et bien persistante : c’est elle qui rend possible la critique de l’aide humanitaire.

Si l’on élargit le propos, de l’aide humanitaire proprement dite à la « situation humanitaire » (p. 97), c’est-à-dire aux relations entre sauveteurs potentiels et victimes, alors la référence à la morale devient patente. La chute de Srebrenica en est le modèle même, dont l’histoire de Hasan Nuhanovic offre un raccourci tragique :

« Le parcours d’Hasan est devenu un symbole parmi les Bosniaques : employé de l’ONU à Srebrenica, il a incité ses parents et son jeune frère à venir chercher refuge sur la base de l’ONU à Potocari au lieu de fuir dans les bois, espérant une protection des casques bleus. Le colonel Karremens, commandant du Dutchbat [bataillon néerlandais des casques bleus] a refusé toute protection à ce frère et lui a intimé l’ordre de rejoindre les forces serbes qui réclamaient que tous les hommes réfugiés sur la base leur soient livrés. Le père, qui pouvait profiter de son statut de négociateur pour échapper au sort des autres hommes, et la mère d’Hasan n’ont pas voulu laisser leur jeune fils partir seul. Ils l’ont accompagné. Aucun n’a survécu. Hasan, en quelques minutes, a vu disparaître sa famille. » (p. 98).

Ce fut le cas pour 8000 hommes, lors de cet abandon de l’enclave de Srebrenica par l’ONU aux forces serbes. Ce traumatisme central dans la conscience bosnienne est l’occasion d’une belle réflexion sur le sens moral de cet « écart de points de vue » radical. Srebrenica nous confronte au « gouffre moral » irréductible qui sépare les rapports justificatifs de l’ONU et les accusations bosniaques contre l’inaction des casques bleus. C’est précisément dans ce gouffre que se manifeste la persistance de l’exigence morale.

Les voies du retour

Le second grand volet de l’étude est consacré au retour après-guerre des populations déplacées. Retour qui, dans sa première phase, entre 1996 et 2000 a concerné plus d’un million de Bosniens. Confrontation des returnees et des stayees, qui met en œuvre le dilemme suivant : « Après la guerre, les organisations internationales ont souvent eu à choisir entre une consolidation des effets du nettoyage ethnique, en favorisant l’installation des réfugiés à l’étranger ou ailleurs en Bosnie, et une tentative de contrer les effets du nettoyage ethnique en réinstallant les réfugiés chez eux, dans des lieux dangereux, inhospitaliers, ou seulement désespérants. » (p. 149).

La question philosophique est ici : qu’est-ce que penser le retour ? D’un côté, le mythe du retour à une identité originelle, qui se voudrait sans perte dans son essence ; de l’autre côté, une vision post-moderne qui entérine peut-être trop vite que le « retour » est, de toutes façons, toujours illusoire – ce qui le rend impensable.

Il faut d’abord prendre acte qu’il y a retour et retour. Revenir à Prijedor n’est pas comme revenir à Srebrenica. Le chapitre 6 explore les termes de cette différence – les Bosniaques de Prijedor voient dans leur retour la manifestation de la justice, tandis que ceux de Srebrenica la trouvent dans la revendication de ne pas revenir, au moins avant que les criminels de guerre serbes aient été jugés. De même, revenir dans une région où sa nation (bosniaque, serbe ou croate) est majoritaire, n’est pas aussi délicat que de revenir où l’on est minoritaire (minority return). « Le retour des Serbes dans la banlieue de Sarajevo a supposé l’expulsion des réfugiés bosniaques de Srebrenica, dont le retour chez eux impliquait de déloger les Serbes d’Hadzici. (…) Le processus s’est apparenté à un vaste jeu de chaises musicales. » (p. 156). Le sens du « retour » varie selon les géographies. De même, le retour des vivants et le retour des morts ne s’entendent pas de la même manière,. Il varie selon les sexes aussi : « Le sort des femmes de Srebrenica, restées seules ou avec des enfants, censées rentrer dans des villages presque abandonnés ou dans le voisinage des assassins de leurs hommes, sans protection ni ressource, est considéré comme particulièrement difficile. » (p. 157).

L’enquête montre que, si le OHR (Office du Haut Représentant) faisait de ce retour un droit fondamental, et une manière d’affirmer que les accords de Dayton n’entérinaient pas les partitions ethniques, mais visaient à rétablir une multi-ethnicité, le retour n’est souvent, pour les returnees, qu’une étape transitoire. Le retour vécu est éloigné du « retour » comme catégorie statistique, qui tend à en figer la signification.

« Il ne suffisait pas de ramener les returnees chez eux pour qu’ils y restent : …Des milliers sont assurément rentrés chez eux, tels Ulysse, pour retrouver la patrie de leurs ancêtres, le lieu où ils étaient nés, pour y mourir en paix. Mais pour bien d’autres, le retour n’a été qu’un moment dans un parcours qui pouvait conduire à repartir ou à mener des vies éclatées, travaillant à un endroit, habitant à un autre, récupérant un appartement dans une entité et scolarisant ses enfants dans l’autre (…) Le retour n’est pas un point d’arrêt, mais un processus et un mouvement dans des trajectoires de vie dynamiques et complexes. » (p. 164-165).

D’où la « déconvenue des ONG et des OI qui ont vu les Bosniens revendre leurs maisons fraîchement reconstruites, après avoir récupéré leurs droit de propriété » (p. 228). Le point de vue internationaliste tendrait à oublier que la vie continue.

Si un certain idéal cosmopolitique peut espérer voir dans les institutions internationales le moteur de la refondation politique, le retour donne en fait lieu à ce que Isabelle Delpla appelle une « expérience de pensée post-post-moderne ». Le redoublement du « post » fait signe vers un renversement : celui-ci n’est pas un retour à une position nationaliste traditionnelle, mais plutôt un dépassement de certaines illusions du cosmopolitisme naïf. Il s’agit de la place de l’État dans la société internationale, et de la réaffirmation de son importance « après un passage par l’étranger et l’international » (p. 217).

« Pour qui est passé par les avanies de la vie de réfugié ou a eu affaire au monde cosmopolitique des organisations internationales et au dysfonctionnement des pays placés sous administration internationale comme la Bosnie ou le Kosovo, le cosmopolitisme post-étatique a perdu son romantisme. (…) Un État garant de certains droits et le cadre de vie d’une société bien ordonnée apparaissent comme éminemment désirables. Le retour représente alors une expérience de pensée post-postmoderne cherchant à retrouver une forme d’État ou de refondation d’une société juste, ayant dépassé les illusions solipsistes de la constitution autocentrée de l’État, et ayant fait l’expérience du passage par l’extériorité et par la nécessité de garanties internationales. La réflexion à son propos peut symboliser une forme de retour cosmopolitique à l’État. » (p. 218).

On entend l’oxymore : « retour cosmopolitique à l’État » : retour à l’État après sa négation dialectique par l’international. Donc pas l’État du XIXe siècle, pensé à l’aune de la nation, de la race, de la souveraineté close sur elle-même. Mais l’État qui a incorporé la médiation de l’international entre lui et lui-même. Le retour nous révèle ainsi qu’ « une société politique ne se construit que dans un contexte international et par rapport à des structures sociales antérieures. » (p. 233).

On saisit là l’un des thèmes centraux de l’analyse, à savoir que « le retour apparaît comme un laboratoire social de reconstruction de la société bosnienne et, plus largement, comme une expérience de pensée de (re)fondation des sociétés politiques d’un point de vue cosmopolitique » (p. 151). L’après-guerre ne se joue pas seulement dans l’entre-soi des Bosniens et des anciens ennemis, il passe par le détour par le monde extérieur. Mais, réciproquement, il n’y a de cosmopolitisme véritable que ré-ancré dans des identités locales.

Les associations de victimes

Toute la réorganisation de la société d’après-guerre est engagée dans ce processus d’aide aux victimes, qu’il s’agisse d’aide financière, médicale, scolaire, judiciaire, sécuritaire… L’aide aux victimes présente une sorte de reflet global de la société, parce qu’elle se joue à tous les niveaux de la vie quotidienne.

Il faut d’abord identifier qui sont les « victimes », c’est-à-dire préciser la multiplicité des statuts que peut recouvrir ce terme, car « la condition de victime est plurielle » (p. 238), et la quête d’un statut, à la fois au niveau international et au niveau national, est la préoccupation première des associations de victimes. Il faut ainsi distinguer les militaires morts pendant la guerre ; les non-combattants morts pendant la guerre – et notamment les victimes de Srebrenica ; les blessés et invalides ; les anciens détenus des camps ; les disparus et les familles de disparus. Cette pluralité des types de victimes entraîne des tensions entre les diverses associations qui les représentent, dont les intérêts sont a priori convergents, mais qui peuvent aussi entrer dans des rapports de concurrence pour la reconnaissance, ou simplement diverger dans la nature de leurs réclamations, selon qu’elles visent d’abord la justice pénale (contre les criminels de guerre ou contre la Serbie elle-même), le dédommagement financier, ou tout simplement la vérité.

Isabelle Delpla met en avant la spécificité des associations de familles de disparus, d’abord préoccupées de vérité. Celles-ci font apparaître que les victimes ne sont pas seulement les victimes directes, mais qu’il existe aussi des « victimes relationnelles » (p. 44) – notion originale dont Isabelle Delpla souligne qu’elle est souvent dans l’angle mort des études sur les victimes : tous ceux qui survivent en portant le poids de la disparition de leurs proches, allant parfois jusqu’à s’épuiser à mort dans leur recherche, comme le personnage emblématique de ce père cherchant son fils, dans le film Gori Vatra (« Au feu ») de Pjer Zalika (2003) (p. 263).

La réflexion sur cette diversité des destins, des statuts et des visées dans l’après-guerre permet de déjouer un certain nombre de clichés à propos des associations de victimes. Paradoxalement, la concurrence victimaire, course à la catégorie de « victime légitime » (p. 301), doit aussi être vue comme une manifestation d’un retour à la vie de la société des survivants, entraînant des effets comme la constitution d’un savoir objectivé autour des événements de la guerre. Il s’agit aussi de marquer la distance entre la représentation internationale d’une « victime par excellence », symbole d’une commune humanité traumatisée et ayant du mal à s’exprimer, et des victimes qui, indéfectiblement, reflètent les divisions sociales et régionales de la Bosnie. « Les procès du TPIY, dit Isabelle Delpla, ne surmontent pas les barrières divisant les Bosniens en nations, en régions ou en classes sociales, qu’elles soient antérieures ou consécutives à la guerre. Ces barrières sont davantage sociales que psychologiques. » (p. 311). Manière de dire que, au-delà de la spécificité dramatique de leur statut, les victimes sont aussi des vivants comme les autres, dans lesquelles les complexités de la société bosniaque continuent de s’exprimer.

La réception de la justice pénale internationale

Comment s’articule la justice pénale internationale telle qu’elle est mise en œuvre au TPIY et cette « justice des gens » dont Isabelle Delpla essaye de cerner les contours ? Que fait la justice internationale concrètement ? Dans quelle mesure parvient-elle à rendre justice aux gens ? Dans quelle mesure est-elle un artifice, et dans quelle mesure participe-t-elle à un processus de reconstruction et de réconciliation ? La justice des gens, dans le fond, sera l’aune à laquelle sera jugée la justice pénale internationale.

Analysant le travail de sélection des témoignages, d’enquête, d’inculpation et de jugement, Isabelle Delpla reste fidèle à ce que l’on pourrait appeler, dans un écho à Claude Lefort, une heuristique de la complication : l’analyse se déploie dans un double mouvement de dénonciation de préjugés simplistes, et de tentative, en retour, de retrouver le sens commun. La justice n’est pas là où l’on croit, mais il y a justice malgré tout, peut-on dire pour résumer. Il faut creuser l’écart entre la reconstitution judiciaire et les témoignages, de même qu’il faut analyser les divergences entre différents types de témoignage. Mais cela ne doit pas empêcher de chercher où toutes ces narrations se rejoignent.

Le premier de ces préjugés porte sur le caractère individuel des poursuites. Les tribunaux pénaux internationaux, à la suite du Tribunal de Nuremberg, jugent des individus en tant que criminels de guerre. Par là, ils évitent de poser la question d’une responsabilité collective – évitant ainsi ce que l’on pourrait appeler le syndrome du Traité de Versailles, c’est-à-dire une culpabilisation collective entraînant des demandes de réparations pénalisant un peuple entier. « Ce qui est présenté comme une justice individuelle est de facto un moyen d’exonération. Ce type de justice vise à produire un noble mensonge, « le mythe d’une innocence collective » permettant la reprise d’une vie normale pour le plus grand nombre » (p. 333). Mais cette individualisation ne trompe personne, elle ne gomme pas l’idée générale de la responsabilité collective. Le TPIY se retrouve ainsi en situation de rendre une forme de justice métonymique (par synecdoque), où l’individu vaudra pour le tout, dans l’impossibilité de juger véritablement chacun des crimes.

Si subsiste le sentiment de déni de justice et d’impunité, « divorce entre « vérité reconnue » au TPIY et « vérité connue » » (p. 364), il n’en reste pas moins que le TPIY, en particulier de la part des Bosniaques, suscite une attente de justice. Il faut analyser celle-ci à des échelles différentes, entre le niveau étatique (saisi dans le procès Plavsic) et le niveau municipal. Isabelle Delpla reprend à ce sujet ce qu’elle appelle son « hypothèse municipale », déjà mise en œuvre au chapitre précédent : les attentes et les jugements sur le TPIY sont très variables en fonction des différents groupes, en particulier en fonction des différentes municipalités. Ces différences vont être saisies dans une comparaison entre les villes de Prijedor, Sanski Most et Kljuc. Les victimes « désignent d’abord comme criminels ceux qui sont responsables de crimes dans leur propre municipalité et ne désignent pas les mêmes individus d’une municipalité à l’autre. L’impunité est dénoncée avec plus de force à ce niveau et non à ceux de l’État, de la nation (Serbes ou Musulmans). » (p. 341). Cette hypothèse municipale est essentielle pour déjouer les simplifications, mais aussi pour rendre compte du langage commun qui unit, envers et contre tout, les Serbes et les Bosniaques. « Lorsque je lui dis que, malgré qu’il en ait, les Serbes et les Bosniaques partageaient un langage et un monde de références communes qui étaient ceux de la municipalité, il sourit et reconnut que c’était juste. » (p. 421).

Ce tropisme municipal « marque les limites d’une unification nationale et étatique (…) et du récit universaliste d’une communauté d’humanité » (p. 342). Il permet d’analyser l’écart entre le TPIY et d’autres tribunaux internationaux, le TMI de Nuremberg en particulier, et les Commissions Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud.

Le décalage narratif sur la justice est aussi à saisir du côté des coupables. Isabelle Delpla se base sur un certain nombre d’entretiens avec des condamnés ayant plaidé coupable au TPIY. Les rouages de la machine judiciaire se montrent ici dans leur crudité. Le plaider coupable apparaît comme une stratégie, dont le rapport avec la culpabilité effective est chargé d’arbitraire. « Damir Dosen (qui a plaidé coupable pour des crimes dans le camp de Keraterm) décrit la procédure comme un marchandage sordide entre avocats et procureurs négociant une réduction de peine en contrepartie d’une réduction des coûts du procès, en renonçant au coût élevé de la comparution de nouveaux témoins à décharge. » (p. 362).

Une place particulière est faite, dans le livre, aux acteurs particuliers et souvent négligés que sont les témoins de la défense, avec toutes les apories que suscite cette délicate position : « Si le témoin est proche de l’organisation des crimes, plus il est informé, plus il encourt le risque d’être inculpé. (…) Mais moins le témoin a vu, moins il est utile pour la défense. » (p. 430).

Si la diversité des points de vue interdit d’avoir une narration lisse sur un TPIY qui peine à être l’instrument idéal de la justice par la vérité, la question de la réconciliation reste cependant posée. « Le paradoxe est le suivant : alors que la thématique philosophique ou historique de la réconciliation par le pardon tend à l’opposer à la justice pénale, alors que l’usage du terme n’obéit pas à des règles mais au mieux à des conditions de félicité, c’est en termes de réconciliation que cette justice, imposant des règles de droit, se trouve évaluée ou légitimée. » (p. 353). Et, « par un détour inattendu, c’est dans le discours des criminels condamnés que le TPIY offre un modèle de réconciliation : la prison dorée de Scheveningen, reconstitution d’une « petite Yougoslavie » (mala Yugoslavia), où les inculpés de toutes les nations vivent en bonne entente. » (p. 371). Paradoxe de la prison du TPIY, où les criminels présumés des différentes nations renouent une solidarité dans leur comparution commune devant la Justice internationale.

Au terme de tout ce travail de déconstruction, on pourrait être surpris du caractère relativement optimiste de la phrase qui vient conclure le livre : « La justice internationale peut être la justice des gens. » (p. 495). Isabelle Delpla nous incite à nous garder de deux écueils qui figeraient à la fois les positions intellectuelles et, indissociablement, les parcours de vie individuels : d’un côté l’illusion que Justice a été rendue et que la page est tournée, c’est-à-dire que l’après-guerre est accompli ; de l’autre, l’idée que tout n’est qu’artifice et manipulation et que la paix n’est que la continuation de la guerre par d’autres moyens. L’une et l’autre positions sont intenables, à la fois au regard des faits, et en tant que postures existentielles. L’après-guerre est comme le deuil, dont le paradoxe est qu’il ne s’accomplit que dans la reconnaissance de son impossibilité. La poursuite de la vie se fait dans un travail qui remet en circulation l’intérieur et l’extérieur – et c’est comme un élément dans ce travail de reconstruction que le livre d’Isabelle Delpla vient s’inscrire.

Pour citer cet article :

Emmanuel Pasquier, « Après la guerre », La Vie des idées , 16 avril 2015. ISSN : 2105-3030. URL : http://www.laviedesidees.fr/Apres-la-guerre.html

Tous les article sur Florence Hartmann

TPIY : Florence Hartmann raconte ses terribles conditions de détention

Le Point - ‎31 mars 2016‎

L'ex-porte-parole du procureur du TPIY et ancienne reporter avait été arrêtée jeudi dernier en marge de la condamnation de Radovan Karadzic. Source AFP. Publié le 30/03/2016 à 19:49 | Le Point.fr. Florence Hartmann durant son arrestation. © ROBIN VAN ...

Florence Hartmann : "Oui, j'ai violé la confidentialité, utilisée pour cacher quelque chose d'illégal"

France Info - ‎30 mars 2016‎

Au lendemain de sa libération, Florence Hartmann s'est exprimée au micro de France info. Elle s'est dit sonnée, épuisée, soulagée, mais plus combattive que jamais : "Ce n'est pas le TPIY (Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie) [qui est en ...

Lumière 24h/24h, un repas par jour : Florence Hartmann raconte sa détention à La Haye

L'Obs - ‎30 mars 2016‎

L'ex-porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, devenue lanceuse d'alerte, rapporte des conditions de détention "extrêmement strictes". L'Obs Publié le 30 mars 2016 à 12h13. Partager ce contenu. "Complètement sonnée" mais ...

Florence Hartmann libérée après cinq jours passés dans la prison de l'ONU

Le Monde - ‎30 mars 2016‎

Dans cette photo d'archive du 13 novembre 2007, Florence Hartmann présente son livre "Paix et châtiment", qui lui a valu une condamnation pour "outrage" à La Haye. Hidajet Delic / AP. Après cinq jours en détention, l'ancienne porte-parole de la ...

La journaliste française Florence Hartmann libérée par le TPI

Boursier.com - ‎29 mars 2016‎

LA HAYE (Reuters) - La journaliste française Florence Hartmann, ancienne porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), a bénéficié mardi d'une libération anticipée après avoir passé cinq jours en détention pour outrage à la ...

La Haye : l'ex-porte-parole du TPIY Florence Hartmann est sortie de prison

France Info - ‎29 mars 2016‎

Le mouvement de soutien a payé. Florence Hartmann a été libérée ce lundi après avoir passé plus de 5 jours en prison pour avoir révélé dans un livre deux décisions confidentielles du tribunal pénal international. L'ancienne porte-parole du Tribunal ...

Tribunal pénal international : émotion après l'arrestation de Florence Hartmann

Le Parisien - ‎29 mars 2016‎

Comité de soutien, pétitions... Le sort de Florence Hartmann continue de susciter émoi et colère. L'ancienne correspondante du « Monde » dans les Balkans a été arrêtée jeudi à La Haye par des gardes du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie ...

Incarcérée depuis jeudi à La Haye, la Française Florence Hartmann a été libérée

L'Express - ‎29 mars 2016‎

Arrêtée jeudi sur la pelouse du tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, la lanceuse d'alerte et ex-journaliste Florence Hartmann a été relâchée ce mardi, après six jours d'incarcération. Elle a passé ces quelques jours de prison aux côtés ...

Florence Hartmann : "J'ai été arrêtée dans des conditions brutales, mais ça me donne plus d'énergie"

RTL.fr - ‎29 mars 2016‎

REPLAY - REPLAY / DOCUMENT RTL - La journaliste française, ancienne porte-parole du Tribunal pénal international, avait été arrêtée le 24 mars à La Haye avant d'être libérée mardi 29 mars. La page de l'émission : L'Homme du jour. Florence Hartmann ...

TPIY: Florence Hartmann libérée, après de la prison avec des criminels de guerre

RTBF - ‎29 mars 2016‎

Elle a longtemps représenté la traque des hommes suspectés des pires crimes commis dans les Balkans: après avoir passé plusieurs jours dans la même prison que les criminels de guerre qu'elle a dénoncés, la Française Florence Hartmann a été libérée ...

TPIY : "Sonnée et épuisée", Florence Hartmann a été libérée

Le Point - ‎29 mars 2016‎

L'ancienne porte-parole du procureur du TPIY, venue assister au jugement prononcé contre Radovan Karadzic, avait été arrêtée jeudi pour outrage. Source AFP. Publié le 29/03/2016 à 16:54 - Modifié le 29/03/2016 à 19:51 | Le Point.fr. Florence Hartmann ...

TPIY : répit pour Florence Hartmann

Libération - ‎29 mars 2016‎

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) a décidé la mise en liberté provisoire «aussi vite que possible» de Florence Hartmann.La Française avait été arrêtée jeudi alors qu'elle était venue assister au jugement prononcé contre l'ex ...

Florence Hartmann, ancienne porte-parole du TPIY, libérée

Le Monde - ‎29 mars 2016‎

La Française Florence Hartmann, ancienne porte-parole de la procureuse du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, présente son livre « Paix et châtiment », à Sarajevo, en novembre »2007. Hidajet Delic / AP ...

La journaliste française Florence Hartmann libérée

Le Figaro - ‎29 mars 2016‎

Florence Hartmann a été arrêtée jeudi à La Haye. Crédits photo : ROBIN VAN LONKHUIJSEN/AFP. L'ancienne porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie était emprisonnée depuis cinq jours. Après publication de décisions ...

Tribunal pénal international : l'ex-porte-parole Florence Hartmann libérée

Le Parisien - ‎29 mars 2016‎

La Haye (Pays-Bas), jeudi. Florence Hartmann avait été arrêtée par les gardes du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie alors qu'elle attendait le jugement de Radovan Karadzic. (AFP/Robin van Lonkhuijsen.) ...

L'ancienne porte-parole du TPIY Florence Hartmann sera libérée dans la journée

lalibre.be - ‎29 mars 2016‎

L'ancienne porte-parole du procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), la Française Florence Hartmann, sera libérée dans la journée, a indiqué mardi son avocat, soulignant que Madame Hartmann "se réjouit" de la nouvelle.

L'ancienne porte-parole du TPIY a été libérée

24heures.ch - ‎29 mars 2016‎

Pays-BasFlorence Hartmann avait été arrêtée jeudi pour outrage à la Cour, après avoir publié dans un livre des décisions confidentielles du tribunal. Florence Hartmann et le livre qui lui a valu de passer le week-end de Pâques derrière les barreaux ...

Florence Hartmann, détenue avec ceux qu'elle a aidé à mettre en prison, enfin libérée

Marianne - ‎29 mars 2016‎

La journaliste et ancienne porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), Florence Hartmann, a été arrêtée jeudi 24 mars pour une condamnation datant de 2009. Elle a été détenue dans une cellule du TPIY avant d'être libérée ...

TPIY:Florence Hartmann, les raisons d'une arrestation

Francetv info - ‎29 mars 2016‎

GEOPOLIS -. Florence Hartmann, ancienne porte-parole de la procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) a été arrêtée et incarcérée le 25 mars 2016 à La Haye. Le jour même et sur les lieux mêmes où Radovan Karadzic était ...

Détention de Florence Hartmann : pourquoi le Tribunal pénal international n'en sort pas grandi

L'Obs - ‎29 mars 2016‎

Détention de Florence Hartmann : pourquoi le Tribunal pénal international n' Florence Hartmann lors de son arrestation à La Haye, le 24 mars. (Robin van Lonkhuijsen / ANP / AFP) ...

Florence Hartmann à sa sortie de prison : "sonnée" et "immensément reconnaissante"

France Info - ‎29 mars 2016‎

Jointe par France Info à sa sortie de prison à la Haye, Florence Hartmann, ancienne porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), s'est dite "complètement sonnée": "Il faut que je reprenne mes esprits". La Française confie ...

L'ancienne porte-parole du TPIY Florence Hartmann a été libérée

FRANCE 24 - ‎29 mars 2016‎

Détenue depuis le 24 mars à La Haye, l'ex-porte-parole du procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, Florence Hartmann, a été libérée mardi. Le TPIY avait confirmé cette mise en liberté provisoire plus tôt dans la journée. L ...

Florence Hartmann, l'ancienne porte-parole du Tribunal pénal international, est libre, annonce son avocat

RTL.fr - ‎29 mars 2016‎

Florence Hartmann a été arrêtée à La Haye jeudi 24 mars. La journaliste française venait entendre le verdict de Radovan Karadzic, l'ancien dirigeant des Serbes de Bosnie condamné à 40 ans de prison. Florence Hartmann, lors de son arrestation à La Haye, ...

Pays-Bas: Florence Hartmann, l'ex-porte-parole du TPIY, remise en liberté

20minutes.fr - ‎29 mars 2016‎

20 Minutes avec AFP. Publié le 29.03.2016 à 17:22; Mis à jour le 29.03.2016 à 17:22. « Elle est en train de préparer ses affaires ». L'ancienne porte-parole du procureur du TPIY, la Française Florence Hartmann, a été libérée ce mardi, a déclaré son ...

TPIY, Florence Hartmann enfin libérée

La Croix - ‎29 mars 2016‎

La journaliste et ancienne porte-parole du procureur de tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a été libérée mardi 29 mars dans l'après-midi après cinq jours de détention à La Haye, pour outrage au tribunal. La journaliste française et ...

L'ancienne porte-parole du TPIY sera libérée mardi

Le Matin Online - ‎29 mars 2016‎

Florence Hartmann avait été arrêtée jeudi pour outrage à la Cour, après avoir publié dans un livre des décisions confidentielles du tribunal. Mis à jour le 29.03.2016 1 Commentaire · Imprimer. Florence Hartmann et le livre qui lui a valu de passer le ...

Florence Hartmann va être libérée

Libération - ‎29 mars 2016‎

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a finalement décidé la mise en liberté provisoire «aussi vite que possible» de Florence Hartmann. «Elle est en train de préparer ses affaires», a affirmé son avocat, Guénaël Mettraux. La Française ...

Détention de la Française Florence Hartmann à La Haye : un "acharnement étrange"

France Info - ‎29 mars 2016‎

Des organisations de défense des droits de l'homme, des militants et des journalistes ont apporté leur soutien à l'ancienne porte-parole du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, la Française Florence Hartmann. Elle a été arrêtée jeudi à ...

Florence Hartmann, au-delà de l'indignation

Rue89 - ‎29 mars 2016‎

Comme toujours, l'indignation journalistique unanime, après l'arrestation de Florence Hartmann par des gardes du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, donne envie d'y regarder de plus près. En défendant l'ex-journaliste du Monde, puis ...

Florence Hartmann incarcérée à La Haye : un "règlement de compte" selon son avocat

FRANCE 24 - ‎29 mars 2016‎

Maître Bourdon, l'avocat de Florence Hartmann, l'ex porte-parole du procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie arrêtée jeudi, dénonce un "règlement de compte". Sa cliente est actuellement détenue dans la prison de Scheveningen.

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9 avril 2016 6 09 /04 /avril /2016 08:21

Déclassification des archives sur le rôle de la France au Rwanda: les petites annonces ne suffisent pas !

7 avril 2016 par Survie

GénocideUneRwanda, il y a 20 ans

Il y a un an, le 7 avril 2015, l’Élysée annonçait la déclassification d’archives de la présidence de la République concernant le Rwanda pour la période 1990 à 1995. L’association Survie, qui s’était mobilisée durant toute l’année précédente pour l’ouverture des archives et avait remis le 28 juin 2014 au ministre de la Défense une pétition à ce sujet signée par plus de 7000 personnes [1], avait rapidement constaté que le compte n’y était pas. Il s’agissait en effet de seulement 83 documents, la majorité déjà connus, alors que des milliers d’archives restent inaccessibles aux chercheurs et à la justice, notamment les documents militaires [2].

Depuis un an, seul un nouveau document a été rendu accessible, et par erreur puisqu’il est toujours classifié « Secret » : divulgué aujourd’hui par Survie [3], il suggère que les opérations des forces spéciales françaises menées à partir de 1993 ont été pilotées hors de tout circuit officiel, par les conseillers militaires du président Mitterrand.

Pour Fabrice Tarrit, président de Survie, « Depuis l’annonce tonitruante de l’année dernière, la société civile n’a eu accès qu’à un seul nouveau document, et par erreur puisqu’il n’est pas déclassifié. C’est une nouvelle illustration de l’arbitraire entourant le secret défense, qui fait barrage à la vérité sur le rôle des autorités françaises avant, pendant et après le génocide des Tutsi au Rwanda. Alors, puisque les responsables politiques et militaires de l’époque disent n’avoir rien à cacher, pourquoi maintenir une telle chape de plomb ? »

Vingt-deux ans après le déclenchement du génocide des Tutsi au Rwanda, il est inimaginable de maintenir le secret sur des documents qui peuvent permettre de faire toute la lumière sur la réalité de l’engagement français aux côtés des autorités de l’époque. L’association Survie renouvelle donc sa demande de déclassification des archives françaises de 1990 à 1995 concernant le Rwanda, en priorité toutes celles pour lesquelles cela a été refusé dans le cadre des affaires judiciaires en cours. Elle exhorte enfin les députés et sénateurs à mettre en place une commission d’enquête parlementaire sur le rôle de la France au Rwanda à cette période, dont les pouvoirs d’investigation permettraient de briser ce silence.

[1] Voir ici la mobilisation organisée ce jour-là

[2] Pour plus de détails, lire François Graner, « Une déclassification sans réelle portée », Billets d’Afrique n°246, mai 2015

[3] Contenu diffusé avec le nouvel article de François Graner, « "Ouvrons les archives !"... mais ensuite ? », Billets d’Afrique n°256, avril 2016

  • 232 - février 2014 - Rwanda, il y a 20 ans : le fax de Dallaire
  • Il y a vingt ans... - Il y a 20 ans… Un rapport de l’ONU confirme le rôle du régime Habyarimana dans les massacres ethniques
  • Il y a vingt ans... - Il y a 20 ans... le génocide des Tutsi au Rwanda était en préparation et la France savait
  • 246 - mai 2015 - Une déclassification sans réelle portée
  • 184 - Octobre 2009 - « Tous savaient qu’il y avait des mercenaires français »
  • La note sur "l'actualité du mépris d’état ",par l'administration du blog :
  • La Fondation Frantz Fanon à l’initiative d’une démarche juridique interrogeant la responsabilité de l’Etat après les propos de la ministre chargée de l’Enfance, de la Famille et des Droits des femmes Vers 400 plaintes contre Laurence Rossignol ? Laurence Rossignol : le CCIF accompagne plus de 400 plaintes pour injure raciale Laurence Rossignol : le CCIF porte plainte pour «injure publique à caractère racial» "La lutte antiesclavagiste ne mérite pas cette indignitél"

    mercredi 6 avril 2016

    Les mots ont leur importance ; ceux employés par la ministre chargée de l’Enfance, de la Famille et des Droits des femmes mettent en évidence qu’au sein du gouvernement actuel la pensée coloniale est toujours présente.

    Lors de son interview sur RMC, la ministre, Madame Rossignol, a démontré son ignorance en matière de nationalité ; en affirmant, la main sur le cœur, que « nous avons le devoir de garantir à tous ceux qui vivent en France, et aux franco-musulmans, qu’ils y vivent bien », elle démontre ainsi sa méconnaissance de la différence entre religion et nationalité.

    De plus, elle encourage non seulement un discours de haine et d’exclusion en discriminant les femmes de confession musulmane et en suscitant des pressions sur celles qui portent le voile, mais aussi remet en cause la liberté de se vêtir, qui est un élément de l’intimité de la vie privée, mais aussi la liberté de commerce et de l’entreprise en traitant « d’irresponsables » des grandes marques comme H&M, Uniqlo, Dolce Gabanna parce qu’elles feraient la promotion de « l’enfermement des femmes ».

    Dans ce combat, le gouvernement vient d’être rejoint par Elisabeth Badinter qui, dans un entretien au journal Le Monde (édition du 2 avril), pense « que les femmes doivent appeler au boycott de ces enseignes ». Sera t elle, comme les militants de BDS, poursuivie par ces marques pour entrave à l’exercice normal d’une activité économique, critère de la provocation à une discrimination illicite ?

    Oui, les mots ont leur importance. Par la violence de la mise en relation inadmissible entre « il y a les femmes qui choisissent » et le « il y avait des négres afri…négres américains qui étaient pour l’esclavage », elle prône l’idée que le port de certains vêtements musulmans traduirait une mise en esclavage, d’autant plus redoutable qu’il est le fait de femmes qui en font elles-mêmes le choix. Avec cette comparaison, elle prétend révéler la logique d’esclaves organisateurs de l’esclavagisme qu’il y a derrière le fait de porter le voile. Mais il y a pire, avec cette comparaison, la ministre développe l’idée que les esclaves ont participé à leur propre extermination. Elle affirme cela non comme une exception mais comme une donnée centrale, ce qui est de nature à impressionner un public non averti, ou celui qui croit déjà dans ces thèses, et est à la recherche de référence intellectuelle.

    Dès lors, face à cette nouvelle forme d’ « esclavagisme », le gouvernement se doit d’agir et de conduire une action déterminée pour libérer et protéger les femmes, qui sont sous l’emprise de groupes menés par « les salafistes ». Il l’annonce par la voix de sa ministre chargée de l’Enfance, de la Famille et des Droits des femmes qui a montré avec détermination qu’elle endossait ces propos. L’objectif étant de montré qu’il était temps qu’une action forte soit menée contre un problème d’une d’ampleur telle que seule une réaction de haut niveau pourrait venir à bout de ces voiles qui hantent les jours et les nuits de ceux qui nous gouvernement.

    Quelques heures plus tard, cette même ministre n’a t elle pas concédé, face à l’AFP, une « faute de langage », mais a souligné qu’elle « ne retirait pas un mot » à ce qu’elle avait dit par ailleurs ? Elle signifie ainsi qu’elle a voulu donner une assise générale à son propos avec de fortes références sociologiques et politiques.

    Ces propos ne sont pas tenus pour rien. Contre le voile, la marge de manœuvre légale du gouvernement est ténue.

    Mais dans ce faux combat, l’Etat s’égare. Ses obligations ne sont elles pas de garantir les libertés fondamentales, de protéger les minorités exposées et de lutter contre le négationnisme qui essentialise des populations qui sont toujours racialisées et demeurent invisibles.

    Or, la ministre a choisi de discriminer les femmes portant le voile et de les exposer, une nouvelle fois, à la vindicte publique, entre autres en stigmatisant les musulmans comme étant des étrangers à perpétuité, puisqu’il y aurait d’un côté « tous ceux qui vivent en France », et de l’autre « les franco-musulmans ».

    Il se doit aussi de ne pas reprendre les éléments des thèses racistes les plus insipides en recourant à des propos faux, infondés bafouant la mémoire des morts et des victimes de l’esclavage, dans une démarche négationniste, qui tourne le dos à la connaissance.

    Madame Rossignol a exprimé son mépris à l’égard des Afro-américains mais plus généralement à l’égard de tous les Afro descendants et des millions de victimes de la traite négrière et de la mise en esclavage, le plus grand crime contre l’humanité jamais commis.

    En droit, une déclaration d’un-e ministre annonçant une action publique est un fait, et tout fait de l’administration engage sa responsabilité s’il est fautif. La faute ne doit pas être qualifiée par rapport à des données politiques ou morales, mais juridiques. Notons que la ministre ne peut pas revendiquer l’irresponsabilité, alors qu’elle a stigmatisé les fabricants de vêtements comme « irresponsables ».

    Bien sûr, il ne saurait être question de remettre en cause la liberté d’expression d’un-e ministre. Mais cette liberté ne saurait être sans limite, et en particulier elle se doit de respecter les droits et les libertés d’autrui, à commencer par tout ce qui relève des choix concernant la vie privée.

    On ne peut continuer à accepter l’emprise du pouvoir politique sur des questions qui relèvent de l’intimité de la vie privée et de la croyance personnelle.

    On peut dès lors affirmer que la déclaration publique de cette ministre résulte d’un abus de pouvoir ; l’autorité publique s’affichant pour but de faire changer des choix qui relèvent de la liberté religieuse.

    Mais on ne peut laisser de côté la malhonnêteté intellectuelle qui guide cette démarche ; la ministre choisit de monter en épingle des questions sociales qui parlent à l’électorat populiste, alors que les problèmes des femmes de religion musulmane en France sont ceux de toutes les femmes, à commencer par ceux de l’emploi et de l’inégalité salariale. Les femmes portant le voile subissent des discriminations accrues, en raison de leur intersectionnalité, notamment au travail.

    Le devoir de la ministre, qui a dans son portofolio les droits des femmes, n’est il pas de lutter contre ces discriminations au lieu de les aggraver ?

    Ces propos mettent en évidence une pensée coloniale et colonialiste, alors que la lutte contre le colonialisme n’est pas une option politique mais une obligation juridique.

    Rappelons juste pour mémoire que l’ONU, depuis 2011, a lancé la troisième décennie pour l’éradication du colonialisme. Depuis Jules Ferry, héros républicain qui professait l’inégalité des races et le devoir de coloniser, la France, et particulièrement ses élites politiques et intellectuelles, n’en a pas fini avec la grande tradition colonialiste de la Gauche gouvernementale.

    Devant la gravité et les conséquences, sur le plan sociétal, de ces propos, la Fondation Frantz Fanon, avec d’autres organisations, va engager un recours devant le Premier Ministre puis déposer une requête devant le tribunal administratif de Paris parce que « tout acte d’une autorité publique qui a un impact sur la vie des tiers est susceptible d’engager sa responsabilité s’il est constitutif d’une faute » et parce que « la faute d’un-e ministre, pour des actes commis dans le cadre de ses fonctions, engage la responsabilité de l’État ».

    Il s’agit, par cette démarche ​​de n’exclure aucune des voies offertes ​par la loi ​
    à tous ceux et toutes celles qui refusent de se laisser racialiser, exclure, marginaliser, discriminer, stigmatiser ​et​ elle n’empêche nullement d’emprunter ​d’en emprunter d’autres telles que celle du pénal ​ou​ de déposer plainte auprès de la Haute cour de Justice.

    Oui, les mots ont bien de l’importance !

    Voir en ligne : l’article sur le site de la Fondation Frantz Fanon

  • Libération - ‎il y a 12 heures‎

    Critiquée pour avoir comparé les femmes voilées aux «nègres américains qui étaient pour l'esclavage», la ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes pourrait avoir à répondre de ses propos devant la justice. C'est le souhait du ...

    SaphirNews.com -

    Le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a donné, vendredi 8 avril, les détails de son action de justice contre la ministre des Droits des femmes Laurence Rossignol, qui avait comparé les musulmanes qui choisissent de porter le voile aux ...

    Zaman -

    Le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a annoncé vendredi 8 avril son intention de porter plainte avec plus de 400 personnes contre la ministre Laurence Rossignol pour «injure publique à caractère racial», à la suite de ses propos ...

    FranceAntilles.fr Martinique - ‎

    ... « Il y avait aussi des nègres afric... et des nègres américains qui étaient pour l'esclavage... »a récemment déclaré Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes, en référence aux femmes musulmanes qui ...

  • "Les vies noires comptent", un extrait de la contestation sociale aux USA... Version imprimable

    Posté le 5 avril 2016 par ÉricZ, Fabien

    Envoyer par email

    Sur le site d’un AUTRE FUTUR vous pouvez lire en ce moment plusieurs articles intéressants de Fabien D. sur différents aspects du mouvement social contestataire aux USA. Ils sont construits autour de témoignages et d’interviews qu’il est allé collecter auprès de différents militants, notamment à Baltimore, lors des actions et marches contre la violence policière à l’égard de la population noire. A bien des égards, leur témoignage et leur analyse font écho à nos critiques des choix politiques, sécuritaires et policiers que les états européens présentent comme solution ou réponse à "l’insécurité sociale" des populations relégués et exclues par le capitalisme globalisé.

    Cet extrait de l’ article Baltimore et le mouvement « Black Lives Matter donne la parole à des militants du mouvement "Black Lives Matter" à Baltimore, qui proteste contre les violences policières et le racisme. Ce mouvement a particulièrement attiré l’attention médiatique en 2015 en raison des arrestations et des violences qui ont accompagné certaines manifestations, suite à l’assassinat par la police de Freddie Gray. Ce texte permet plus précisément de prendre connaissance des enjeux sociaux à l’origine du mouvement, en soulignant notamment la liaison effectuée à Baltimore entre forces de police et système éducatif, ainsi que les inégalités auxquelles celui-ci contribue.
    Lien vers l’
    article.

    (...)
    Pouvez-vous présenter plus généralement la situation sociale à Baltimore ?

    SB : Ici, à Baltimore, il y a beaucoup de problèmes, ce n’est pas juste une question raciale ou de brutalité policière. C’est aussi la question du capitalisme et beaucoup de gens n’ont pas conscience de la façon dont les choses sont structurées... Tu sais, trouver un logement est difficile, il y a beaucoup de jeunes qui finissent dans la rue, à peut-être vendre de la drogue ou à voler, ou à commettre des crimes mais on ne regarde pas l’environnement qui encourage cela. Dans le système scolaire, maintenant, c’est tolérance zéro. Tout gamin dont peut-être le comportement n’est pas bon va être viré de l’école, donc nos enfants sont poussés en dehors de l’école... Il y a beaucoup de parents de mon âge (j’ai 22 ans). Nos parents sont des années 70 et 80, quand le crack , les drogues ont vraiment explosé, spécialement sur la côte Est et tu vois beaucoup de jeunes ici qui n’ont même pas de parents. Ils cherchent vraiment leurs parents et se retrouvent dans la rue, en prison, c’est comme si tu étais banni, comme rejeté, tu vois ce que je veux dire. Une de mes auteures favorites, Michelle Alexander, l’auteure de The New Jim Crow, parle du lien entre capitalisme, prison et école et le racisme est un facteur important. A Baltimore, il y a aussi la loi sur le couvre-feu qui exige que tous les enfants de moins de 14 ans soient chez eux à 9 heures les soirs d’école et que les mineurs de plus de 14 ans soient chez eux à 10 heures les soirs d’école et à 11h les week-end et durant l’été. Ils peuvent être mis en détention, avoir une amende, avoir des poursuites pénales. C’est vraiment dur. Dans chaque district policier, ils ont ouvert des centres de détention. A un niveau plus profond, je pense que c’est juste une guerre à l’égard des pauvres et des personnes noires.

    Par ailleurs, le maire, les responsables de la ville utilisent le mot « sécurité » à propos de la présence de la police au sein du système scolaire. Mais la sécurité, ce n’est pas juste la sécurité physique, cela concerne à la fois le corps et l’esprit. J’ai été élevé à Baltimore. J’ai vu de près beaucoup d’enfants qui ont eu à endurer des traumas. Dans cette situation, même à l’école tout le monde est contre tout le monde : les noirs contre les policiers et même les noirs les uns contre les autres au sein de la communauté parce que personne ne se sent en sécurité nulle part. Donc si c’est une question de sécurité, ne mettez pas des policiers avec des armes dans l’école, parce que cela va renforcer la culture du « c’est normal d’avoir des armes à l’école ». Cela va amener plus de crime. Si c’était vraiment une question de sécurité, il y aurait plus de conseillers, il y aurait plus de ressources pour la communauté et pas juste ces lois à la con. Cela ne va aider personne.

    Isaac Dalto : Dans notre ville, il y a 65% de noirs et 30% de blancs,. Environ 622 000 personnes vivent ici.

    L’industrie (illégale) de la drogue est un des plus gros secteurs de l’économie ici. C’est une économie complètement dérégulée et non imposée, bien entendu ! Le commerce d’héroïne, en particulier, est une sorte de choix économique rationnel pour beaucoup de gens. Parce que si tu n’as pas d’éducation universitaire à Baltimore, les boulots qui te sont ouverts vont être dans le secteur des services ou peut-être des soins à domicile mais dans tous les cas avec le salaire minimum, c’est-à-dire presque rien. Le plus gros employeur de la ville est l’université Johns Hopkins. C’est un des plus gros secteurs de l’économie avec la santé. Baltimore était une ville de commerce maritime. Ces 30 ou 40 dernières années, il y a eu une période de désindustrialisation, comme dans le reste de la « Rust Belt » [« ceinture de la rouille », région industrielle du Nord-Est des États-Unis, ndt]. Aujourd’hui, les secteurs qui progressent le plus rapidement dans la ville sont la restauration et la santé. Je crois que les emplois en plus forte croissance à Baltimore sont des emplois de caissier et de gardien de sécurité.

    Il y a beaucoup de « food deserts », de « déserts alimentaires » à Baltimore, dans la partie la plus à l’ouest. Cela veut dire qu’il y a des endroits où il n’y a pas de nourriture, pas de magasins d’alimentation disponibles. Les gens doivent se déplacer pour trouver un supermarché ou une épicerie. C’est comme un mur, délimité racialement, séparant la partie Est et la partie Ouest. A l’ouest, ce sont les déserts alimentaires, travailler dans l’économie de la drogue est un choix rationnel, etc... La dynamique générale est que les gens riches sont encouragés à venir vers le milieu de la ville et les autres, comme la valeur de la propriété augmente, sont envoyés ailleurs, comme tu peux le voir dans beaucoup d’autres endroits.

    SB : Il y a beaucoup de coupures (dans les services), les gens s’inquiètent des factures excessives ou non-payées. Il y a beaucoup d’aspects différents, mais c’est aussi le capitalisme, c’est pour cela que les gens se font tuer, surtout la jeunesse noire et à la peau brune, c’est pour cela que nous n’avons pas de travail, que nous sommes sans domicile, c’est fou. Honnêtement, une bonne chose à propos de cette affaire de Freddie Gray, c’est qu’avant cela, avec les autres cas à Baltimore, les gens savaient, mais... Celui-là a vraiment sorti les gens de chez eux et ils se sont racontés leurs histoires et ils ont pris la rue. J’ai l’impression qu’avant il y avait une sorte de désespoir, « les noirs tuent des noirs tout le temps, on ne comprend pas comment cela a pu commencer » (...)

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21 février 2016 7 21 /02 /février /2016 09:04

Plate-forme D&S Primaires 2016

Tandis que d'autres voudraient vraiment une justice universelle incrite dans le droit français,ainsi , La Coalition Française pour la CPI nouveau partenaire de l’AFPCU

Notons qu'Hollande n'ayant pas tenu sur ce point son engagement post -présidentiel ,est-ce que la réélection d'un autre socialiste,ou même la sienne , permettrait enfin à la France de s'amender de son crime par le jugement ,au nom du respect des valeurs universelles et par des tribunaux Français du socialiste Hubert Védrine ?

Note de l'administration du blog.

Publié le 27 mai 2015

L’Association Française pour la promotion de la compétence universelle (AFPCU) est fière de vous présenter son nouveau partenaire la Coalition Française pour la Cour pénale internationale (CFCPI).

La Coalition Française pour la Cour pénale internationale est un collectif doté de statuts qui regroupent une cinquantaine d’ONG, associations françaises et de corps représentatifs de la société civile sur la lutte contre l’impunité ( ex : Amnesty International, Fédération internationale des droits de l’homme, le Syndicat de la magistrature, Avocats sans Frontières, le Barreau de Paris...). La CFCPI a été créée en 2008 afin de suivre et accompagner le processus de ratification par la France du Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale. La CFCPI a comme président depuis de nombreuses années, Me Simon Foreman.

Depuis lors, elle ne cesse de s’illustrer dans l’amélioration du processus législatif de la compétence extra-territoriale. Dernièrement et encore aujourd’hui, elle bataille pour faire avancer la législation de l’article 689-11 du Code de procédure pénale portant adaptation du droit pénal français au statut de Rome (article issu de la loi n° 2010-930 du 9 août 2010 portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale et de la loi du 26 février 2002 relative à la coopération avec la CPI).

En effet, tel qu’il est encore en vigueur, l’article 689-11 du CPP renferme un certain nombre d’obstacles concernant la poursuite de présumés auteurs de violations graves du droit international pénal et humanitaire. Ainsi, pour qu’une poursuite d’un présumé auteur de crimes internationaux puisse avoir lieu en France, il est exigé des conditions restrictives : la condition de la résidence habituelle en France pour l’auteur suspect (et non sa simple présence), le principe de double incrimination (la France ne sera compétente que si les crimes sont interdits dans l’État où ils ont été commis) , le principe de complémentarité inversé (la France donne priorité à la compétence de la Cour alors que le Statut de Rome prévoit l’inverse) et le monopole des poursuites par le parquet (ce qui n’est le cas pour aucun autre crime et empêche la victime d’engager des poursuites sans l’accord du ministère public). (Pour davantage de précisions, consultez la documentation de l’AFPCU afférente au volet législatif de la compétence universelle en France).

Ainsi, depuis septembre 2012, la CFCPI, dans ses différentes actions, soutient la proposition de loi du Sénateur Jean-Pierre Sueur visant à faire sauter ces quarte verrous. Si lors du vote au Sénat en février 2013, la PPL sueur a été adoptée à l’unanimité et fait sauter 3 verrous sur 4, celui du monopole des poursuites par le Parquet a été toutefois maintenu par le biais d’un amendement.

Malgré la mobilisation continue de l’ensemble des acteurs de la CFCPI, la proposition de loi Sueur est toujours en attente d’une inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, près de deux ans après son adoption au Sénat.

L’AFPCU aura à cœur de soutenir les actions de la CFCPI pour faire avancer ce dossier essentiel dans la lutte contre l’impunité menée en France.

Pour suivre l’excellent travail de la CFCPI : http://www.cfcpi.com/

Le compte twitter de la CFCPI : @CFCPI

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15 février 2016 1 15 /02 /février /2016 05:35

Charte de Bruxelles

Pour la création d'un Tribunal Pénal Européen et d'une Cour Pénale Internationale de l'Environnement et de la Santé

Considérant le droit inaliénable de l’homme à un environnement sain et le risque d’irréversibilité du niveau atteint par la perte de biodiversité.

http://iecc-tpie.org/

Les parties initiatrices :

  • Rappellent et soulignent les Principes et les contenus de toutes les Résolutions internationales et les Déclarations internationales depuis la Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement, adoptée à Stockholm le 16 Juin 1972;
  • Reconnaissent que les enjeux dépassent les frontières et doivent être traités de manière supra nationale;
  • Affirment que la question de l’utilisation excessive des ressources pose celle de l’endommagement, voire de la destruction d’écosystèmes dont le fonctionnement permet le maintien et le développement de la vie, démontré par la disparition de nombreuses espèces végétales et animales; que la santé humaine est mise en péril par l’usage de produits toxiques et en particulier les perturbateurs endocriniens et les produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques;
  • Observent que différentes initiatives visent à donner un caractère constitutionnel à la préservation du vivant (comme, par exemple, la nouvelle Charte Constitutionnelle de l’Équateur, la Conferencia Mundial de los Pueblos sobre el Cambio Climático y los Derechos de la Madre Tierra – Cochabamba, la Charte de l’environnement en France);
  • Soulignent l’extrême urgence à agir;
  • Relèvent qu’une telle perspective exige l’étude et l’évaluation des données historiques, anthropologiques et culturelles, scientifiques, sanitaires, économiques et politiques;
  • Estiment en conséquence que ces données doivent avoir une traduction juridique pour permettre la préservation de l’environnement avec des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives; en effet, certains choix et décisions, pris en toute connaissance de cause, se traduisent par des conséquences dramatiques à court et à long terme sur les ressources, la nature et les humains ; qu’il importe donc de reconnaître un accès effectif à la justice;
  • Constatent qu’il existe aujourd’hui de nombreuses initiatives de forme et de nature diverses portées par elles-mêmes et d’autres organisations qui les rejoindraient ; elles poursuivent un but analogue avec des méthodes différentes mais complémentaires et susceptibles de se mettre en place plus ou moins rapidement ; il convient de trouver les solutions et les outils les plus adéquats pour agir de concert et permettre la mise en œuvre immédiate de ce qui peut l’être et de coordonner les efforts pour parvenir au meilleur résultat possible de chaque initiative.

Qu’en conséquence, elles ont décidé de se réunir pour convenir de ce qui suit

  1. Immédiatement, toutes les initiatives déjà existantes ou en préparation permettant à la société civile de s’emparer et de juger au moins sur le plan moral les responsables des crimes et délits environnementaux mettant en péril les ressources planétaires et la santé humaine seront soutenues par toutes les organisations signataires ; il en va notamment ainsi du Tribunal international de conscience des crimes contre la nature et l’environnement, et celle du Tribunal des Peuples;
  2. Une seconde étape historique pourrait être franchie par la création D’UN TRIBUNAL PENAL EUROPEEN DE L’ENVIRONNEMENT ET DE LA SANTE; À la suite de l’audition, le 10 juillet 2010, par la commission environnement, santé publique et sécurité alimentaire du Parlement européen, du professeur Abrami, vice-président de l'Académie internationale des Sciences de l’Environnement, le département politique « droits des citoyens et affaire constitutionnelles » de la DG des politiques internes de l’UE du Parlement européen a émis des commentaires1 sur cette proposition stipulant que: « la création d’une chambre spécialisée au sein de la Cour de Justice de l’UE, ou un tribunal spécialisé attaché à la Cour avec une compétence sur les questions environnementales, serait un but réaliste à moyen terme.2 »; l’AME-DIE a soutenu cette initiative qui pourrait se traduire par une modification du statut de la CJUE ; la reconnaissance de la nécessaire sanction pénale des délits environnementaux (directive 2008/99/EC) et la création d’un parquet pénal européen pourraient être considérés comme un premier pas dans cette direction ; le renforcement des sanctions et la reconnaissance du crime d’écocide, demandé par le mouvement citoyen End Ecocide in Europe, s’inscrivent également dans cette démarche;
  3. UNE COUR PÉNALE INTERNATIONALE DE L ‘ENVIRONNEMENT ET DE LA SANTE est le but final à atteindre. Pour y parvenir, une révision des statuts de la Cour Pénale internationale (art 121,122 et 123) est possible, en introduisant la catastrophe environnementale comme l’une des incriminations des crimes contre l’humanité permettant de poursuivre les responsables ayant agi de façon intentionnelle. Ce crime de catastrophe environnementale permettrait d’obtenir une protection effective internationale des écosystèmes, dans l’esprit des précédents jurisprudentiels de nature civile émanant de la Cour internationale de Justice (Trail Case, conflit du canal de Corfou ) dont résulte une règle de droit international coutumier selon laquelle: "aucun État n'a le droit d'utiliser ou permettre qu'on utilise son propre territoire de telle manière à provoquer des dommages", réaffirmée par le principe n.21 de la Déclaration de Stockholm du 1972 et dans le Principe n.2 de la Conférence de Rio de Janeiro du 1992;

Les parties signataires suivent également avec intérêt et certaines soutiennent également la création d’un nouveau crime dit d’ « écocide » comme 5ème crime contre la paix.

En conséquence, les parties initiatrices :

  1. Invitent les autres organisations intéressées à soutenir la demande de créer un Tribunal Pénal Européen de l’Environnement et de la Santé sur la base des principes élaborés par l’UE d’une sanction effective, proportionnée et dissuasive;
  2. Invitent les organisations intéressées et au-delà la société civile mondiale à soutenir la demande de création d’une Cour Pénale Internationale de l’Environnement et de la Santé en développant les compétences actuelles de la Cour Pénale Internationale (ICC) par le biais des procédures prévues dans le traité (révision et amendements) et en incluant comme nouveau crime spécifique, la catastrophe environnementale;
  3. En conséquence, demandent au Secrétaire Général de l’ONU d’entreprendre toute démarche utile pour
    • Répertorier les différentes urgences environnementales de la Planète Terre avec une attention particulière pour la protection de la santé et pour les problèmes scientifiques et technologiques a?érents ainsi que pour tous les aspects culturels et anthropologiques;
    • Élaborer les actes nécessaires à la création de la Cour Pénale Internationale de l’Environnement et de la Santé et à la sanction effective des infractions environnementales ayant causé des dommages aux personnes comme aux écosystèmes;
  4. Invitent les organisations intéressées et la société civile à soutenir une initiative visant à faire reconnaitre par l’ONU, et les États le principe pollueur payeur comme un principe juridique de valeur universelle et sanctionnable, à réparer le préjudice écologique, à introduire une véritable protection juridique et juridictionnelle des ressources dans un esprit de multilatéralisme efficace et de solidarité;
  5. Décident en tous cas de s’organiser en plateforme commune pour poursuivre cet objectif et le préciser.
  6. Déclaration finale de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement

    La Conférence des Nations Unies sur l'environnement, s'étantréunie à Stockholm du 5 au 16 juin 1972, et ayant examiné la nécessité d'adopter une conception commune et des principes communs qui inspireront et guideront les efforts des peuples du monde en vue de préserver et d'améliorer l'environnement,

    Proclame ce qui suit :

    1. L'homme est à la fois créature et créateur de son environnement, qui assure sa subsistance physique et lui offre la possibilité d'un développement intellectuel, moral, social et spirituel. Dans la longue et laborieuse évolution de la race humaine sur la terre, le moment est venu où, grâce aux progrès toujours plus rapides de la science et de la technique, l'homme a acquis le pouvoir de transformer son environnement d'innombrables manières et à une échelle sans précédent. Les deux éléments de son environnement, l'élément naturel et celui qu'il a lui-même créé, sont indispensables à son bien-être et à la pleine jouissance de ses droits fondamentaux, y compris le droit à la vie même.
    2. La protection et l'amélioration de l'environnement est une question d'importance majeure qui affecte le bien-être des populations et le développement économique dans le monde entier ; elle correspond au vou ardent des peuples du monde entier, et constitue un devoir pour tous les gouvernements.
    3. L'homme doit constamment faire le point de son expérience et continuer à découvrir, à inventer, à créer et à avancer. Aujourd'hui, ce pouvoir qu'a l'homme de transformer le milieu dans lequel il vit, s'il est utilisé avec discernement, peut apporter à tous les peuples les bien-faits du développement et la possibilité d'améliorer la qualité de la vie. Utilisé abusivement ou inconsidérément, ce même pouvoir peut causer un mal incalculable aux êtres humains et à l'environnement. Les exemples de dommages, de destruction et de dévastation provoqués par l'homme se multiplient sous nos yeux en de nombreuses régions du globe : on constate des niveaux dangereux de pollution de l'eau, de l'air, de la terre et des êtres vivants ; des perturbations profondes et regrettables de l'équilibre écologique de la biosphère ; la destruction et l'épuisement de ressources irremplaçables ; enfin de graves déficiences qui sont dangereuses pour la santé physique, mentale et sociale de l'homme, dans l'environnement qu'il crée, et en particulier dans son milieu de vie et de travail.
    4. Dans les pays en voie de développement, la plupart des problèmes de l'environnement sont causés par le sous-développement. Des millions d'hommes continuent à vivre bien au-dessous des niveaux les plus bas compatibles avec une vie humaine décente, privés du nécessaire en ce qui concerne l'alimentation, le vêtement, le logement, l'éducation, la santé et l'hygiène. En conséquence, les pays en voie de développement doivent orienter leurs efforts vers le développement, en tenant compte de leurs priorités et de la nécessité de préserver et d'améliorer l'environnement. Dans les pays industrialisés, les problèmes de l'environnement sont généralement liés à l'industrialisation et au développement des techniques. Dans le même but, les pays industrialisés doivent s'efforcer de réduire l'écart entre eux et les pays en voie de développement.
    5. L'augmentation naturelle de la population pose sans cesse de nouveaux problèmes pour la préservation de l'environnement et il faudrait adopter, selon que de besoin, des politiques et des mesures appropriées pour régler ces problèmes. Les hommes sont ce qu'il y a de plus précieux au monde. C'est le peuple qui anime le progrès social et crée la richesse de la société, qui développe la science et la technique et, par son dur travail, transforme sans cesse l'environnement. Avec le progrès social et l'évolution de la production, de la science et de la technique, l'aptitude de l'homme à améliorer son environnement se renforce chaque jour.
    6. Nous sommes à un moment de l'histoire où nous devons orienter nos actions dans le monde entier en songeant davantage à leurs répercussions sur l'environnement. Nous pouvons, par ignorance ou par négligence, causer des dommages considérables et irréversibles à l'environnement terrestre dont dépendent notre vie et notre bien-être. En revanche, en approfondissant nos connaissances et en agissant plus sagement, nous pouvons assurer, à nous-mêmes et à notre postérité, des conditions de vie meilleures dans un environnement mieux adapté aux besoins et aux aspirations de l'humanité. Il existe de larges perspectives pour l'amélioration de la qualité de l'environnement et la création d'une vie heureuse. II faut de l'enthousiasme, mais aussi du sang-froid ; des efforts intenses, mais aussi une action ordonnée. Pour jouir librement des bienfaits de la nature, l'homme doit tirer parti de ses connaissances en vue de créer, en coopération avec elle, un environnement meilleur. Défendre et améliorer l'environnement pour les générations présentes et à venir est devenu pour l'humanité un objectif primordial, une tâche dont il faudra coordonner et harmoniser la réalisation avec celle des objectifs fondamentaux déjà fixés de paix et de développement économique et social dans le monde entier.
    7. Pour que ce but puisse être atteint, il faudra que tous, citoyens et collectivités, entreprises et institutions, à quelque niveau que ce soit, assument leurs responsabilités et se partagent équitablement les tâches. Les hommes de toutes conditions et les organisations les plus diverses peuvent, par les valeurs qu'ils admettent et par l'ensemble de leurs actes, déterminer l'environnement de demain. Les autorités locales et les gouvernements auront la responsabilité principale des politiques et de l'action à mener en matière d'environnement dans les limites de leur juridiction. Une coopération internationale n'est pas moins nécessaire pour réunir les ressources nécessaires afin d'aider les pays en voie de développement à s'acquitter de leurs responsabilités dans ce domaine. Un nombre toujours plus élevé de problèmes d'environnement, de portée régionale ou mondiale ou touchant au domaine international commun, exigeront une coopération étendue entre les pays et une action de la part des organisations internationales dans l'intérêt de tous. La Conférence demande aux gouvernements et aux peuples d'unir leurs efforts pour préserver et améliorer l'environnement, dans l'intérêt des peuples et des générations futures.

    Principes
    Exprime la conviction commune que :

    Principe 1
    L'homme a un droit fondamental à la liberté, à l'égalité et à des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être. Il a le devoir solennel de protéger et d'améliorer l'environnement pour les générations présentes et futures. A cet égard, les politiques qui encouragent ou qui perpétuent l'apartheid, la ségrégation raciale, la discrimination, les formes, coloniales et autres, d'oppression et de domination étrangères sont condamnées et doivent être éliminées.

    Principe 2
    Les ressources naturelles du globe, y compris l'air, l'eau, la terre, la flore et la faune, et particulièrement les échantillons représentatifs des écosystèmes naturels, doivent être préservés dans l'intérêt des générations présentes et à venir par une planification ou une gestion attentive selon que de besoin.

    Principe 3
    La capacité du globe de produire des ressources renouvelables essentielles doit être préservée et, partout où cela est possible, rétablie ou améliorée.

    Principe 4
    L'homme a une responsabilité particulière dans la sauvegarde et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune sauvages et leur habitat, qui sont aujourd'hui gravement menacés par un concours de facteurs défavorables. La conservation de la nature, et notamment de la flore et de la faune sauvages, doit donc tenir une place importante dans la planification pour le développement économique.

    Principe 5
    Les ressources non renouvelables du globe doivent être exploitées de telle façon qu'elles ne risquent pas de s'épuiser et que les avantages retirés de leur utilisation soient partagés par toute l'humanité.

    Principe 6
    Les rejets de matières toxiques ou d'autres matières et les dégagements de chaleur en des quantités ou sous des concentrations telles que l'environnement ne puisse plus en neutraliser les effets doivent être interrompus de façon à éviter que les écosystèmes ne subissent des dommages graves ou irréversibles. La lutte légitime des peuples de tous les pays contre la pollution doit être encouragée.

    Principe 7
    Les Etats devront prendre toutes les mesures possibles pour empêcher la pollution des mers par des substances qui risquent de mettre en danger la santé de l'homme, de nuire aux ressources biologiques et à la vie des organismes marins, de porter atteinte aux agréments naturels ou de nuire à d'autres utilisations légitimes de la mer.

    Principe 8
    Le développement économique et social est indispensable si l'on veut assurer un environnement propice à l'existence et au travail de l'homme et créer sur la terre des conditions nécessaires à l'amélioration de la qualité de la vie.

    Principe 9
    Les déficiences de l'environnement imputables à des conditions de sous- développement et à des catastrophes naturelles posent des problèmes graves, et le meilleur moyen d'y remédier est d'accélérer le développement par le transfert d'une aide financière et technique substantielle pour compléter l'effort national des pays en voie de développement et l'assistance fournie en tant que de besoin.

    Principe 10
    Pour les pays en voie de développement, la stabilité des prix et une rémunération adéquate pour les produits de base et les matières premières sont essentielles pour la gestion de l'environnement, les facteurs économiques devant être retenus au même titre que les processus écologiques.

    Principe 11
    Les politiques nationales d'environnement devraient renforcer le potentiel de progrès actuel et futur des pays en voie de développement, et non l'affaiblir ou faire obstacle à l'instauration de meilleures conditions de vie pour tous. Les Etats et les organisations internationales devraient prendre les mesures voulues pour s'entendre sur les moyens de parer aux conséquences économiques que peut avoir, au niveau national et international, l'application de mesures de protection de l'environnement.

    Principe 12
    II faudrait dégager des ressources pour préserver et améliorer l'environnement, compte tenu de la situation et des besoins particuliers des pays en voie de développement et des dépenses que peut entraîner l'intégration de mesures de préservation dé l'environnement dans la planification de leur développement, et aussi de la nécessité de mettre à leur disposition à cette fin, sur leur amande, une assistance internationale supplémentaire, aussi bien technique que financière.

    Principe 13
    Afin de rationaliser la gestion des ressources et ainsi d'améliorer l'environnement, les Etats devraient adopter une conception intégrée et coordonnée de leur planification du développement, de façon que leur développement soit compatible avec la nécessité de protéger et d'améliorer l'environnement dans l'intérêt de leur population.

    Principe 14
    Une planification rationnelle est un instrument essentiel si l'on veut concilier les impératifs du développement et la nécessité de préserver et d'améliorer l'environnement.

    Principe 15
    En planifiant les établissements humains et l'urbanisation, il faut veiller à éviter les atteintes à l'environnement et à obtenir le maximum d'avantages sociaux, économiques et écologiques pour tous. A cet égard, les projets conçus pour maintenir la domination du colonialisme et du racisme doivent être abandonnés.

    Principe 16
    Dans les régions où le taux d'accroissement de la population ou sa concentration excessive sont de nature à exercer une influence défavorable sur l'environnement ou le développement, et dans celles où la faible densité de population risque d'empêcher toute amélioration de l'environnement et de faire obstacle au développement, il faudrait mettre en oeuvre des politiques démographiques qui respectent les droits fondamentaux de l'homme et qui soient Jugées adéquates par les gouvernements intéressés.

    Principe 17
    II convient que des institutions nationales appropriées soient chargées de planifier, de gérer ou de réglementer l'utilisation des ressources de l'environnement dont disposent les Etats, en vue d'améliorer la qualité de l'environnement.

    Principe 18
    II convient de recourir à la science et à la technique, dans le cadre de leur contribution au développement économique et social, pour déceler, éviter ou limiter les dangers qui menacent l'environnement et résoudre les problèmes qu'il pose, et d'une manière générale pour le bien de l'humanité.

    Principe 19
    Il est essentiel de dispenser un enseignement sur les questions d'environnement aux jeunes générations aussi bien qu'aux adultes, en tenant dûment compte des moins favorisés, afin de développer les bases nécessaires pour éclairer l'opinion publique et donner aux individus, aux entreprises et aux collectivités le sens de leurs irresponsabilités en ce qui concerne la protection et l'amélioration de l'environnement dans toute sa dimension humaine. Il est essentiel aussi que les moyens d'information de masse évitent de contribuer à la dégradation de l'environnement et, au contraire, diffusent des informations de caractère éducatif sur la nécessité de protéger et d'améliorer l'environnement afin de permettre à l'homme de se développer à tous égards.

    Principe 20
    On devra encourager dans tous les pays, notamment dans les pays en voie de développement, la recherche scientifique et les activités de mise au point technique, dans le contexte des problèmes d'environnement, nationaux et multinationaux. A cet égard, on devra encourager et faciliter la libre circulation des informations les plus récentes et le transfert des données d'expérience, en vue d'aider à la solution des problèmes d'environnement ; on devra mettre les techniques intéressant l'environnement à la disposition des pays en voie de développement, à des conditions qui en encouragent une large diffusion sans constituer pour eux une charge économique.

    Principe 21
    Conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, les Etats ont le droit souverain d'exploiter leurs propres ressources selon leur politique d'environnement et ils ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale.

    Principe 22
    Les Etats doivent coopérer pour développer encore le droit international en ce qui concerne la responsabilité et l'indemnisation des victimes de la pollution et d'autres dommages écologiques que les activités menées dans les limites de la juridiction de ces Etats ou sous leur contrôle causent à des régions situées au- delà des limites de leur juridiction.

    Principe 23
    Sans préjudice des critères qui pourront être retenus par la communauté internationale, ni des normes qui devront être définies à l'échelon national, il faudra dans tous les cas tenir compte des échelles de valeurs prévalant dans chaque pays et de l'applicabilité de normes qui sont valables pour les pays les plus avancés mais qui peuvent ne pas être adaptées aux pays en voie de développement, et être pour ces pays d'un coût social injustifié.

    Principe 24
    Les questions internationales se rapportant à la protection et à l'amélioration de l'environnement devraient être abordées dans un esprit de coopération par tous les pays, grands ou petits sur un pied d'égalité. Une coopération par voie d'accords multilatéraux ou bilatéraux ou par d'autres moyens appropriés est indispensable pour limiter efficacement, prévenir, réduire et éliminer les atteintes à l'environnement résultant d'activités exercées dans tous les domaines, et ce dans le respect de la souveraineté et des intérêts de tous les Etats.

    Principe 25
    Les Etats doivent veiller à ce que les organisations internationales jouent un rôle coordonné, efficace et dynamique dans la préservation et l'amélioration de l'environnement.

    Principe 26
    Il faut épargner à l'homme et à son environnement les effets des armes nucléaires et de tous autres moyens de destruction massive. Les Etats doivent s'efforcer, au sein des organes internationaux appropriés, d'arriver, dans les meilleurs délais, à un accord sur l'élimination et la destruction complète de telles armes.

  7. Aider à l'organisation du tribunal Monsanto. . Lire l'intégralité du texte

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25 janvier 2016 1 25 /01 /janvier /2016 12:08

Au nom de la science "moderniste ",il existe actuellement un crime d' eugénisme!Mais il y a aussi de multiples déviances irrespectueuses des droits de "propriété culturelle" ,des règles de la propriété intellectuelle […]qui défient les critères de scientificité !

Alors ,faut-il donner raison aux "améliorateurs de la race", plus qu' aux voleurs des connaissances acquises au fil des âges ?Faut-il entrer dans les chamailleries conflictuelles entre découvreurs comme le seraient la polémique lancée par« Les héros de Crispr » ?

D'abord ,à moins qu'on ne se considère toujours sous un régime colonial ,tout pillage convenu scientifiquement d'un savoir ancestral et patrimonial,constitue par définition,que ce soit à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) comme chez tout organisme de recherche français ou étranger par ailleurs , une biopiraterie.

Ensuite seul un comité d’éthique bien inspiré ,pourrait se sentir tenu de rectifier à l'IRD , le manquement aux bonnes pratiques de leur recherche,afin d’ empêcher chez eux la propagation de:

-la piraterie scientifique,(Voir sur ce sujet le dernier article ),

-Et AILLEURS /

la propagation de l'involution épistémologique chez les« Les héros de Crispr » (Voir sur ce sujet l'avant-dernier article ),

-et la glorification de la criminalité scientiste!

A voir ce qui suit ,mieux vaut aujourd'hui donner raison à la recherche des génomes perdus de Neandertal qu'à Adolphe Hitler et aux nouveaux Mengele!

Note de l'administration du blog


http://abonnes.lemonde.fr/sciences/article/2016/01/25/svante-paabo-chasseur-de-genomes-perdus_4853286_1650684.html

CRISPR-Cas9, une révolution génétique qui promet beaucoup (et pose de nombreuses questions)

Le HuffPost | Par Grégory Rozières

Publication: 24/01/2016

http://www.huffingtonpost.fr/2016/01/24/crispr-cas9-revolution-genetique-licornes-embryon_n_9052064.html

SCIENCE - Modifier génétiquement un embryon, éradiquer des maladies héréditaires, ou encore faire revivre les mammouths, de la science-fiction? Plus pour très longtemps.

Depuis quelques années, le monde scientifique est bousculé par une nouvelle méthode révolutionnaire permettant de modifier l'ADN de tout être vivant avec une facilité déconcertante. Son nom? CRISPR-Cas9.

Cette méthode a même été nommée découverte capitale de l'année 2015 par le magazine Science. Avant d'étudier les dizaines de possibilités testées par les scientifiques, incroyables et parfois effrayantes, il faut comprendre de quoi il est question (ou, si vous n'aimez vraiment pas la biologie, vous pouvez directement passer à la partie "Rat retrouvant la vue, cochon donneur d'organe et OGM 2.0").

CRISPR-Cas9 est une enzyme qui peut détecter une partie spécifique de l'ADN et la détruire, coupant ainsi la double hélice qui compose toute vie en deux. Pour développer cette technique, les scientifiques se sont inspirés, comme souvent, de la nature.

Une vaccination de la bactérie

CRISPR est l’acronyme de Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats. Derrière ce nom barbare, une propriété observée pour la première fois en 1987. Dans certaines bactéries, l'ADN était composé de séquences de bases (rappelez-vous vos cours de biologie, les fameux A-T-C-G, voir ci-dessous) se répétant comme un palindrome. Entre celles-ci, d'autres séquences que l'on ne comprenait pas vraiment.

Il a fallu attendre 2005 pour que des chercheurs réussissent à percer le mystère de cette bactérie. Les séquences en question sont en réalité celles de virus, les bactériophages, qui ne s'attaquent qu'aux bactéries. "Cela permet de stocker en mémoire l'ADN d'un virus, afin de le combattre si celui-ci tente une nouvelle fois d'attaquer la bactérie", précise au HuffPost Christine Pourcel, chercheuse à l'Institut de Biologie Intégrative de la Cellule, qui a participé à la découverte de ce phénomène. "Si l'on veut, c'est une sorte de vaccination, cela ressemble à un système immunitaire".

Une fois le virus détecté, la bactérie va créer un ARN (comme de l'ADN, mais avec une seule "branche") correspondant au virus. Une enzyme (le fameux Cas9) va alors intégrer cette molécule et aller se fixer sur le virus pour couper son ADN, entraînant sa mort.


Ici, l'ARN de la bactérie vient se fixer sur l'ADN du virus et le couper

Des ciseaux low cost

Cette découverte va intéresser de nombreux chercheurs. Et c'est en 2012 que leurs travaux se concrétisent: deux équipes de chercheurs (qui se disputent depuis la découverte) réussissent à synthétiser l'enzyme Cas9. Et l'intérêt est énorme. Car à l'inverse des virus, une cellule classique ne se laisse pas faire quand on essaye de couper son ADN. "La cellule va essayer de réparer les dégâts. On peut alors introduire une mutation dans l'ADN", explique au HuffPost David Bikard, directeur du laboratoire de biologie de synthèse de l'institut Pasteur.

Pour ce faire, il faut introduire dans le noyau de la cellule un morceau d'ADN modifié approprié, qui va ainsi être récupéré et collé là par les enzymes de la cellule. On se retrouve ainsi avec une cellule génétiquement modifiée.

"C'est une sorte de ciseaux à ADN reprogrammable", précise le chercheur. Certes, ce n'est pas le premier outil de ce type inventé. Il y avait par exemple les méganucléases, qui permettaient de faire quelque chose de similaire. Mais la différence, c'est la facilité. "La méthode CRISPR-Cas9 est tellement simple qu'il faut maintenant quelques jours pour programmer l'enzyme pour couper un morceau d'ADN particulier, alors qu'avant, cela pouvait prendre des mois", s'enthousiasme David Bikard.

La méthode est tellement simple qu'on peut faire plusieurs coupes en même temps, en utilisant plusieurs enzymes, programmées chacune pour cibler une partie spécifique de l'ADN. Tellement simple, même, "qu"il est possible de faire réaliser ces travaux par des étudiants en master en quelques semaines", rajoute le chercheur. Et qui dit simple dit bon marché. Très bon marché.

Cette vidéo du MIT (en anglais) explique en détail le fonctionnement de CRISPR-Cas9:

Rat retrouvant la vue, cochon donneur d'organe et OGM 2.0

Avec cette nouvelle technique, la modification de l'ADN est devenue "grand public" dans le monde de la génétique. "C'est la découverte la plus importante du domaine depuis les années 80-90", estime David Bikard. Et le fait est que depuis 2012, les articles scientifiques sur de nouvelles expériences se multiplient.

Le 7 janvier dernier, des chercheurs ont réussi à améliorer la vision de rats touchés par une maladie héréditaire source de cécité. En utilisant les fameux ciseaux à ADN, ils ont coupé le gène défectueux, source de la maladie, et l'ont remplacé.

En octobre dernier, une autre équipe a édité l'ADN de cellules de cochon 67 fois (!) afin de retirer un gène qui existe à plusieurs endroits du génome de l'animal (pour rappel, un brin d'ADN est très long, déplié, il permettrait de faire plusieurs fois le tour de la terre). L'intérêt? Les organes d'un cochon modifié de la sorte pourraient être greffées à un humain.

Cette technique est également testée sur les végétaux comme un substitut aux classiques et polémiques OGM. A l'inverse de la modification génétique (où l'on intègre un gène d'une autre espèce) utilisée depuis des années, le couper/coller possible grâce à CRISPR-Cas9 ne va pas utiliser de gène étranger, mais simplement modifier l'ADN.

En finir avec la drépanocytose et Huntington

Plusieurs sociétés réfléchissent déjà à un moyen d'utiliser CRISPR-Cas9 comme un médicament pour lutter contre certains cancers ou maladies liés à la mutation d'un gène bien particulier.

Mais il reste beaucoup de travail, car dans ce cas, il faudrait que l'enzyme détecte les cellules concernées parmi les millions que compose le corps humain. Bill Gates a d'ailleurs participé au financement d'une de ces startups (qui a réussi à lever 120 millions d'euros).

David Bikard travaille sur une autre application possible, avec son équipe et la société qu'il a lancé. "Si l'on injecte CRISPR-Cas9 dans une bactérie, en utilisant par exemple un bactériophage, un virus destiné aux bactéries, la bactérie meurt", explique-t-il. Cette méthode pourrait ainsi remplacer les traitements antibiotiques. Surtout, Cas9 élimine une bactérie bien précise et ne touche pas aux autres, essentielles pour l'organisme, alors que les antibiotiques sont "des sortes d'armes de destruction massive".

Licorne, embryon modifié et bébé sur-mesure

Mais jusqu'où cette nouvelle méthode peut-elle nous emmener? Peut-on vraiment imaginer faire revivre les mammouths, voire même créer des animaux imaginaires, comme des licornes? "Théoriquement, c'est possible. La limitation, c'est notre compréhension du vivant", explique David Bikard. Car si CRISPR-Cas9 permet de couper où l'on veut l'ADN, encore faut-il savoir ce que chaque séquence d'ADN provoque et ce que l'on peut changer.

Mais le coût est si faible qu'on peut facilement imaginer des recherches tous azimuts, dans toutes les directions. Y compris les plus prometteuses... et dangereuses. "On peut théoriquement corriger des maladies génétiques héréditaires, en modifiant les cellules germinales, qui permettent de créer spermatozoïdes et ovules. Auquel cas, on modifie l'évolution de l'espèce humaine", met en garde David Bikard.

Et, encore une fois, ce n'est pas de la science-fiction. On peut citer notamment l'équipe chinoise qui avait fait polémique en avril 2015 en modifiant un gène défectueux dans plusieurs embryons humains. L'expérience n'a pas été un franc succès (la modification n'a pas fonctionné dans la plupart des embryons) et a été abandonnée, mais la question est bien présente.

Une commission britannique étudie depuis le 14 janvier la possibilité de permettre l'utilisation de CRISPR-Cas9 d'embryons humains dans le cadre de recherches contre l'infertilité. En France, la recherche sur les embryons en général est encadrée par une loi qui interdit ces travaux, sauf dérogations spécifiques. Dans tous les cas, les embryons ne peuvent pas être "transférés à des fins de gestation".

Mais techniquement, la modification d'embryons se rapproche de l'homme. Des singes génétiquement modifiés grâce à CRISPR-Cas9 sont ainsi nés en 2014 dans le cadre de recherches chinoises.

Un groupe de chercheurs a appelé en décembre à un encadrement sur la question, demandant à ce que la recherche puisse continuer mais qu'une utilisation clinique soit interdite. En Mars 2015, d'autres chercheurs mettaient en garde contre les dérives d'une telle pratique.

Des questions qui vont continuer à se poser car, comme le disait un héros génétiquement modifié (de fiction), de grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités. Sans gène modifié, à vous de trouver de quel personnage il s'agit...

http://www.france-science.org/La-guerre-des-Deux-Roses-a-qui.html?mc_cid=5dd24bfaaa&mc_eid=5ed473d549

La guerre des Deux Roses : à qui appartient CRISPR ?

Publié le vendredi 22 janvier 2016 ,

Nonobstant les précautions d’usage en la matière, il existe, comme on l’a déjà abondamment indiqué en ces pages [1], une forte présomption pour que l’émergence de CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats) constitue une révolution d’une ampleur récemment inégalée dans le domaine de la recherche biomédicale, si l’on en juge par des indicateurs aussi divers que l’évolution du nombre de publications (d’une quinzaine pour 2012 à plus de vingt par semaine en 2015 [2]), le nombre de projets de recherche déposés (plus de 600 l’an dernier rien qu’aux Etats-Unis), l’existence d’un compte Twitter dédié ou l’étendue des champs applicatifs putatifs ouverts (de la résistance à l’oïdium [3] à l’éradication du HIV-1 [4] et du screening métastatique [5] à la –pour le moins polémique- modification génétique des embryons humains [6], voire même des usages au-delà du gene editing [7])

Si l’on en juge également par l’ampleur de la controverse qui l’entoure [8].

Quasi mécaniquement, dans un marché du biotech venture capital qui atteint des records historiques [9], les enjeux financiers et économiques liés à une telle révolution sont très importants. Au total, on estime à plus d’un milliard de dollars les investissements en capital réalisés en un an [10]. Dernier avatar significatif en date : le 21 décembre dernier, Bayer a annoncé la création d’un joint venture avec CRISPR Therapeutics (société fondée entre autres par Emmanuelle Charpentier) dans lequel la société allemande injecte 300M$ (plus une participation de 35M$ dans la startup) [11]. Et Editas Medicine, dans lequel ont investi entre autres Bill Gates et Google Ventures, vient de lancer son introduction en bourse à hauteur initiale de 100 M$ le 4 janvier dernier [12].

De manière contre-intuitive, cette course aux armements ne semble que peu freinée par le conflit en cours autour de la propriété intellectuelle liée au CRISPR-Cas9 qui oppose d’un côté Jennifer Doudna et l’UC Berkeley, de l’autre Feng Zhang et le Broad Institute of Harvard & MIT.

Tout part de la modification du droit des brevets américains. Jusqu’en 2013, celui-ci se fondait sur la règle du ‘first to invent’, le titulaire du brevet étant celui qui pouvait prouver son antériorité dans l’invention de ce qui était breveté. A partir de 2013, l’US PTO bascule sur le principe du ‘first to file’, ouvrant ainsi la voie, du fait des délais de traitement variables, à ce qu’un inventeur tardif se voit accorder un brevet au détriment d’un inventeur antérieur.

Dans le cas présent, l’origine du conflit se situe au moment du dépôt original de brevet de Doudna (13/842,859) le 15 mars 2013, soit la veille de l’entrée en vigueur du changement de régime. Le 15 octobre de la même année, Zhang dépose sa propre demande (14/054,414) mais en arguant d’une priorité remontant à décembre 2012 (soit sous l’ancien régime). Surtout, il l’accompagne d’une requête en examen accéléré, requête acceptée qui lui vaudra l’obtention du brevet le 15 avril 2014. Dès lors, Doudna va consacrer une partie importante de 2014 à peaufiner son dépôt initial [13] en cours d’examen de manière à rattraper sa défaite initiale. En particulier, sa stratégie va se cristalliser par le dépôt d’une ‘suggestion of interference’.

Et la juge administrative Deborah Katz vient le 11 janvier dernier d’accepter de statuer sur cette interférence, dans des attendus [14] assez forts qui indiquent que la charge de la preuve échoit à Zhang et au Broad Institute (lesquels sont les ‘junior parties’ alors que Doudna, Charpentier et alii sont considérées comme les ‘senior parties’), mais aussi en se plaçant dans une logique de winner takes all qui laisse assez peu de place à la négociation entre les deux parties, un éventuel accord devant de surcroît être approuvé par le PTO et non anti-concurrentiel. Trois juges indépendants vont désormais être nommés pour statuer sur l’interférence. Cependant, la litanie des recours et des appels auxquels il faut s’attendre pourrait faire perdurer ce conflit de droit pendant des décennies, au vu de certains précédents. Le sujet de la propriété intellectuelle d’une technologie médicale parmi les plus prometteuses du siècle risque de rester en question fort longtemps.

Rédacteur :
Olivier Tomat, Expert Technique International, olivier.tomat@ambascience-usa.org

Notes

[1] par exemple, http://www.france-science.org/CRISPR-Cas9-elue-decouverte.html

[2] https://innovativegenomics.org/blog/

[3] http://www.nature.com/nbt/journal/v32/n9/full/nbt.2969.html

[4] http://www.pnas.org/content/111/31/11461.abstract

[5] http://www.cell.com/cell/abstract/S0092-8674(15)00204-4

[6] http://link.springer.com/article/10.1007%2Fs13238-015-0153-5

[7] typiquement CRISPRi et CRISPRa ; cf. http://www.theatlantic.com/science/archive/2016/01/the-most-exciting-uses-of-gene-editing-technology-involve-no-editing/422619

[8] on passera ici volontairement sous silence la controverse, qui mériterait un article à elle seule, sur les enjeux éthiques concomitants. Pour une amorce de la discussion, cf. https://www.uam.es/personal_pdi/ciencias/jmsierra/documents/Baltimore2015Sci.pdf

[9] http://www.pwc.com/us/en/press-releases/2015/venture-capital-investing-exceeds.html

[10] http://media-publications.bcg.com/BCG-New-Era-Precision-Gene-Editing-09Sept15.pdf

[11] http://www.fiercebiotech.com/press-releases/bayer-and-crispr-therapeutics-ag-join-forces-discover-develop-and-commercia

[12] http://www.sec.gov/Archives/edgar/data/1650664/000104746916009534/a2226902zs-1.htm

[13] lequel comporte deux difficultés : la non-spécificité, contrairement au brevet de Zhang, du ciblage des applications eukaryotiques d’une part ; et d’autre part, le fait que sa co-déposante, Emmanuelle Charpentier, soit elle-même prise dans un système propre de propriété intellectuelle lié à des institutions européennes.

[14] https://acts.uspto.gov/ifiling/PDFfromDocumentum?No=106048&docTy=NOTICE+TO+DECLARE+INTERFERENCE&action=getContentByDocType

https://www.mediapart.fr/journal/france/250116/des-chercheurs-francais-sur-le-paludisme-accuses-de-biopiraterie?utm_source=article_offert&utm_medium=email&utm_campaign=article_offert&xtor=EPR-1013

http://abonnes.lemonde.fr/sciences/article/2016/01/25/crispr-cas9-dans-la-guerre-des-brevets_4853291_1650684.html

Le Monde | 25.01.2016 à 16h42 | Par Hervé Morin

Ces questions sont au cœur d’une controverse scientifico-économique aussi passionnelle que les débats sur la brevetabilité de l’ADN ou sur l’antériorité de la découverte du VIH. L’affaire met aux prises la Française Emmanuelle Charpentier, en poste à Berlin, associée à l’Américaine Jennifer Doudna (université de ­Californie à Berkeley), d’un côté, et Feng Zhang (Broad Institute du MIT à Harvard) et d’autres chercheurs bostoniens, de l’autre. Les premières ont cosigné en 2012 un article dans Science qui décrivait le potentiel de Crispr-Cas9 comme outil ­programmable d’édition du génome. Le ­second a dirigé des travaux publiés l’année –suivante qui montraient son efficacité sur des cellules de souris et humaines. Parallèlement, les uns et les autres ont créé des start-up et ­déposé des brevets sur la technologie.

Mais, le 11 janvier, une juge du bureau ­américain des brevets, l’USPTO, a accepté une action « en interférence » de Mmes Charpentier et Doudna visant à invalider l’octroi de ­brevets à Feng Zhang et plusieurs de ses ­collègues. La formulation employée par la juge attribue à ceux-ci la charge d’apporter les preuves de l’antériorité de leurs travaux. Une longue bataille commence, avec une ­première audition prévue en mars.

Un outil universel

Dans ce contexte, un article publié le 14 janvier dans la revue Cell par Eric Lander, grande figure de la génomique − et conseiller scientifique du président Obama −, n’est pas passé inaperçu. Intitulé « Les héros de Crispr », il retrace les étapes qui ont conduit à la mise au point de cet outil et met en lumière des acteurs ­jusqu’alors peu connus de cette épopée, dont les débuts remontent aux années 1990. Eric Lander souligne le rôle de plusieurs Français dans la chaîne des scientifiques qui a fait d’un mécanisme de défense immunitaire inventé par les bactéries contre les virus un outil ­universel de modification des génomes.

Certains voient dans cette mise à l’honneur des obscurs de l’aventure Crispr un stratagème pour relativiser la contribution de Mmes Charpentier et Doudna. La manœuvre est d’autant plus critiquée que Cell a omis de mentionner les liens d’intérêt d’Eric Lander, en tant que directeur du Broad Institute (où officie Zhang). Cell a fait savoir que le processus d’écriture et d’examen de l’article avait fait l’objet d’une ­attention scrupuleuse, soulignant que sa politique concernant les conflits d’intérêt n’englobait que ceux concernant les individus, pas les institutions. « En outre, Eric Lander a effectué une vérification des faits substantielle auprès des acteurs concernés », a précisé la revue.

Certains en disconviennent. Jennifer Doudna estime que « la description des recherches conduites dans [s]on laboratoire et des interactions avec d’autres chercheurs est factuellement incorrecte ». Emmanuelle Charpentier « regrette que la description de [s]a contribution et celle des [s]es collaborateurs soit incomplète et erronée ». Plus surprenant, George Church, éminent ­généticien rattaché lui aussi au Broad Institute, a critiqué le compte rendu d’Eric Lander, pointant que son équipe avait entamé ses ­travaux indépendamment de Zhang. Signe de désunion à Boston ? Eric Lander a en tout cas pris acte des objections de son collègue.

Gilles Vergnaud (Institut de génétique et de microbiologie d’Orsay), cité par Lander parmi les héros oubliés de Crispr, approuve sa démarche, qui a « le grand mérite de tenter de présenter la science comme elle se fait de façon à la fois collective et très individuelle et non de façon scénarisée avec réécriture de l’histoire ». Même s’il n’ignore pas que l’Américain peut avoir « son propre agenda ».

Interrogée sur la nature des erreurs concernant ses travaux, Emmanuelle Charpentier ­demande à ce que l’on en reste expressément à son commentaire en ligne. A propos de Crispr, chaque mot doit désormais semble-t-il être pesé par un avocat avant de résonner dans l’espace public.

Des chercheurs français sur le paludisme accusés de biopiraterie

25 janvier 2016 | Par Jade Lindgaard

Des scientifiques de l’IRD ont déposé un brevet sur une molécule présente dans une plante utilisée depuis des siècles en Guyane pour soigner le paludisme. La fondation France Libertés les accuse de s’accaparer les savoirs des populations autochtones. Alors que le Sénat doit voter mardi 26 janvier le projet de loi sur la biodiversité, cette affaire ravive la bataille autour de la privatisation du vivant.

Cet article vous est offert.

À première vue, cela ressemble à un beau succès de la recherche publique française. Des scientifiques de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) ont isolé une molécule prometteuse pour soigner le paludisme, « Simalikalactone » (SkE). Ils ont déposé un brevet pour protéger leur découverte et susciter l’intérêt d’un laboratoire pharmaceutique dans le but de développer un nouveau médicament. Ces chercheurs ont été récompensés par leur institution, qui leur a décerné le prix de l’innovation pour le Sud en 2013. Pour l’IRD, « malgré les efforts engagés, le paludisme ne régresse pas. Identifier de nouvelles molécules antipaludiques est donc toujours une priorité pour la santé et le développement ». SkE présente des vertus anticancéreuses que l’IRD souhaite également valoriser par le biais de partenariats industriels.

Mais les apparences peuvent être trompeuses.

La molécule SkE se trouve dans un arbuste à fruit rouges, commun en Guyane et sur une partie du littoral latino-américain, Quassia amara. Cette plante au goût amer est utilisée depuis plusieurs siècles par les habitants de ces régions tropicales pour se soigner contre le paludisme. Si bien que pour France Libertés, les chercheurs de l’IRD s’accaparent un savoir traditionnel en se prétendant propriétaires de l’usage de la molécule. Ses juristes s’opposent actuellement à ce brevet devant l’Office européen des brevets (OEB). Dans leur mémoire, ils accusent l’institut « d’une forme de racisme de l’intelligence » par leur « non-reconnaissance de la contribution des populations autochtones et locales et sa traduction sous forme de droits de propriété industrielle ». À leurs yeux, la recherche de l’IRD sur cette molécule relève de la biopiraterie, c’est-à-dire de l’appropriation illégitime de ressources biologiques et de connaissances traditionnelles de peuples autochtones. « L’IRD se comporte toujours comme un colon qui récupère le savoir des bons sauvages, dénonce Emmanuel Poilane, directeur général de France Libertés. C’est de l’accaparement. Le brevet est l’acte fondateur de la privatisation du vivant. Cet exemple est caricatural. » Mais pour Geneviève Bourdy, chercheuse à l’IRD et codétentrice du brevet, « cela n’a rien à voir avec la biopiraterie ! Je récuse cette accusation. C’est très désagréable d’entendre cela ». Quant à Éric Deharo, codétenteur du brevet, il lâche : « Les bras m’en tombent. C’est quinze ans de recherche qui tombent à l’eau. Quel laboratoire va s’intéresser à une molécule accusée de biopiraterie ? C’est une catastrophe. »

Arbuste Quassia amara en Thaïlande (Wikicommons).


Entre l’ONG et le laboratoire, ce sont deux logiques intellectuelles irréconciliables. Le conflit est ouvert et l’incompréhension totale. Alors que le Sénat vient d’achever la première lecture du projet de loi de Ségolène Royal sur la biodiversité, le sujet est très sensible. Pour la première fois, les parlementaires transcrivent dans la législation française les prescriptions contre la biopiraterie du protocole de Nagoya (2010). Désormais, les bénéfices issus de l’exploitation des ressources naturelles doivent être partagés équitablement. Et le brevetage des produits « issus de procédés essentiellement biologiques » va être interdit. Mais les recherches de l’IRD sur SkE remontent au début des années 2000.

Pour sa défense, l’IRD invoque cette chronologie : comment pourraient-ils s’être rendus coupables d’un délit non transcrit en droit français ? « Quand on travaille dans un pays, nous respectons son code éthique et sa législation. Quand les populations autochtones ont une existence juridique, nous la respectons. C’est exigé par la déontologie de notre métier », affirme Geneviève Bourdy. Or le droit français ne reconnaît pas l’existence de communautés autochtones en Guyane.

« Je vous invite à me dire qui l'on doit rétribuer », abonde Éric Deharo. « Les Créoles ? Les métros ? Les Hmongs ? Les Palikurs ?… Mais dans ce cas-là, il faut rétribuer aussi toutes les populations transamazoniennes et au-delà, car Quassia est utilisée partout dans le bassin amazonien jusqu’au sud du Mexique. Et cela depuis des centaines d’années. Voilà une question passionnante de débat : à qui appartiennent les connaissances transpopulations et transgénérations ? Et dans le cas précis de Quassia, la préparation est décrite par Kwasi au XVIIe siècle ! »

Les chercheurs ne réfutent pas ne pas avoir demandé le consentement des personnes qu’ils ont interrogées avant d’isoler la molécule, mais le justifient car « au départ, notre objectif n’était pas de déposer un brevet, explique Geneviève Bourdy. C’était une enquête épidémiologique sur les aptitudes de populations de Guyane face au paludisme, alors un gros problème de santé publique ». Le problème aux yeux de Thomas Burelli, juriste, associé au mémoire d’opposition de France Libertés, c’est que « des gens ont donné leur savoir à ces chercheurs qui l’ont breveté, et obtiennent ainsi le monopole de l’exploitation de la molécule. Tout ce qui contient cette molécule pourra être interdit de vente ».

Ce n’est pas parce que la cocaïne est interdite qu’on ne prépare pas des "maté de coca"

Des chercheurs en laboratoire peuvent-ils prétendre avoir « découvert » un traitement multiséculaire ? Éric Deharo répond que la molécule brevetée, SkE, ne se trouve pas dans le mode traditionnel de prise de Quassia amara : la préparation traditionnelle s’intéresse aux feuilles fraîches, la SkE se trouve dans des feuilles matures sèches. « Ce n’est pas parce que la cocaïne est interdite qu’on ne prépare pas des "maté de coca" dans les Andes. » Selon lui, « l’exploitation hypothétique de la SkE ne signifie nullement l’interdiction de l’utilisation de Quassia pour les tisanes (les feuilles) ou pour les gobelets (le bois) ». Le brevet « ne permettra pas à l'IRD d'empêcher l’usage personnel de la plante, sa consommation privée, reconnaît Thomas Burelli. C'est impossible à contrôler. Par contre, le brevet confère un monopole d'exploitation commerciale de l'innovation protégée : en l'occurrence la molécule pour le traitement du paludisme. Imaginons qu'un individu ou un groupe souhaite exploiter commercialement un remède à base de Quassia amara, le détenteur du brevet pourrait l’interdire. Étant donné que le remède contient la molécule protégée, le détenteur du brevet ou ses licenciés pourraient s'opposer à ce genre d’exploitation ».

Au-delà de ce cas d’école du Quassia amara, c’est toute la question de la propriété intellectuelle, de ses ressorts inégalitaires et des bénéfices économiques qui est posée. De son côté, Emmanuel Poilane explique : « L’IRD est un institut public. Qu’ils fassent de la recherche par le partage ! S’ils avaient déposé un brevet partagé, par exemple avec toutes les personnes qu’ils ont interrogées pour leur enquête, il n’y aurait aucun problème. Ce qui est contestable, c’est de conduire cette recherche dans une dynamique privative sans partage des avantages et avec pour finalité de vendre ce titre de propriété intellectuelle. »

Pour Thomas Burelli, « ils ont travaillé sur Quassia amara à la suite d’entretiens avec les habitants qui leur ont montré la plante et ses usages. Je n’accepterais pas que quelqu’un entre chez moi, y prenne tout ce qui l’intéresse et me dise de ne pas m’inquiéter, qu’il m’enverra tout ce qu’il fait. Quand vous rentrez dans un laboratoire pour le visiter aujourd’hui, la première chose qu’on vous demande, c’est un contrat de confidentialité. Il y a tout un ensemble de règles pour protéger les données et les savoirs ». Ou plutôt, certains d’entre eux.

Deux visions des savoirs et de leur valorisation s’affrontent. Les croisements entre médecine traditionnelle et industrielle semblent s’accroître. En 2015, le prix Nobel de médecine a été attribué aux chercheurs qui ont « découvert » l’artémisinine, une substance extraite d’une plante également utilisée contre le paludisme, à partir de l’étude de connaissances traditionnelles chinoises ancestrales. Pour l’IRD, cette récompense est bien la preuve que l’identification d’une nouvelle molécule est une activité inventive.


Cette vision est fortement remise en cause par l’activiste indienne Vandana Shiva. Elle compare les brevets sur les ressources biologiques et les savoirs traditionnels à du néocolonialisme : « Cinq cents ans après Christophe Colomb, il suffit d’appartenir à une culture non occidentale, avec un système de connaissances différent, pour perdre l’ensemble de ses droits. » C’est sur cette base que des brevets déposés sur le neem, une plante utilisée en Inde comme huile de chauffage et pesticide, ont été cassés après plusieurs années de mobilisation. De la même manière, le brevet déposé par la société française Greentech sur le Sacha inchi, une plante amazonienne produisant des amandes, a été annulé après la campagne de collectifs contre la biopiraterie. Au Canada, l’université de Victoria, en Colombie-Britannique, a adopté un protocole qui reconnaît un pouvoir de contrôle aux communautés autochtones sur les données collectées pendant la recherche, explique Thomas Burelli.

Il existe bien un décalage entre le droit français et les pratiques internationales de recherche, de plus en plus sourcilleuses sur le sujet. En France, cette discussion est si balbutiante et ses enjeux politiques si méconnus que l’interlocuteur contacté, pour cet article, à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), a dû se faire expliquer la définition de la biopiraterie.

La Chine peut-elle vraiment sélectionner génétiquement ses génies?

Will Oremus

Life

mis à jour le 15.05.2013 à 11 h 26

A Pékin. REUTERS/Jason Lee

Le mythe du super-bébé a été relancé par un article de Vice Magazine.

La reproduction sexuelle, c'est un coup de dés génétique. Sur une centaine d'ovules et des millions de spermatozoïdes, seuls deux se rencontreront pour former un bébé dont le capital naturel reflétera les meilleures caractéristiques de ses parents –ou les pires. Procréer par rapport sexuel, c'est jouer à la roulette russe avec l'ADN. Impossible de miser plus gros. Entre un bébé bien portant et un autre souffrant d'un handicap grave, il n'y a qu'un petit allèle de différence.

Et si la science était capable de jouer sur ces probabilités? D'augmenter les chances d'avoir un enfant intelligent et en bonne santé? La perspective est aussi exaltante qu'effrayante. Mais est-elle pour autant réaliste? En mars, un article du magazine Vice a été extrêmement partagé sur les réseaux sociaux. Il laissait entendre que la chose était aussi imminente qu'inévitable –juste qu'elle n'allait pas se produire dans nos Etats-Unis un peu trop obtus.

Cet article (traduit en français sous le titre: «La Chine a un nouveau plan pour dominer le monde, et il implique de l'eugénisme et des bébés génies») expliquait qu'en Chine, super-puissance asiatique et meilleure ennemie des Américains, un grand programme venait d'être lancé pour fabriquer, par ingénierie génétique, de gros intellos hyper-productifs. En voici un extrait:

«A l’Institut de génomique de Pékin (BGI), à Shenzhen, des scientifiques ont collecté des échantillons d’ADN sur 2.000 des individus les plus intelligents du monde, avant de séquencer leur génome pour identifier les allèles déterminant l’intelligence. Apparemment, ils ne seraient pas loin de les découvrir et quand ils l’auront fait, le dépistage des embryons permettra aux parents de choisir les zygotes les plus brillants et d’augmenter potentiellement l’intelligence de chaque génération de 5 à 15 points de QI. Au bout de quelques générations, chercher à concurrencer les Chinois sur le plan intellectuel reviendra à vouloir défier Lena Dunham à un concours de fous-toi-à-poil-à-la-télé

A première vue, un article aussi sensationnaliste était fait pour rencontrer le scepticisme de ses lecteurs avant d'être méprisé, voire démenti, par la presse généraliste. Mais non: le papier été partagé en masse sur Facebook et Reddit, et il s'est même payé les honneurs de la BBC, dans la revue de web de sa rubrique «Future».

Comment fabriquer des génies?

De fait, dans ses grandes lignes, l'article dit vrai –et pas seulement en ce qui concerne les strip-teases intempestifs de Lena Dunham. Mais il est aussi à bien des égards crédule, trompeur ou très largement exagéré. Et cela vaut la peine de trier le bon grain de l'ivraie, car dans un futur pas si lointain, on peut tout à fait concevoir que des parents aient à opérer un choix crucial avant de faire leurs bébés. Un choix entre féconder des embryons en laboratoire et analyser leur ADN pour tenter de sélectionner et d'engendrer le bébé le plus robuste possible, ou en rester à la bonne vieille méthode, en laissant la génétique au hasard.

Commençons par les erreurs. La Chine n'est pas en train de fabriquer des bébés par «ingénierie génétique». Et même si c'était le cas, impossible que les scientifiques chinois sachent comment fabriquer des génies. Et même s'ils le savaient, ils ne pourraient pas garantir l'obtention d'un génie, car le génie dépend tout autant des gènes que de l'environnement.

Par contre, ses éléments de vérité sont fascinants, exaltants et inquiétants. Des scientifiques sont d'ores et déjà en train d'améliorer le dépistage génétique des embryons humains pour détecter des maladies comme la mucoviscidose ou la drépanocytose.

Chez Reprogenetics, un laboratoire privé du New Jersey, les couples porteurs d'une maladie génétique peuvent vérifier que la mutation est absente de leurs embryons avant leur implantation dans l'utérus de la femme. Il s'agit du diagnostic pré-implantatoire (DPI), une technologie qui progresse à vitesse grand V. Santiago Munné, le directeur du laboratoire, m'a expliqué qu'il pense pouvoir proposer d'ici un an un dépistage génétique unique de plus de 100 maladies, pour quelques milliers de dollars.

Le DPI est déjà un moyen pour les femmes de sélectionner le sexe de leurs embryons. Et aux Etats-Unis, le choix se porte très largement vers les filles.

La prochaine grande étape consistera à séquencer tout le génome des embryons. Ce qui ouvre non seulement la porte à la sélection du sexe ou au dépistage de maladies monogéniques, mais aussi à la détection de troubles plus complexes, comme l'autisme –et même, pourquoi pas, à certaines qualités comme la beauté ou l'intelligence. Mais pour Munné, ce genre de «sélection positive» est inacceptable:

«Sélectionner des embryons en fonction, par exemple, de la couleur de leurs yeux, cela signifie en exclure d'autres, toujours sur la base de certains traits et c'est une démarche contraire à l'éthique.»

Mais tout le monde ne partage pas ses scrupules. Selon l'article de Vice, le gouvernement chinois chercherait à identifier les allèles ou les variations génétiques les plus strictement corrélés à un QI élevé, pour que les parents chinois puissent sélectionner leurs embryons en fonction de leur intelligence. Il ne s'agit pas pour autant de piper les dés génétiques, puisque les parents ne peuvent pas modifier leurs propres gènes. Et ce n'est pas non plus vraiment de l'ingénierie, puisqu'il n'y a aucune manipulation génétique au niveau de la descendance (ce qui pourrait arriver un jour, mais pas avant très longtemps, selon la plupart des experts). Il s'agit davantage de lancer les dés une dizaine de fois, et de choisir ensuite son chiffre préféré.

Détecter des troubles complexes

N'empêche que la perspective reste impressionnante. Ou pour citer Geoffrey Miller, psychologue évolutionnaire de l'université de New York –et faisant partie des 2.000 individus étudiés– dans Vice:

«Même si le QI de l’enfant n'est augmenté que d'une moyenne de 5 points, cela fait une énorme différence en termes de productivité économique, de compétitivité, du nombre de brevets obtenus, de gestion des entreprises et d'innovation.»

Mais là où Vice s'égare, c'est en laissant allègrement entendre que la chose est imminente. Certes, le BGI de Shenzhen s'est bien embarqué dans un projet de recherche visant à trouver des liens entre gènes et QI. Mais selon plusieurs experts, dire qu'une poignée de variations génétiques «déterminent l'intelligence humaine» relève de la galéjade, sans même parler du «apparemment, ils ne seraient pas loin de les découvrir». C'est que l'intelligence, voyez-vous, c'est un peu plus compliqué que deux ou trois allèles détectés par-ci par-là.

Selon Hank Greely, directeur à Stanford du Center for Law and the Biosciences [centre pour le droit et les biosciences], les dépistages génétiques pré-implantatoires pourraient un jour rendre la procréation sexuelle obsolète, du moins pour ceux qui en auront les moyens. Mais pour autant, rien ne peut prédire l'avènement d'une génération de génies-éprouvette.

«Il est plus que certain que l'intelligence –si on part du principe qu'elle existe en tant qu'entité indépendante, ce qui est loin de faire l'unanimité auprès des psychologues– implique une palanquée de gènes et de combinaisons génétiques, soumis en grande partie à des influences environnementales. Les probabilités de voir la sélection génétique déboucher sur une augmentation substantielle du QI humain sont donc assez faibles.»

Et Mussé est du même avis:

«Le QI est sans doute déterminé par plus d'un millier de gènes, tenter de les réguler, c'est déjà une entreprise vaine.»

Le problème est purement mathématique, poursuit Lee Silver, spécialiste de génétique et de biologie moléculaire à Princeton. Même en réussissant à isoler les gènes qui sont vraisemblablement à l’œuvre dans un QI élevé, la probabilité qu'un embryon donné soit porteur de la bonne combinaison est quasi nulle. «Ajoutez le fait que des facteurs non-génétiques expliquent entre 40% et 50% de la variance de traits comme l'intelligence» et votre projet est tout simplement voué à l'échec. Tout ça pour dire que le DPI «ne sera sans doute jamais utile comme méthode de sélection positive, mais aura un rôle de plus en plus important à jouer pour éviter la survenue de maladies chez les enfants».

Que doit-on dépister? Que peut-on dépister?

Dans tous les cas, rien ne dit que le BGI de Shenzhen ou même le gouvernement chinois soient réellement en train de mettre au point une sorte de programme de sélection génétique. Miller, l'unique source citée par Vice, m'a expliqué qu'il fondait cette conjecture sur ses «propres spéculations liées à l'histoire des politiques démographiques chinoises» ajoutées à quelques «discussions informelles avec des personnes impliquées dans l'étude». Pour l'instant, il ne s'agit donc que d'une étude scientifique, et rien d'autre.

Mais si Miller est d'accord pour dire que Vice a sans doute choisi un angle un peu trop sensationnaliste pour son article, il défend l'idée d'une sélection embryonnaire débouchant un jour sur des gains intellectuels substantiels.

«Ce qu'il faut savoir, c'est que le projet [du BGI de Shenzhen] ne vise pas qu'une poignée de gènes à détecter puis à manipuler, ce qu'ils recherchent, ce sont les millions de variations génétiques contribuant à l'intelligence, voir comment elles se combinent les unes aux autres. Et c'est là que réside la réussite potentielle de la sélection embryonnaire de l'intelligence.»

Même si certains ne sont pas d'accord avec Miller sur cette question, ils voudraient quand même en finir avec les débats éthiques autour du DPI. Silver, par exemple, se considère comme un défenseur de la procédure, du moins dans certains cas.

«Selon moi, même un choix partiellement éclairé est meilleur que le hasard. Ceux qui combattent une telle position ne voient souvent pas le processus naturel comme du hasard, mais comme l’œuvre de Dieu ou de Mère Nature. Mais comme je l'ai déjà dit dans l'émission de Stephen Colbert, “Mère Nature est une sacrée salope”.»

Pour autant, la frontière entre le dépistage de troubles et la sélection de traits peut être assez floue. S'il est acceptable de dépister la trisomie 21, quid des prédispositions génétiques à l'alcoolisme, la dépression ou l'obésité? Où tracer la limite entre handicap et QI faible? Au final, c'est peut-être une bonne chose que la fabrication de bébés-génies soit encore un horizon très lointain. Nous avons encore du temps pour nous décider: le pire, c'est de risquer un coup de dés ou de jouer à un jeu truqué?

Will Oremus

Traduit par Peggy Sastre

Will Oremus

Des Chinois tentent de modifier le génome d’embryons humains

LE MONDE | 24.04.2015 à 11h23 • Mis à jour le 24.04.2015 à 15h50 | Par Hervé Morin

Modifier le génome d’un embryon humain pour prévenir le développement d’une maladie chez cet individu, mais l’éradiquer aussi dans toute sa descendance. Cette expérience, qui touche au patrimoine héréditaire de l’espèce humaine, et contrevient à la convention d’Oviedo, ratifiée par la France et 28 autres pays européens en 2011, vient d’être tentée par une équipe chinoise. Décrite dans la revue Protein & Cell du 18 avril, elle concrétise les craintes exprimées ces dernières semaines par une partie de la communauté de la recherche en génie génétique.

Après la publication par le journal du Massachusetts Institute of Technology (MIT) d’une enquête très fouillée montrant des débuts de manipulation génétique des cellules sexuelles (y compris aux Etats-Unis), des chercheurs américains avaient publié dans les revues Nature et Science les 12 et 19 mars des mises en garde envers les tentatives de modifier ces cellules germinales : elles auraient pour effet de modifier l’hérédité humaine, et non plus, comme les thérapies géniques classiques, une partie seulement des cellules défaillantes d’un individu. Les craintes portaient notamment sur l’utilisation d’une nouvelle technique d’ingénierie du gène, CRISPR-Cas9, extrêmement efficace et simple à mettre en œuvre.

L’expérience chinoise, qui fait appel à cet outil, s’inscrit dans le spectre des manipulations visées par ces demandes de moratoire, dans la mesure où elle avait pour objectif d’effectuer des mutations chez l’embryon, qui se seraient de fait retrouvées dans ses cellules sexuelles – et potentiellement dans sa descendance.

Lire aussi : Les vertiges de la « chirurgie du génome »

Précisons-le d’emblée, l’expérience tentée par l’équipe de Junjiu Huang (Université Sun-Yat-sen, Canton) a échoué. Les 85 embryons ayant fait par la suite l’objet de modification avaient été obtenus auprès de centres de fertilité réalisant des fécondations in vitro - ils étaient dotés de chromosomes surnuméraires et n’avaient donc pas été retenus dans des projets parentaux. Aucun n’aurait été viable. L’expérience ne visait d’ailleurs pas à réimplanter ces embryons pour obtenir des bébés, mais à tester l’efficacité de cette nouvelle méthode d’édition de l’ADN afin de corriger un gène responsable d'une maladie génétique du sang, la bêta-thalassémie ou anémie de Cooley. Mais la technique CRISPR-Cas9 a été prise en défaut, dans la mesure notamment où de nombreux embryons présentaient une structure mosaïque, avec des cellules dont l’ADN avait bien été corrigé, mais d’autres où le gène défaillant s’exprimait toujours.

« Cela montre à quel point cette science est immature »

Pour le prix Nobel David Baltimore, interrogé par le New York Times, « cela montre à quel point cette science est immature. Nous avons appris beaucoup de leur expérience, principalement sur ce qui peut mal tourner ». David Baltimore faisait partie des deux premiers signataires de l’appel de Science à « suivre une voie prudente avant de manipuler le génome des cellules germinales ». Un autre prix Nobel, Paul Berg, lui aussi signataire de cet appel, avait été à l’origine il y a quarante ans de la conférence d’Asilomar, qui visait déjà à réfléchir aux risques liés au développement du génie génétique.

Certains estiment aujourd’hui qu’en génétique humaine, une telle conférence serait indispensable. En juin 2014, la Française Emmanuelle Charpentier, co-inventrice de l’outil CRISPR-Cas9, estimait ainsi que « cette technique fonctionne si bien et rencontre un tel succès qu’il serait important d’évaluer les aspects éthiques de son utilisation ».

L’expérience chinoise confirme chez l’humain ce qui avait déjà été montré chez d’autres espèces animales : malgré sa puissance, CRISPR-Cas9 n’est pas un outil parfait. Outre le risque d’introduire des modifications hors de la cible visée, on peut aboutir à des individus « chimères », dotés de plusieurs génomes différents. De plus, il est difficile de prédire tous les effets induits par une correction effectivement réalisée. « Notre étude souligne les défis posés par les applications cliniques de CRISPR-Cas9, concluent les chercheurs chinois, pour qui les effets de cet outil en dehors des gènes ciblés « devraient faire l’objet d’investigations exhaustives avant toute application clinique ».

Mais si la technique devenait plus efficace, la question du principe même de son utilisation ferait débat. Certains y voient une première étape vers une forme d’eugénisme et la quête du « bébé parfait », quand d’autres soulignent l’intérêt de maîtriser une capacité nouvelle à soulager l’humanité de certaines maladies héréditaires.

Lire aussi : Philippe Kourilsky : « L’homme s’autorisera-t-il à toucher à son hérédité ? »

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